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D’autres créent un « bataillon de la mort » BDLM.

Là, se met en place une filière pour accueillir les prisonniers évadés, leur faire passer la ligne de démarcation, puis la frontière des Pyrénées.

Au cœur même du pouvoir d’État, en zone libre ou occupée, le réseau Noyautage des administrations publiques (NAP) sabote, détourne, renseigne.

Toutes ces actions sont l’œuvre d’une minorité de Français mais elles changent le climat. La France n’est plus soumise.

De Gaulle, le 31 décembre, dans ses vœux à la nation, « au moment où commence une année de cruelles épreuves, mais aussi d’immenses espérances », martèle :

« Nous entendons, dit-il, refaire dans la guerre pour la France et pour la liberté du monde l’unité nationale rompue par l’invasion et la trahison. Nous prétendons libérer de l’ennemi ou des traîtres qui le servent tous les territoires et tous les citoyens français. »

Pour cela, il faut d’abord créer l’unité de tous les résistants autour de la France Libre, afin que celle-ci devienne, aux yeux de tous, le gouvernement qui représente la France.

Et que personne ne puisse entretenir le mensonge que les hommes de Vichy incarnent la France.

Mais regrouper tous les résistants – chaque groupe a sa vision de l’avenir – est une tâche difficile, et seul un homme exceptionnel peut l’accomplir.

Dans les dernières semaines de l’année 1941, de Gaulle a choisi cet homme qui doit être courageux jusqu’à l’intrépidité, patriote jusqu’au sacrifice, intelligent et visionnaire, et dévoué au général de Gaulle, partageant ses objectifs. Cet homme, c’est l’ancien préfet Jean Moulin.

Vêtu d’un costume de flanelle grise, d’un imperméable bleu marine, un chapeau mou sur la tête, un foulard autour de son cou, Jean Moulin doit être parachuté en France, en zone libre.

Avec lui, un radio – Hervé Montjaret – et un instituteur lieutenant de réserve – Raymond Fassin – seront largués en Provence, dans la région des Alpilles.

Jean Moulin connaît bien ce pays et possède une maison dans le village de Saint-Andiol.

Ce parachutage ne peut s’effectuer que pendant la période de la pleine lune, qui s’étend du 29 décembre 1941 au 8 janvier 1942.

Mais la tempête souffle et retarde le départ.

Il faut attendre dans le centre de regroupement de Newmarket, relire une nouvelle fois les faux papiers d’identité, vérifier les armes, les ampoules de cyanure.

On lit le journal France qui, dans son numéro 3 du 31 décembre, rapporte que, devant le Parlement canadien, Churchill a rendu hommage au peuple français et fait applaudir le nom du général de Gaulle et des Forces françaises libres.

L’impatience de Jean Moulin et de ses camarades s’en trouve accrue.

De Gaulle, qui craint les réticences anglaises devant cette mission dont ils ont compris l’importance politique, insiste pour que, quelles que soient les conditions météorologiques – qui peuvent servir de prétexte –, le bimoteur Armstrong Whitley soit autorisé à décoller.

L’autorisation est accordée pour la nuit du 31 décembre 1941. Un premier avion dépose Jean Moulin et ses deux camarades sur un aérodrome situé près des côtes de la Manche.

Dernière attente au mess, dernier café, puis embarquement sur le bimoteur qui décolle peu avant minuit, ce 31 décembre 1941.

L’avion aborde les côtes de la France, alors que se croisent dans le ciel les feux des projecteurs, les tirs de la défense antiaérienne allemande et que s’achève l’année 1941.

Dans quelques heures, à l’aube de ce 1er janvier 1942, Jean Moulin et ses camarades seront largués en France.

Peut-être, en cette première aube de l’année 1942, alors que le mistral pousse les trois corolles blanches des parachutes de Jean Moulin et de ses deux camarades, un Français Libre récite-t-il la prière écrite par le jeune aspirant André Zirnheld :

Je m’adresse à Vous, mon Dieu,

Car Vous seul donnez

Ce qu’on ne peut obtenir de soi…

[…]

Je veux l’insécurité et l’inquiétude

Je veux la tourmente et la bagarre

Et que Vous me les donniez, mon Dieu

Définitivement

[…]

Mais donnez-moi aussi le courage

Et la force et la foi

Car Vous seul donnez

Ce qu’on ne peut obtenir de soi.

FIN

[1] Alexander Werth, La Russie en guerre, Paris, Stock, 1964. Admirable livre d’analyse et en même temps grand reportage. Une « source ».

[2] Ibid.

[3] Les adversaires de Napoléon.

[4] Nevski a mis en déroute les chevaliers Teutoniques en 1242.

[5] Donskoï a battu les Tartares en 1380.

[6] Qui ont combattu les envahisseurs polonais au XVIIe siècle.

[7] Cité par Richard J. Evans, Le Troisième Reich, Paris, Flammarion, 2009.

[8] Ibid.

[9] August von Kageneck, La Guerre à l’est, Paris, Perrin, 1998.

[10] Ibid.