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Trop tard !

Les offensives russes lancées dès le mois de juin ont détruit la 6e armée allemande.

Le 30 août, les Russes entrent à Bucarest, et s'emparent de Ploiesti située au centre des champs pétroliers roumains. Et la Roumanie, après un coup d'État du roi Michel, change de camp. Les troupes roumaines retournent leurs armes contre les Allemands.

En un même élan, les Russes envahissent la Bulgarie qui cesse les hostilités le 26 août.

Au nord, les troupes russes pénètrent en Finlande jusqu'à Viborg. Les Finlandais exigent des Allemands qu'ils quittent leur pays et négocient avec les Russes.

Ceux-ci atteignent, en cette fin d'été 1944, la frontière de la Prusse-Orientale.

Sur le front ouest, les troupes anglaises et canadiennes de Montgomery, nommé maréchal le 1er septembre, après une chevauchée de 300 kilomètres, entrent le 4 septembre 1944 à Bruxelles et le lendemain s'emparent de l'immense port d'Anvers.

Les Allemands n'ont même pas eu le temps de faire sauter les installations portuaires et les Alliés disposent ainsi d'une base de ravitaillement au contact de leurs troupes.

Que peut faire Hitler alors que ses armées, à l'Ouest et à l'Est, se désagrègent, que des dizaines de milliers de soldats se rendent aux Anglo-Américains et même aux Russes ?

Le 31 août, le Führer réunit quelques-uns de ses généraux à son Grand Quartier Général.

Il les harangue d'un ton monocorde mais énergique.

Il annonce qu'il fera juger par contumace le général von Choltitz, commandant du Grand Paris, qui s'est rendu aux Français dans la capitale !

Choltitz a trahi : il n'a pas exécuté les ordres de destruction des ponts de Paris, et le Führer avait précisé : « Même si cette destruction systématique doit entraîner celle de monuments artistiques. »

De même, Paris n'a pas été bombardé par l'artillerie lourde et les V1, comme le Führer l'avait demandé.

Mais Hitler, d'un geste de la main, balaie violemment ce passé, tout en répétant que les traîtres seront châtiés, quel que soit leur rang.

Sa voix se fait plus forte.

Qui sait, dit-il, qu'en ce mois d'août 1944 les fabrications d'armement du IIIe Reich ont atteint leur record ?

Les usines, malgré les bombardements quotidiens, ont produit 869 chars et 744 canons d'assaut, de quoi équiper 10 nouvelles divisions blindées !

« Nos pertes vont être comblées, à l'ouest comme à l'est », répète le Führer.

Il s'approche de ses généraux, poings fermés, brandis.

« Si c'est nécessaire, dit-il, nous combattrons sur le Rhin. Cela ne fait aucune différence.

« Quelles que soient les circonstances, nous poursuivrons notre lutte jusqu'à ce que - pour citer Frédéric le Grand - un de nos damnés ennemis soit las de se battre !

« Nous lutterons jusqu'à ce que nous obtenions une paix qui garantisse l'existence de la nation allemande pour les 50 ou 100 prochaines années et qui surtout ne souille pas notre honneur une deuxième fois comme en 1918. »

Le Führer ferme les yeux quelques secondes, puis il reprend :

« Je ne vis que dans le but de mener ce combat parce que je sais que, sans le soutien d'une volonté de fer, cette guerre ne sera pas gagnée. »

Il dévisage l'un après l'autre les généraux. Et rares sont ceux qui soutiennent son regard quand il déclare que l'état-major de la Wehrmacht manque de cette « volonté de fer ».

Le Führer s'éloigne, voûté, la démarche hésitante.

Les généraux se lèvent, le saluent, bras tendu.

« Le moment viendra, dit le Führer, où la tension entre les Alliés atteindra son point de rupture. L'Histoire nous apprend que toutes les coalitions ont fini - tôt ou tard - par se désintégrer.

« Il n'est que d'attendre le bon moment en dépit de toutes les difficultés. »

QUATRIÈME PARTIE

Septembre

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Décembre 1944

« Le sort des guerres est décidé en dernier ressort par celui des antagonistes qui renonce à la victoire. « Nous ne devons laisser passer aucune occasion de montrer à l'ennemi que, quoi qu'il fasse, il ne devra jamais escompter notre capitulation. Jamais ! Jamais ! »

Adolf HITLER parlant à ses généraux, 12 décembre 1944

37.

Hitler, ce 1er septembre 1944, va et vient, bras croisés, buste penché en avant.

Il ne veut pas écouter ses généraux ! Il a parcouru leurs rapports.

Et la colère et le mépris ne le quittent plus.

Ils écrivent que les armées allemandes du front de l'Ouest ont perdu 500 000 hommes, dont la moitié ont été faits prisonniers.

« Il n'y a plus d'armées de terre - ni de chars, de camions et de canons, - encore moins d'aviation », conclut l'un d'eux.

Et ces généraux, qui ne savent pas ce que signifie avoir une « volonté de fer », se demandent comment défendre le sol sacré de la mère patrie !

Ces défaitistes imaginent que la guerre est terminée. Ils le souhaitent !

Le visage et les épaules du Führer sont secoués par des tics, ses mains tremblent.

Hier, 31 août, il a harangué ces pleutres. À quoi cela a-t-il servi ?

Il va donner des ordres à Goebbels pour qu'il organise la mobilisation générale.

Il faut que Himmler, qu'il a nommé chef de l'Armée de l'Intérieur, lève 25 divisions de Volksgrenadiers.

Il suffira d'abaisser l'âge d'appel au service armé de 17 ans à 16 ans et demi et de faire une sélection rigoureuse du personnel indispensable pour recruter près de 700 000 hommes en trois mois !

Mais Himmler, Reichsführer SS, est aussi ministre de l'Intérieur, chef de la police civile, et Hitler ne veut pas confier trop de pouvoir au même homme !

Car il faut même se défier de Himmler.

Ce sera donc le Reichsleiter Martin Bormann qu'il chargera de créer - d'abord sur le front de l'Est - des unités territoriales, encadrées par des membres du Parti nazi. Et cette levée en masse, le Volkssturm, sera la digue contre laquelle viendront se briser les hordes slaves, ces Russes, ces bolcheviks, qui menacent la Prusse-Orientale.

Hitler s'est affalé dans l'un des fauteuils de ce wagon-salon, placé au centre du train qui sert de Grand Quartier Général au Führer. Tout autour du train immobile s'étend une forêt épaisse, dont les arbres sont éclairés par les lumières du train.

Des SS montent la garde tous les cent pas. Leur présence seule rappelle que l'Allemagne peut être envahie dans les jours qui viennent, que la Luftwaffe n'a plus la maîtrise du ciel.

Mais ce train illuminé est comme la preuve que le Führer a une confiance totale dans la victoire. Que la Providence veille sur lui.

Les ultras de la collaboration franco-allemande qui attendent d'être reçus ce 1er septembre 1944 par le Führer le ressentent ainsi.

Il y a là, impatients et intimidés, Déat, Darnand, Brinon. Des SS les ont fouillés minutieusement.

Doriot a refusé de laisser un SS ouvrir sa serviette. Finalement, devant les protestations et la détermination de Doriot, les Allemands cèdent et Ribbentrop reçoit longuement les Français.

Le ministre ne doute pas de la victoire finale du Reich, de la rupture de l'Alliance entre les Anglo-Américains et les communistes russes.