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Ce n’est qu’à partir de la fin du XVIe siècle que la locution a été utilisée seule pour « abondamment ». Mais son origine nous rappelle que la flûte est un symbole de l’ivresse. Dans la mythologie grecque, déjà, Pan accompagne de sa flûte le cortège de Dionysos (Bacchus), le dieu du vin.

À titre d’exemple

« Il faut vous marier convenablement, et vous ne vous marierez convenablement que si vous faites défiler devant vous des messieurs convenables, à tire-larigot, comme on fait défiler devant soi des étalons au Tattersall.

Henri de Montherlant, Les Jeunes Filles, 1936.

L’occasion fait le larron

les circonstances peuvent amener à mal agir

L’expression proverbiale l’occasion fait le larron justifie l’acte de qui n’a fait que profiter des circonstances. Comme on ne sait plus très bien ce qu’est un larron, il arrive même que certains écrivent fait le lard rond ou le lardon. Le larron n’a pourtant rien d’un porc.

Larron vient du latin latro « voleur », comme l’espagnol ladrón et l’italien ladrone. Les Évangiles rapportent la présence de deux malfaiteurs crucifiés en même temps que Jésus-Christ, et distinguent le bon larron, qui se repent avant de mourir, du mauvais larron, qui ne regrette rien.

Selon notre expression, on devient voleur parce que l’occasion de voler se présente et que, selon Furetière, « la faculté [la possibilité] de dérober invite à le faire ». Plus généralement, ce sont les circonstances, plus que le tempérament, qui poussent à agir d’une manière ou d’une autre. On retrouve cette idée dans la fable de La Fontaine Les Voleurs et l’Âne, dans laquelle deux voleurs se disputent au sujet d’un âne qu’ils viennent d’enlever et qu’ils se font ravir par un troisième larron, la tierce personne qui profite du différend.

Lorsque deux larrons s’entendent, ce ne peut être que pour préparer un mauvais coup. S’entendre comme larrons en foire évoque la complicité de tire-laine, ancêtres des pickpockets, profitant de la cohue des foires pour détrousser marchands et clients. L’expression ne signifie plus que « s’entendre à merveille », parfois pour commettre quelque méfait, mais parfois aussi en toute innocence.

Les larronneaux, qui avec le temps devenaient de grands larrons, ont disparu, tout comme les jolies larronnesses de cœur. Ne nous reste que ce larron, prompt à saisir l’occasion lorsqu’elle se présente, à l’image du kairos, concept grec représenté sous les traits d’un jeune homme qu’il fallait attraper par sa touffe de cheveux au moment où il passait. Le larron et l’occasion jouent à qui est le plus vif.

À titre d’exemple

« Quand il voulut caresser, je ne me montrai pas si facile. Il pensait que l’occasion faisait le larron, et qu’étant en un lieu fort secret je me laisserais aller. »

Charles Sorel, La Vraie Histoire comique de Francion, 1623.

S’endormir sur ses lauriers

se contenter d’un premier succès et ne plus agir

Si quelqu’un, fort d’un premier succès, s’endort sur ses lauriers, ce n’est pas qu’il trouve le repos sur un lit de feuilles aromatiques : on ne prête au laurier aucune propriété anesthésiante, aucune vertu dormitive, pour parler comme les médecins de Molière.

Le laurier est l’arbre consacré à Apollon. Dans la mythologie grecque, le dieu poursuivait de ses ardeurs la nymphe Daphné, dont le nom signifie en grec « laurier ». Pour lui échapper, elle demanda l’aide de Zeus (ou de son père), qui la transforma en arbuste. À défaut de voir triompher son amour, Apollon s’appropria l’arbre. Souvent représenté sur la lyre du dieu, le laurier est consacré à la poésie et au chant, et récompense la valeur et la vertu. Tressées en couronnes, les feuilles de laurier ceignent le front des poètes célébrés, des athlètes victorieux, des guerriers vainqueurs et de tous les lauréats (du latin laureatus, « couronné de lauriers »). La récompense est devenue le symbole du succès. Ainsi, la victoire voit le héros couvert de lauriers.

Au XVIIe siècle, celui qui avait connu la gloire pouvait jouir d’un repos bien mérité et se reposer à l’ombre de ses lauriers. L’expression s’est modifiée en se reposer sur ses lauriers et son sens s’est restreint. Du repos mérité à la satisfaction qui empêche l’action, il n’y a qu’un pas. Ainsi, se repose-t-on sur ses lauriers quand, fort d’une première victoire, on ne veut plus fournir d’effort et on se contente de jouir des bénéfices du succès passé. Ce qui peut-être dangereux car la gloire est parfois éphémère. Ainsi, dans Le Cid de Corneille, Don Diègue, ce personnage âgé, honoré, respecté, se lamente de « voir en un jour flétrir tant de lauriers » pour avoir reçu un soufflet, affront humiliant.

À titre d’exemple

« À trente-deux ans, la jeune femme ne compte pas s’endormir sur ses lauriers. Elle a déjà écrit un second roman, […] dont l’action se déroule à Malaga. »

Le Figaro, 2015.

Être légion

être nombreux

Les récipiendaires de la Légion d’honneur sont triés sur le volet* et rares sont les élus. Alors pourquoi dit-on être légion pour exprimer une grande quantité ?

Il faut remonter à l’Antiquité et se souvenir que la légion était l’une des divisions de l’armée romaine. Le mot vient du latin legio, « choix, faculté de choisir (en latin legere) ». On peut comprendre que les soldats étaient choisis parmi les meilleurs. Il est également possible que cette étymologie soit liée au fait que les soldats romains étaient libres de se choisir un compagnon d’armes.

Toujours est-il que la légion était la division la plus importante, et, bien qu’on ignore précisément le nombre de fantassins et de cavaliers qui la constituaient, on peut imaginer qu’elle en comportait plusieurs milliers. En effet, la centurie, comme son nom l’indique, comprenait une centaine d’hommes. Deux centuries formaient un manipule, division de la cohorte, qui était la dixième partie de la légion. Cela pouvait représenter environ six mille légionnaires.