Conséquence de l’assemblage de plusieurs ampoules accrochées les unes aux autres.
M
Avoir maille à partir avec quelqu’un, avec quelque chose
Quand on emporte un pull à grosses mailles pour partir a la montagne, ce n’est pas forcément une source de conflit. Rien n’explique, à première vue, le rapport entre maille et départ. La langue est facétieuse, et il s’agit de tout autre chose.
Le latin médius, « demi », est a l’origine de nombreux mots français, ceux de la famille de moyen, et aussi ce maille qui désignait sous les Capétiens la plus petite monnaie, valant un demi-denier. Cette faible valeur a motivé plusieurs emplois disparus, comme pince-maille désignant une personne très avare, l’ancêtre du grippe-sou, faire la maille bonne pour souligner que le compte y est jusqu’à la plus petite pièce et ne pas valoir la maille qui équivaut à ne rien valoir. Ce mot est peut-être en rapport avec le synonyme familier d’argent même si avoir de la maille est tout différent d’avoir ni sou ni maille, et il n’a aucun rapport avec la boucle du tricot.
Quant à partir, il ne s’agit pas de se mettre en mouvement. Le verbe dans cette expression est plus ancien. Apparu dès le Xe siècle, il signifiait « diviser en parties ». Il a été évincé par son dérivé partager, mais il a donné partie, répartir et départir, ainsi que le verbe partir « s’en aller » que nous employons aujourd’hui, où survit l’idée de séparation.
Ainsi, avoir maille à partir avec quelqu’un, c’est littéralement avoir un demi-denier à partager avec lui, ce qui ne peut manquer d’entraîner des querelles car la maille est indivisible. C’est sans doute la confusion avec les homonymes qui a assuré la survie de l’expression. Quelle autre formule évoquerait mieux un conflit insoluble ? Essayez de partager avec quelqu’un un centime d’euro !
maille
[ mɑj ] nom féminin
ÉTYM. meaille XIIe ♦ latin populaire °medialia, de médius « demi »
HIST. Sous les Capétiens, La plus petite monnaie qui valait un demi-denier […]
Faire la manche
Bonjour Mesdames et Messieurs, pardonnez-moi de vous déranger pendant votre trajet, si je fais la manche ce n’est pas par plaisir… » Tel est le fond sonore de nombreux trajets en métro, à Paris et ailleurs. Dans un contexte moins désolant, un musicien, un acteur ou un jongleur de rue fait aussi la manche en présentant, après son spectacle, un chapeau à remplir, et dans ce cas il fait la quête, du verbe quérir qui signifie « demander ».
Coup de théâtre. L’expression a des origines fort nobles, chevaleresques même. Au temps de l’amour courtois, lorsqu’une dame choisissait le champion qui aurait l’honneur de jouter pour elle au tournoi, elle lui offrait parfois une manche de sa robe que le preux paladin attachait à son heaume. Dans Perceval ou le Conte du Graal, Chrétien de Troyes relate l’histoire de la Pucelle aux Petites Manches qui, pour s’opposer à Mélian de Lis, le champion de sa méchante sœur, choisit le chevalier Gauvain à qui elle remit « une manche longue et large », taillée dans « une pièce de soie vermeille ». C’est ce qu’on appelait « défendre les couleurs » de sa dame.
C’est ainsi que manche prit le sens de « gratification, cadeau ». À la Renaissance, époque d’échanges intenses entre la France et l’Italie, le mot franchit les Alpes sous la forme mancia, « pourboire, aumône », qu’on doit prononcer mantcha. Il fut réintroduit en français, avec sa forme d’origine, à la fin du XVIIe siècle. La formule faire la manche appartenait alors à l’argot des saltimbanques et des mendiants, avant de se généraliser.
Notre expression, qui fait le grand écart entre le héros courtois et le SDF, a donc pour origine la partie du vêtement appelée manche qui, tout comme le manche du balai, vient du latin manus, « main ». Mais entre le manche et la manche, qui peut être un « bras de mer », c’est une autre paire de manches.
« Bon, c’est vrai, il ne faisait pas la manche comme tous ces jeunes qu’il voyait dans le métro, ou devant le bureau de poste. Lui, il avait encore de quoi se faire à bouffer, et boire quelques pastis chez Jeannot. »
Être de mèche avec quelqu’un
Des salons de coiffure prennent pour enseigne De mèche avec vous pour rappeler d’un clin d’œil la complicité entre l’artiste capillaire et ses clients. Ces mèches de cheveux sont sans rapport avec notre expression qui évoque des ententes secrètes, des arrangements louches, dans l’intérêt des deux partis. Une personne de mèche avec une autre partage avec elle des intérêts peu avouables. C’est précisément l’idée de partage qui se cacherait derrière cet étrange emploi de mèche.
L’origine de l’expression, apparue à la fin du XVIIIe siècle, est discutée. Pour certains, cette mèche est le cordon imprégné de combustible que l’on fait brûler pour obtenir une flamme de longue durée. Dans une autre expression, vendre la mèche, « trahir le secret d’un complot », la mèche est la métaphore du mauvais coup en préparation, de l’arrangement préalable à quelque action malhonnête.
Pour d’autres, cette mèche serait apparentée au latin médius, et issue du provençal mech, « demi », proche de l’italien mezzo, « moitié » et « moyen ». On retrouve dans cette langue une expression de même sens, esser di mezzo con qualcuno. Celui qui est de mèche serait alors pour moitié dans l’affaire.
Quoi qu’il en soit, le mot apparaît d’abord en français dans l’expression à mèche d’affut, pour affure, « opération qui procure un bénéfice ». Elle était employée par les typographes pour indiquer le partage égal des bénéfices dans une coopérative d’imprimeurs. Dans l’argot des artisans de l’imprimerie, il était courant de poser la question y a-t-il mèche ? pour demander s’il y avait du travail à partager, à laquelle on répondait il y a ou il n’y a pas mèche. Cette dernière formule, négative, a pris plus tard le sens de « c’est impossible », autrement dit « y a pas moyen ».