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L’hôtel est souvent décliné en argot de façon plaisante :

L’hôtel de la modestie est un hôtel bon marché ou une mauvaise auberge (Delvau, 1866) ;

L’hôtel du rat qui pète désigne un « cabaret populacier » (idem) ;

Dans l’argot des voleurs, l’hôtel des quatre colonnes désignait la « salle commune du dépôt de la préfecture de police » (Virmaître, 1894).

N’oublions pas non plus l’hôtel des courants d’air, bien connu des clochards qui dorment sous les ponts.

En emploi absolu (sans complément), fréquenter est une expression saintongeaise (mais également attestée en Poitou et Vendée) dont ma famille en général et grand-mère en particulier faisaient grand usage. « Il ne fréquente toujours pas ! » ou « On ne le voit plus depuis qu’il fréquente ! » signifiaient respectivement et très étonnamment : « Il n’a toujours pas de petite copine » et « On ne le voit plus depuis qu’il a une amoureuse. » On peut supposer que ce sens de fréquenter vient d’un emploi transitif particulier du verbe : « fréquenter (aller habituellement dans) la maison de la personne dont on est épris ». En ce sens, on trouve dans Les Femmes savantes de Molière la forme fréquenter chez : « Sans doute, et je le vois qui fréquente chez nous » (II, 2, 1672).

Fréquenter n’a qu’un vague rapport avec la forme pronominale se fréquenter qui n’implique pas forcément une relation sentimentale.

Une fricassée de museaux

Une fricassée désigne d’abord, au sens propre, un ragoût, une gibelotte (de viandes blanches ou de poissons) puis, par extension, un fricot, un plat simple, modeste, peu onéreux, souvent au menu de ceux qui n’ont pas « assez de fric » (calembour d’un… goût douteux).

De cette fricassée-là ne demeure, dans notre expression, que l’idée de mélange, mélange de museaux, non pas en vinaigrette, mais à la faveur d’effusions avec force embrassades. Bref, une fricassée de museaux, c’est simplement un échange effréné de bisous.

Avoir un galant

Galant et « galéjade » ont une étymologie commune : l’ancien verbe galer, « s’amuser », notion bien présente chez le vert galant, cet homme d’un certain âge, amateur de drague, de bagatelle et de gaudriole, comme chez la femme galante, « femme légère et facile », idée présidant aussi à l’ancienne signification du mot galanterie, « intrigue amoureuse, liaison passagère », sens bien éloigné de l’acception moderne, « courtoisie envers les dames ». Galant et galanterie évoquent aussi le marivaudage tel que représenté dans les tableaux baptisés « fêtes galantes  » (de Watteau ou de Fragonard, par exemple). Il y a sans doute un peu de tout cela dans le galant de notre expression, autrefois employé en Saintonge au sens de « petit ami », « amoureux », voire « fiancé ». Témoin cet extrait d’un monologue de Goulebenéze (voir supra, Être benaise) : « Ol arrive ine drôlesse — et ine jholie prr’ exempl’lle — astheur all’ avait son galant avec elle… et ol allait pas pianghement parc’que les parents v’liant pas l’mariajhe[11] ! » (Hérodiade aux arènes de Saintes.)

Il y a de l’eau dans le gaz

L’expression a été revivifiée en 1962 par Claude Nougaro dans sa chanson Le Jazz et la Java : « Il y a de l’orage dans l’air, il y a de l’eau dans le gaz entre le jazz et la java. »

L’image est celle de l’eau qui éteint la flamme du fourneau et, faisant fuir le gaz, risque aussi de provoquer l’explosion. Claude Duneton (2001) explique l’expression par un incident se produisant fréquemment dans les années 1920–1930 quand le gaz de houille, chargé de vapeur d’eau, arrivait irrégulièrement jusqu’au réchaud des ménagères. L’eau et le gaz n’ont jamais fait bon ménage, pas plus que mari et femme quand, à force de disputes, le ciel conjugal tourne à l’orage. C’est bien alors le ménage qui menace d’exploser.

Une autre expression, issue d’un même contexte ménager, véhicule une idée semblable : « Le torchon brûle. »

Si « fréquenter » (voir supra) ou « avoir un galant » (idem), c’est avoir un ou une petit(e) ami(e), en tout bien tout honneur, courir le guilledou est moins convenable puisqu’il s’agit alors de rechercher des aventures amoureuses. L’expression est un peu surannée, beaucoup moins que « courir la prétentaine » (voir infra), un peu plus que « courir la gueuse ».

D’où vient ce joli mot de guilledou ? Peut-être de l’ancien verbe guiller, « tromper, séduire » dont il a déjà été question (voir supra, Il y a anguille sous roche) et qui, en Poitou, a le sens de « se glisser, se faufiler ». Courir le guilledou nous parlerait donc d’une manière douce de s’insinuer. On voit en l’occurrence ce qui peut se glisser et où cela se faufile. On trouve courir le guildrou dans l’Histoire universelle (1616–1630) d’Agrippa d’Aubigné : « Avisez à choisir, ou de complaire à vos Prophètes de Gascongne et retournez courir le guildrou […] » (vol. 8, ch. XXIV).

Elle a vu le loup

« Je la feray dancer, mais le bransle du loup. »

Tel est le projet du page dans Tyr et Sidon (acte IV, scène X), tragi-comédie que Jean de Schélandre (1584–1635) écrivit en 1608, projet érotique puisque danser le branle du loup est une manière déguisée de dire « faire l’amour ». Ce branle du loup se nommait aussi, de façon plus imagée, le branle de un dedans et deux dehors : « Je croy que tu ne te ferois point prier de danser le branle de un dedans et deux dehors » (Odet de Tournebeuf, Les Contens, acte III, scène IV, 1584, in Ancien théâtre françois).

Ces locutions ne laissent guère de doute sur la métaphore sexuelle assimilant le loup au membre viril, métaphore peut-être suggérée par l’interprétation équivoque que l’on a pu faire d’un autre proverbe existant au moins depuis le XVIe siècle : Quand on parle du loup, on en voit la queue. Dire d’une jeune fille qu’elle a vu le loup, c’est donc prétendre qu’elle n’est plus vierge, ce que Le Roux (1735) exprime de façon aussi délicate que savoureuse : « […] lorsqu’on parle d’une fille, cette manière de parler signifie avoir de l’expérience en amour, avoir eu des galanteries & des intrigues dans lesquelles l’honneur a reçu quelque échec. » Ce même Le Roux nous précise qu’avoir vu le loup s’emploie « pour avoir de l’expérience […] et se dit d’une personne qui a voyagé, vu du pays ou été à la guerre […] ».

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11

Arrive une jeune fille (et une jolie, je vous l’assure) ; présentement, elle avait son petit ami avec elle… et ça ne se passait pas très bien parce que les parents ne voulaient pas le mariage !