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Il froissa le message, soucieux. Ainsi, Yasmin avait bien disparu. Une pensée lui vint ensuite : comment Meili savait-elle qu’il aimait la vodka ? C’était peut-être une coïncidence. De toute façon, il avait besoin de se laver le cerveau. Abandonnant Elko Krisantem, il alla frapper au 436.

Meili devait camper derrière le battant car la porte s’ouvrit aussitôt. Il faisait un froid glacial dans la chambre et la première chose qu’il vit fut la bouteille de vodka disposée dans un seau à glace.

Meili s’était changée, arborant une robe en soie noire et blanche et – surprise – des bas gris ! Ses yeux brillaient d’un éclat inaccoutumé et elle avait un verre à demi plein à la main.

— Oh, je suis contente que vous veniez ! fit-elle. Vous savez, j’ai eu vraiment peur. Je n’arrête pas de boire. Vous voulez une vodka ?

— Volontiers, dit Malko, en prenant place dans l’unique fauteuil.

Après l’avoir servi, la Chinoise s’installa sur le lit, les jambes repliées sous elle. L’alcool glacé glissa agréablement sur le palais de Malko. Meili regardait d’un œil distrait le film débile qui passait à la télé. Soudain, elle proposa :

— Venez ! Mettez-vous près de moi, vous serez mieux.

Elle bougeait sans arrêt, faisant crisser la soie de sa robe contre ses bas, chassant du cerveau de Malko les questions qui l’obsédaient. Ce dernier, perplexe, commençait à s’interroger sur la jeune Chinoise. Soudain, celle-ci poussa un petit cri et posa son verre de vodka, portant la main à sa poitrine.

— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Malko.

Meili grimaça un sourire.

— Oh, ce n’est rien. Le contrecoup. Depuis tout à l’heure, j’ai eu plusieurs petits malaises comme ça. J’ai l’impression que mon cœur bat à toute vitesse, qu’il va exploser dans ma poitrine. Et puis, j’étouffe. Tenez…

Elle prit la main de Malko et la posa sur sa robe, à la hauteur du cœur. Il ne sentit aucun battement désordonné, mais la courbe tiède d’un sein petit et ferme que ne protégeait aucun soutien-gorge.

— Vous sentez ? demanda anxieusement Meili.

Son regard était totalement innocent. Elle ferma soudain les yeux et se laissa aller en arrière, entraînant la main de Malko, puis demeura ainsi, la bouche entrouverte. Elle replia une jambe et la soie de sa robe glissa, révélant le haut d’un bas gris et la chair blanche d’une cuisse. Pas dupe, Malko pressa doucement entre deux doigts la pointe du sein qu’il emprisonnait, ce qui ne pouvait en aucun cas passer pour un geste médical.

Meili poussa un gémissement imperceptible, la main qui retenait le poignet de Malko s’empara de sa nuque, abaissant son visage vers sa bouche et une petite langue pointue vint au-devant de la sienne. Quelques instants plus tard, la Chinoise semblait avoir complètement oublié son malaise, incrustée contre Malko de la bouche aux escarpins.

* * *

La sonnerie du téléphone les arracha à une étreinte passionnée. Meili décrocha, puis passa aussitôt l’appareil à Malko.

— C’est pour vous.

Il prit le récepteur, surpris. La voix d’un réceptionniste bafouillait quelque chose au sujet d’un homme qui le demandait en bas. Un « taxi driver ». Malko sauta du lit sous le regard plein de reproches de Meili qui en rabattit sa robe sur ses cuisses.

— Pardonnez-moi, dit-il, c’est très important. À tout à l’heure.

Un petit Pakistanais en gilet marron attendait près de la réception, intimidé, la moitié d’un billet de cent roupies à la main !

— Il dit qu’il a conduit une femme que vous cherchez à University Town, expliqua le réceptionniste.

Malko avait déjà récupéré au fond de sa poche l’autre moitié du billet.

— Où ? demanda-t-il.

Nouveau dialogue compliqué. Le réceptionniste traduisit :

— Il ne sait pas lire, il ne connaît pas le nom de la rue, mais il peut vous conduire.

Malko consulta sa Seiko-quartz. Dix heures trente. Pour Peshawar, c’était tard. Mais il ne retrouverait peut-être pas le chauffeur.

— Très bien, dit-il, je vais chercher quelque chose dans ma chambre et nous y allons.

Après ce qui s’était passé, il valait mieux être armé.

Chapitre IX

Après Jamrud Road, le taxi tourna dans une rue à gauche, absolument déserte, bordée de villas. Puis ils atteignirent une voie ferrée et le chauffeur vira encore à gauche, la longeant dans un chemin de terre défoncé. Ils se trouvaient à cinq ou six kilomètres de l’Intercontinental. Discrètement, Malko avait fait monter une balle dans le canon de son pistolet. Encore un kilomètre. Le chemin se terminait en cul-de-sac, mais le chauffeur bifurqua juste avant, dans une ruelle étroite, puis stoppa cent mètres plus loin en face d’une porte en métal noire.

— That’s here[21] !

Malko descendit. La chaleur était presque supportable. Une rafale de coups de fusils éclata, pas très loin et le chauffeur se fendit d’un large sourire.

— Pachtou wedding[22] !

Le silence retomba. Malko regarda la clôture, la porte et prit sa décision.

— You go ! fit-il en tapant sur l’épaule du chauffeur.

Il regarda les feux rouges s’éloigner et disparaître, inspecta la rue. Uniquement des villas. Quelques chiens aboyaient. D’un bond il grimpa sur le mur, franchit la grille pour retomber de l’autre côté, sur du gazon. Accroupi, il écouta.

La villa était plongée dans l’obscurité, à l’exception d’une fenêtre au rez-de-chaussée. Une Volkswagen était garée en face du portait. Il se dit qu’il devait y avoir un garde, comme dans la plupart des villas, mais qu’il dormait sûrement à poings fermés. Se relevant, il se dirigea vers la fenêtre allumée. L’herbe étouffait ses pas. Soudain, il se trouva sur du gravier et ne put éviter de faire du bruit. Il jura entre ses dents, s’immobilisa avant de repartir, le cœur cognant dans sa poitrine. Il atteignit enfin la fenêtre et aussitôt, ne regretta plus son escapade.

Yasmin était allongée sur un lit, vêtue d’une sorte de djellabah blanche transparente, en train de lire. La pièce était à peine meublée. Des vêtements épars traînaient un peu partout, sur des poufs.

Son désir se ralluma d’un coup. Combiné à l’envie de la surprendre, et de connaître la raison de son départ.

Il faillit frapper à la porte-fenêtre puis se ravisa et se mit à longer le mur jusqu’à la porte de la villa, curieux de savoir comment on allait l’accueillir. Il s’arrêta, entendant des ronflements sonores. Il distingua dans la pénombre un homme sur un charpoi, près de l’entrée : le veilleur de nuit. Doucement, Malko essaya la porte principale : fermée à clef. Passant alors devant le gardien, il continua et finit par trouver une porte entrouverte : celle de la cuisine supposée gardée par le veilleur de nuit ! Il s’y glissa sans réveiller le dormeur et s’arrêta, le temps de laisser ses yeux s’habituer à l’obscurité. Puis, il avança encore et ouvrit tout doucement la porte intérieure de la cuisine. Il distingua un hall d’entrée carré qui desservait plusieurs pièces. S’orientant, il le traversa en biais, afin de gagner la chambre où il avait vu Yasmin. Une faible musique le guidait. Il était à mi-chemin du hall lorsque brutalement une lumière crue jaillit du plafond. Une voix de femme cria derrière lui :

— Stop or I kill you[23] !

Malko se retourna lentement. Une femme de petite taille, en pantalon, debout sur les dernières marches d’un escalier de bois braquait sur lui un revolver.

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21

C’est là.

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22

Mariage pachtou.

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23

Arrêter ou je tire.