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– Attendez, attendez, que je comprenne bien. Lucy, vous dormiez avec Samy, chez lui, et vous avez été chloroformée et kidnappée. Mais lui, qu’est-ce qu’il lui est arrivé ?

– Je ne sais pas. Soit il a été lui aussi kidnappé et il est dans une pièce à côté, soit ils l’ont… Oh non ! Ce serait affreux.

– Cela ne me semble pas correspondre à des cambrioleurs. Quel intérêt de vous kidnapper ? Ils ne vont pas demander une rançon, car si oui, à qui ? À Samy ? À vos parents ?

– Pourvu qu’ils ne l’aient pas déjà tué !

C’est alors qu’un bruit de serrure se fait entendre ; la porte s’ouvre et les deux hommes du rez-de-chaussée pénètrent dans la pièce.

– Vous parlez à qui ? demande le plus grand en cherchant partout la trace d’un téléphone portable.

Ne trouvant rien, il fait signe à l’autre qu’elle doit être folle et parler toute seule. Le plus petit hausse les épaules et sort de sa poche une seringue et une fiole.

– Qu’est-ce que vous me voulez ? Pourquoi m’avez-vous kidnappée ? Si c’est de l’argent que vous voulez, sachez qu’on peut discuter. Je dois avoir des économies, peut-être 2 000 euros à la banque. Si vous m’accompagnez, je peux sortir cet argent et vous le donner. En échange, vous me laisserez partir, d’accord ?

– Je crois qu’elle n’a pas compris ce qu’il lui arrivait, ironise le plus petit en enfonçant la seringue dans la fiole.

– Alors expliquez-moi ! Est-ce que Samy est vivant ? L’avez-vous tué ?

– Samy ! Elle s’inquiète pour Samy ! ricane le plus grand.

– Dites-moi ce qui se passe ! J’ai le droit de savoir ! Qu’est-ce que vous voulez ?

Il saisit la jeune fille et relève sa manche de force. Elle se débat.

– Calme-toi et tout se passera bien, dit le plus petit.

– Tu vas voir, déclare l’autre d’un air goguenard, ton esprit va voyager dans des contrées dont tu ne soupçonnes même pas l’existence, et après tu te demanderas pourquoi tu n’as pas fait ça plus tôt. En plus, il n’est même pas question d’argent, on t’offre le trip gratos.

– C’est quoi ? Vous avez mis quoi dans cette seringue ?

– Ça porte un joli nom qui te va bien… C’est de l’héroïne. Pour l’instant tu es inquiète, mais bientôt cela te fera voyager et tu nous demanderas, que dis-je, tu nous supplieras pour en avoir encore.

Il saisit le bras de Lucy.

– Laissez-la ! crie Gabriel en donnant des coups de poing qui traversent la matière sans rencontrer de résistance.

– On ne peut rien faire pour elle, déplore Dolorès.

Le plus petit met un garrot en caoutchouc sur le bras de la médium, cherche sa veine dans le creux de son coude, puis enfonce l’aiguille. Lucy se débat en vain. Le liquide jaune entre dans sa veine et se mélange à son sang.

– Pourquoi ils lui font ça ? demande Gabriel.

– Je crois savoir. C’est ce qu’ils font pour prostituer les filles. Ils les tiennent par l’addiction à la drogue.

– On ne peut pas la laisser comme ça !

– Elle est dans la matière, nous sommes dans l’immatériel, on ne peut rien faire.

Les deux hommes s’en vont en lâchant :

– Fais de beaux rêves.

Lucy reste hébétée.

– Ga… Ga… Gabriel ?

– Oui je suis là, Lucy ! Je suis là !

– Gabriel, je… vous en prie… aidez-moi.

– Lucy ! Dites-moi ce que je peux faire…

– Ils vont venir, ne les laissez pas… entrer. Il faut que cela soit… vous…

– Qui ça, « ils » ?

Dolorès lui fait signe de lever la tête ; il distingue alors une dizaine d’âmes errantes collées au plafond qui affichent des airs ingénus.

– Qu’est-ce qu’ils font là, ceux-là ?

– Ils veulent lui voler son corps, répond Dolorès.

– Comment est-ce possible ?

– Avec l’héroïne qui va progressivement agir sur son cerveau, son aura va perdre son étanchéité. Son esprit ne sera plus retenu et va donc quitter son corps. Toutes ces âmes errantes veulent évidemment profiter de cette occasion pour lui emprunter son enveloppe charnelle.

– Comment sont-ils au courant ?

– Cela a déjà dû se produire ici. Ils savent que, de temps en temps, des filles sont droguées, et que la dose est suffisamment forte pour provoquer une sortie de corps. Ces âmes errantes sont comme des vautours de l’invisible qui guettent leur proie.

En effet, celles-ci s’approchent déjà.

– Gabriel ! Dolorès ! Je vous… entends… Ils sont là, n’est-ce pas ? Dites-moi s’ils sont là. Dites-moi la vérité !

– OK, il y a une dizaine d’âmes errantes, concède Dolorès.

– Ils veulent entrer en moi. Le premier qui entrera empêchera les autres d’entrer et après je ne pourrai rien faire. Il faut que vous entriez en premier, Gabriel.

– Quoi ?

– Je sais que ces charognards sont là… alors je vais vous demander quelque chose… Gabriel… prenez mon corps.

– Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.

Elle esquisse une grimace et se mord les lèvres pour arriver à parler clairement :

– Votre esprit est intact. Ma chair n’est plus protégée par une aura opaque. Dans quelques secondes, je ne serai plus étanche. Tout pourra entrer en moi. Si ce n’est pas vous qui prenez possession de mon corps, ce sera une âme errante étrangère et je ne suis pas sûre qu’elle voudra me le rendre par la suite. Vous seul… me semblez digne de confiance… Je vais sortir de ce corps par le chakra 7, au sommet de mon crâne… Disposez-vous sur le bord et, quand je sortirai, vous entrerez pour me remplacer… Vous voulez découvrir ce que ça fait d’être dans un corps de femme ? se force-t-elle à articuler. Tout homme a sûrement eu envie de le savoir au moins une fois dans sa vie, non ? Et puis je sais bien que vous avez voulu… allez, avouez-le… pénétrer mon corps… et là je vous propose de le pénétrer complètement…

– Mais pas comme ça !

– Si, il le faut, dit Dolorès. Elle a raison, vous devez entrer dans son corps et l’occuper, sinon il sera perdu. Une fois qu’une de ces âmes errantes parasites sera dedans, elle ne voudra plus en partir.

– Rendez-vous… à mon chakra 7.

Déjà les autres âmes errantes, qui ont entendu la conversation, s’approchent elles aussi du sommet du crâne de Lucy, prêtes à descendre dans son corps dès que cette issue s’ouvrira.

– Attendez ! Non, ne sors pas Lucy, l’avertit Dolorès, les parasites sont là aussi !

– Je ne peux pas gérer ça, pas dans mon état actuel… Attendez… j’ai peut-être une idée. Vous allez vous approcher au plus près du sommet de mon crâne… Je vais compter jusqu’à 20. Quand vous m’entendrez dire le nombre exact de mes chats, que seuls vous et moi connaissons, vous entrerez d’un coup dans mon corps. Cela vous donnera l’avantage. OK ? Si vous êtes bien synchrone, cela peut fonctionner. Vous êtes prêt ?

Elle commence à compter. Autour de Gabriel, les autres âmes avides de voler ce corps se tiennent prêtes, elles aussi, à se précipiter.