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— Quoi donc ?

— Le sang, sur ta chemise ? Et puis tu as au fond des yeux une lueur que je reconnais bien : je parie que tu baignes dans de sales problèmes.

Je hausse mes montants.

— Une histoire que je croyais simple au début et qui en définitive n’avance pas. Ça béchamelle !

— Vas-y !

J’y vais !

Une moitié de bouteille d’Yquem 76 encore à écluser ! Quand t’as fini de bouffer, faut jacter ! Et puis, dans mon cas, c’est bon de narrer ; en recréant pour d’autres, tu découvres des détails qui t’avaient échappé.

Alors je ritournelle une fois de plus. La Musaraigne m’écoute en balançant une jambe par-dessus l’autre. Bien faites, ses cannes. Pourquoi ne l’ai-je pas épousée ? J’ai eu tant de fois des velléités ! Je suis passé si près de le faire qu’à certains moments, il me semble confusément que nous avons réellement été maridas, elle et moi.

Je cherche où se trouve l’empêchement. Je l’aime et la désire. On a, bien sûr, baisé ensemble et ç’a été wonderful. Alors ! Qu’est-ce qui me retient ? Je me suis si souvent posé la question. Je crois confusément piger. Aimant Marie-Marie comme je l’aime, le jour où je la tromperais je n’oserais plus réapparaître devant elle. Quand bien même elle m’assurerait au préalable de son pardon. Or, pour ce qui est de la tromper, je la tromperais, parce qu’il n’est pas question que je ne saute pas sur une femme consentante. Y a du clébard en moi. Je n’y peux rien. Si, par un prodigieux sursaut de volonté, je passais devant une chatte sans l’ouvrir, je deviendrais malheureux, impuissant, qui sait ?

C’est à ça que je gamberge en dévidant ma petite historiette peu banale. Elle m’écoute attentivement, et pourtant je sens qu’elle vague dans des arrière-pensées assez semblables aux miennes, la petite chérie.

M’man nous a laissés au salon, avec son tact habituel. Marie-Marie, je pourrais la tirer sur le plancher en toute quiétude, jamais m’man n’ouvrira la porte avant nous.

— Tu portes des collants ? m’interromps-je.

— Jamais quand je viens chez toi.

Elle remonte quelques centimètres de sa jupe et je vois naître une jarretelle.

— C’est bien, balbutié-je avec émotion, tu es un être aussi fiable que le mètre étalon.

Sa jupe retombe.

Je me penche pour l’embrasser, mais elle n’y va pas à fond.

— Tu te gardes pour toi ? déploré-je.

— Non, répond-elle : pour toi.

— Tu te parfumes toujours avec « Mûr et Musc » ?

— Non.

— Avec quoi, alors ?

— Si je te le disais, tu irais m’en acheter une bonbonne. Ton rapport est terminé ?

— A peu près.

— Tu as déterminé ce qui constituait le point capital ?

— Il y a plusieurs points capitaux, ma poule.

— Il en est un qui prime les autres.

— Lequel ?

— Le cadavre de la fille de joie dans l’auto de ce Larmiche. Si ce n’est pas lui qui l’a tuée, le véritable assassin connaît parfaitement les habitudes du dealer et, mieux encore que cela, l’auto de ce dernier doit lui être aisément accessible. On ne se promène pas longtemps dans Paris avec un cadavre, y compris de nuit. Tu es certain que Larmiche n’est pas le meurtrier ? La manière de tuer correspondrait assez au sadisme d’un homo.

— Larmiche n’a jamais habité Lyon, non plus que Bourg-en-Bresse. Il ne buvait pas d’alcool fort et devait ignorer ce qu’est la tequila. Il ne serait jamais allé proposer sa drogue à la sortie d’un lycée en trimbalant une morte dans son coffre ! Et puis autre chose, vois-tu, mon amour : je lui ai parlé, je l’ai regardé au fond des yeux et j’ai été convaincu qu’il n’avait jamais buté personne.

— C’est ce qui me convainc le plus, déclare mon éternelle fiancée, car je crois en ton instinct. Vous avez enquêté dans l’impasse-garage ?

— Ton oncle Béru et mon Noircicot de Jérémie s’en sont dûment chargés. R.A.S. de ce côté-là. Le sculpteur et sa pétasse n’ont jamais vu ou entendu des gens suspects s’approcher de l’américaine et leur roquet de merde, qui est bon de garde, n’a pas déclenché d’alerte.

Elle reste pensive.

— Je sens que là est une grande partie de la clé de l’énigme, Antoine. Quelque chose me dit que le meurtrier de la prostituée n’a pas caché au hasard le cadavre de celle-ci dans la voiture du dealer. Il l’a fait en connaissance de cause, parce qu’il était au courant des activités de Larmiche. Il pensait que le garçon n’oserait jamais alerter la police, compte tenu de ses opérations illicites et qu’il devrait s’arranger pour planquer le cadavre. Il lui « passait le bébé », pour employer une expression usuelle. A Larmiche de se débrouiller. Dès lors, le tueur pouvait jouer les Ponce Pilate : il avait interrompu le contact entre sa victime et lui.

— En somme, Larmiche et l’assassin sont voisins ?

— Pas nécessairement. Ils peuvent avoir été rapprochés par leurs activités.

— Le meurtrier ferait dans la came, lui aussi ?

— Possible, mais d’autres circonstances de l’existence peuvent les avoir amenés à se côtoyer. Il faut chercher dans la vie de Larmiche :

— Chercher dans une vie de trafiquant, c’est guère commode.

— Il a été serré dans quelles circonstances, ton client ?

— La brigade des Stups, à la sortie du lycée André Sarda. Flagrant délit : il filait des sachets de poudre à des mômes de 12 ans. L’un des gosses avait cassé le morcif à ses vieux, lesquels se sont mis en cheville avec nos collègues.

— On ne peut pas avoir un entretien avec les draupers en question ?

— Fastoche, ma poule. Désormais, pour moi, tout n’est qu’un simple coup de téléphone à donner.

— Fixe-leur rendez-vous devant le lycée André Sarda !

— Mon affaire t’excite, si je puis ainsi m’exprimer ?

— Presque autant que toi !

Pas tombé dans l’oreille de Beethoven ! Je me penche pour la pelle parfumée Yquem. Toutes les vraies pelles devraient l’être ainsi. Comme embrasser me laisse les mains libres, ma dextre se coule couleuvre entre ses jambes. Dans ces cas précis, ta partenaire doit opter entre deux réacs : ou bien elle serre les quilles, et alors t’as affaire à une connasse du type pimbêche ; ou bien elle interprète avec empressement l’opération portes ouvertes, et en ce cas t’es tombé sur une pétasse sans retenue, ce que découvrant, tu te régales, tu lui laisses cent points pour rentrer chez elle en taxi et tu prétextes un rendez-vous chez le dentiste.

La Marie-Marie de rêve, elle opte pour une troisième soluce. Elle t’étreint puissamment, se tourne face à toi, ce qui la contraint à remuer légèrement les jambes, t’en profites pour organiser une reptation sournoise qui t’amène à l’orée de la jarretelle. Ensuite, ça devient de plus en plus large et tiède, presque chaud. Tu croises en chemin les premiers duvets follets, annonciateurs d’une végétation luxurante (j’ai pas mis de « i » exprès). La môme ne débloque toujours pas les lourdes de l’écluse. Elle préfère te laisser la responsabilité pleine et entière, tout en formant des vœux pour la réussite de ta mission.

Ah ! enfin ! Ton grand médius effleure une protubérance à ressort. C’est là que dans un stade de foot, les spectateurs se dressent en hurlant « But ! ».

Surtout ne chique pas l’impétueux Cosaque, mec ! Marque un palier de décompression. Du bout du doigt tu caresses, sans décider l’insinuement. Tout doux : en rond ! Tu cherches l’ergot à travers la frisure, mine de rien. Le détecte enfin, l’apprivoise. Il est le verrou à faire sauter. C’est pile pendant ce doux massage apprivoiseur que tu dois libérer ta gauche, posée dans le dos de la chère chérie, pour l’amener à un sein. N’importe lequel : le plus commode de prise, car ta posture n’est pas bénéfique pour ta gauche, tu penses : bouche à bouche et la droite dans le bénitier de Satan ! C’est en lui friselant le cabochon entre pouce et index que la situation va s’épanouir.