moenas ; elle se déroule en deux temps chez les Isopodes. La rupture du tégument se fait le long de lignes prédé-
terminées, dont la topographie varie d’un groupe à l’autre ; chez les Crabes, la première fente apparaît à la limite céphalothorax-abdomen et se prolonge par deux fentes sur le côté de la carapace. La calcification du nouveau tégument se fait d’abord à partir de réserves minérales accumulées avant la mue ou provenant de la résorption de l’ancienne cuticule (les gastrolithes, concrétions de l’estomac de l’Écrevisse, représentent des réserves de carbonate de calcium) ; ensuite, le calcium est absorbé dans le milieu extérieur, parfois aux dépens de l’exuvie, qui est dévorée.
On a pu élucider en partie le déterminisme humoral de la croissance chez les Malacostracés. L’ablation des organes localisés dans la tête provoque l’arrêt des mues, et leur greffe rétablit la croissance ; ces glandes émettent une hormone de mue, qui contrôle également la régénération d’appendices amputés. L’organe X, situé dans le pédoncule oculaire, joue un rôle inhibiteur de la croissance ; on pense qu’il accumule une hormone émise par les ganglions nerveux.
Chez les Insectes, les mues ne se poursuivent pas chez l’adulte ; l’imago marque le terme de la croissance, sauf chez quelques groupes primitifs (Thy-sanoures, Éphémères). Les formes
inférieures présentent souvent un nombre élevé de mues : jusqu’à treize chez certaines Blattes, une quinzaine chez des Libellules, une vingtaine pour
des Éphémères ; pendant les dix-sept ans de sa vie larvaire, la Cigale Magi-downloadModeText.vue.download 22 sur 625
La Grande Encyclopédie Larousse - Vol. 14
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cicada mue une trentaine de fois, alors que, chez la plupart des Hémiptères, on compte cinq mues, les Holométaboles montrent un certain nombre de mues larvaires (trois chez les Scarabées, quatre chez beaucoup de Lépidop-tères), puis une mue nymphale, enfin une mue imaginale qui libère l’adulte.
Les mues sont donc en liaison étroite avec les métamorphoses.
L’exuviation proprement dite débute par la rupture du tégument, généralement sur la ligne médio-dorsale du thorax ; l’animal s’extrait en abandonnant non seulement la cuticule qui recouvre le corps et les divers appendices, mais aussi celle qui tapisse l’oesophage, le rectum et les grosses trachées.
Des expériences réalisées sur la Pu-naise Rhodnius permettent de conclure à l’intervention de facteurs humoraux dans le déterminisme de la mue ; les recherches entreprises sur d’autres Insectes aboutissent à un résultat comparable : la partie médiane du cerveau antérieur émet une neurosécrétion qui stimule une glande située dans la tête ou dans le thorax selon les groupes ; elle libère alors l’hormone de mue, ou ecdysone, qui a pu être isolée à l’état chimiquement pur.
Autres animaux
y Tardigrades. Ces minuscules
habitants des mares et des Mousses peuvent s’enkyster à la suite d’une mue, enfermés dans l’ancienne cuticule, dans des circonstances défavorables. Ils offrent un nouvel exemple de mue indépendante de la croissance.
Nématodes. Pendant leur dévelop-
pement postembryonnaire, ces Vers subissent quatre mues, en renouvellant leur cuticule ; cependant, la croissance du corps peut se prolonger après la dernière exuviation.
M. D.
F Métamorphoses.
Muḥammad V ou
Mohammed V
Sultan (1927), puis roi (1957-1961) du Maroc (Fès 1909 - Rabat 1961).
Les débuts
En 1912, son père, Mūlāy Yūsuf, est appelé par les autorités françaises à succéder au sultan Mūlāy Ḥafīẓ, considéré par le nouveau protecteur comme intraitable et même nationaliste.
Le jeune prince Muḥammad ibn
Yūsuf (Mohammed ben Youssef),
confié à un précepteur algérien de formation traditionaliste, est relégué dans les palais de Fès et de Meknès. Son père l’appelle parfois à Rabat et, en 1926, il l’emmène avec lui en France.
Mais, peu de temps après, le prince est en disgrâce et même interné au palais de Meknès. Rien ne semble désigner ce jeune homme, chétif, morose et dédaigné par ses deux frères plus âgés que lui, à succéder à Mūlāy Yūsuf, mort en 1927.
C’est pourtant sur lui que se porte le choix du résident général Théodore Steeg (1868-1950), qui, succédant à Lyautey* en 1925, veut substituer à la politique de contrôle du maréchal une nouvelle politique fondée sur l’administration directe. À peine âgé de dix-huit ans, timide, effacé et sans expérience, le nouveau sultan ne peut gêner l’action des autorités françaises.
Muḥammad V passe ses premières
années en marge du pouvoir. Son
autorité ne s’exerce même pas sur le makhzen chérifien (l’administration centrale marocaine), qu’accapare le grand vizir Muḥammad al-Moqrī, qui jouit de la confiance de la Résidence.
Le jeune sultan sait mettre à profil son oisiveté pour compléter une formation encore rudimentaire. Sa curiosité se porte particulièrement sur le monde moderne. Il fait de fréquents voyages en France et ne tarde pas à s’entourer de Français. Bientôt, ce souverain de formation traditionaliste est gagné par le modernisme.
Parallèlement, il prend conscience de ses responsabilités de souverain et s’attelle d’abord à l’établissement de son autorité sur le makhzen. Pour atteindre cet objectif, il s’appuie sur le pacha de Marrakech Al Ḥādjdj Thāmī
al-Glāwī, dit le Glaoui, contre le puissant vizir al-Moqrī. Mais, une fois son pouvoir récupéré à Rabat, il se retourne contre le Glaoui au nom de la supériorité du pouvoir central sur les grands fiefs.
À partir de 1936, son pouvoir s’étend grâce au général Noguès (1876-1971), un ancien collaborateur de Lyautey au Maroc. Renouant avec la tradition du maréchal, le nouveau résident général mène, pendant près de sept ans, une politique d’entente et de collaboration avec le palais.
Le sultan et
les nationalistes
Son trône affermi, Muḥammad V
entreprend de se dégager de la tutelle étrangère.
Dès 1934, il est attiré par le mouvement nationaliste né en 1930 à la suite de la promulgation du dahir (ẓahīr, texte législatif) portant sur l’organisation de la justice en pays berbère et considéré comme une entreprise anti-islamique des autorités du protectorat visant à l’assimilation d’une partie de la population et, par conséquent, à la division du Maroc.
Toutefois, le jeune sultan ne se
déclare pas ouvertement nationaliste et adopte même une attitude prudente et réservée vis-à-vis du mouvement national. Il ne sort de sa réserve qu’en 1943, à la suite de l’évolution de la conjoncture internationale. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, à laquelle le peuple marocain prend, sous son instigation, une bonne part aux côtés des forces alliées, il sent le moment venu de s’émanciper. Sa rencontre en 1943, à Anfa, avec le président des États-Unis Franklin D. Roosevelt lui ouvre les perspectives de libération du Maroc avec l’appui américain. Désormais, Muḥammad V s’engage à fond
dans l’action politique pour demander l’émancipation de son pays et affirmer
sa souveraineté sur le Maroc.
Il s’entoure de jeunes nationalistes et complète à leur contact sa formation politique. À la fin de 1943, il favorise le rapprochement de tous les nationalistes, qui se constituent en un seul parti : al-ḥizb al-Istiqlāl ou parti de l’indépendance. Le 11 janvier 1944, trois semaines après sa fondation, le nouveau parti soumet au souverain un manifeste réclamant la reconnaissance de « l’indépendance du Maroc dans son intégrité territoriale sous l’égide de S. M. Muḥammad ibn Yūsuf ». Et le sultan ne manque pas de le communiquer, par l’intermédiaire de son entourage, au résident général ainsi qu’aux représentants diplomatiques des puissances alliées.
Mais, non préparé à la lutte, il ne résiste pas aux pressions des autorités françaises, incite l’Istiqlāl à modérer sa position et écarte du Conseil des ministres les deux membres qui ont appuyé sans réserve les revendications nationalistes.