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John fit signe que non.

— Tout ce que j’ai entendu dire, c’est qu’ils avaient fini par localiser la Terre et qu’ils avaient envoyé, quelques mois auparavant, un vaisseau de reconnaissance pour la visiter. Mais, réfléchis bien que ma situation ne me permettait pas d’atteindre leurs cercles gouvernementaux ou scientifiques. Ce que j’ai entendu dire, c’est ce que savait – ou ce que pouvait lire – l’homme du commun.

— Tu crois que si leur gouvernement avait été au courant, il aurait pu garder la chose secrète ?

— Il l’aurait pu. Je ne sais pas pour quelle raison, mais c’est possible.

Un bruit de pas étouffés se dirigeant de l’entrée vers la pièce dans laquelle ils étaient assis se fit entendre.

— Voilà Nuage Rouge, annonça Jason.

Il se leva pour accueillir son vieil ami quand il entra dans la pièce.

— Désolé de te tirer du lit, Horace, mais ils seront ici ce matin, dit-il.

— Je n’aurais voulu manquer cette veille pour rien au monde, répondit Nuage Rouge.

— Cette veille ?

— Certainement. Une coutume des anciens barbares d’au-delà des mers, pas une bêtise indienne.

— Tu veux dire, veiller les morts ?

— Et, cette fois, les morts sont une planète et un peuple, dit Horace. Ma planète, et mon peuple.

— Ils ont peut-être changé, dit Martha. Ils ont eu des milliers d’années pour acquérir des manières de voir différentes, une nouvelle moralité, pour mûrir un peu. Ils ont peut-être une culture différente.

Nuage Rouge hocha négativement la tête :

— D’après ce qu’il nous a dit, ce n’est pas ce que pense John. Il a passé quelque temps avec eux, et c’est la même culture qu’autrefois – un peu plus intelligente peut-être, un peu plus habile dans ses manières d’agir. Des gens comme eux ne changent jamais. Les machines font quelque chose à l’homme : elles l’abrutissent. Elles servent de tampon entre lui et son environnement, et cela le rend pire. Cela éveille en lui un instinct opportuniste et cela rend possible une avidité qui le rend inhumain.

— J’ai peur, dit Jason, si c’est ce que tu veux m’entendre dire.

— J’ai envoyé un canoë en amont du fleuve pour prévenir Stanley – je crois que c’est son nom, dit Nuage Rouge. Mais je me demande vraiment pourquoi nous nous soucions de lui.

— Cela nous concerne tous. Il a le droit d’être ici s’il veut venir.

— Tu te souviens de ce qu’a dit ce machin ? Nous sommes un facteur transitoire…

— C’est sans doute ce que nous sommes, dit Jason. C’est ce qu’étaient les trilobites, et aussi les dinosaures. Je suppose que les robots ont le droit de penser – ils ont même de bonnes raisons pour le croire – qu’ils nous survivront.

— Si cela arrive, ce sera bien fait pour eux ! dit Nuage Rouge.

29.

Ils arrivèrent à l’aube. Leur petit engin se posa en douceur dans le champ de mais. En atterrissant, il fit tomber une gerbe, la dispersa et écrasa trois potirons. Le petit groupe composé de trois hommes et du robot les attendait au bord du champ. Jason savait qu’il y avait d’autres robots aux alentours, bien cachés, qui regardaient avec crainte cette machine qui venait du ciel. Le sas s’ouvrit et deux hommes en sortirent. Ils étaient grands et lourds, vêtus d’un simple pantalon gris et d’une veste, et portaient une petite casquette sur la tête.

Jason s’avança à leur rencontre dans le champ. Ils se dirigèrent vers lui.

— Êtes-vous Jason Whitney ? demanda l’un d’eux. La personne avec laquelle nous avons parlé hier soir ?

— C’est moi, dit Jason. Bienvenue à votre retour sur Terre.

— Je m’appelle Reynolds, dit l’un d’eux en lui tendant la main. Mon camarade s’appelle Harrison.

Jason leur serra la main.

— Nous ne sommes pas armés, mais nous sommes protégés, dit Harrison.

Cela semblait presque être des mots rituels.

— Vous n’avez nullement besoin de protection ici, nous sommes hautement civilisés, dit Jason. Vous ne trouveriez pas un gramme de violence en nous tous réunis.

— On ne sait jamais, dit Harrison. Après tout, nous avons été séparés pendant quelques milliers d’années – suffisamment de temps pour changer. Évidemment, ce n’est pas une rencontre avec des étrangers mais, par certains côtés, cela n’en diffère pas beaucoup. Vous avez essayé de nous embrouiller la nuit dernière, M. Whitney.

— Je ne comprends pas, dit Jason.

— Vos mots étaient calculés pour nous faire croire que vous n’étiez pas au courant de notre arrivée. Je ne sais pas comment cela se fait, mais il est évident que vous la connaissiez. Vous avez soigneusement évité de vous montrer surpris, et si vous n’aviez pas été au courant, vous auriez été surpris. Vous avez essayé de faire comme si notre arrivée était de peu d’importance.

— Devrait-elle être importante ? demanda Jason.

— Nous avons beaucoup à vous offrir.

— Nous nous satisfaisons du peu que nous avons, répliqua Jason.

— Il y avait le faisceau, dit Harrison. Vous n’auriez pas eu de faisceau si vous n’aviez pas cru qu’il y avait quelqu’un. Il y a très peu de circulation dans cette partie de la galaxie.

— Messieurs, vous semblez être suffisamment sûrs de vos déductions pour vous permettre d’être grossiers, dit Jason.

— Nous n’avons pas l’intention d’être grossiers, dit Reynolds. Nous pensons vraiment que nous devrions nous entendre. Vous avez essayé de nous induire en erreur et cela pourrait clarifier la situation pour les conversations à venir si nous vous prévenons que nous nous en sommes rendu compte.

— Vous êtes nos invités, je n’ai pas l’intention de me quereller avec vous, dit Jason. Si vous êtes sûrs de ce que vous dites, il n’y a aucun moyen par lequel je puisse vous persuader du contraire – et d’ailleurs, cela n’aurait aucun sens d’essayer.

— Nous avons été quelque peu surpris d’apprendre, il y a quelque temps, qu’il y avait encore des humains sur Terre, dit Harrison d’un ton de conversation courante. Bien sûr, nous avions conscience qu’il devait y avoir des robots, car quelle que soit la chose qui nous avait enlevés, elle n’avait pas enlevé les robots. Mais nous avions évidemment pensé qu’il ne restait plus d’humains. Nous pensions qu’il nous avait tous eus.

— Il ? demanda Jason. Vous savez donc qui ?

— Pas du tout, répondit Harrison. Quand je dis « il », je personnalise peut-être à tort une force quelconque qui n’était absolument pas personnelle. Nous espérions que vous auriez peut-être une idée. Nous savons que vous avez beaucoup voyagé, beaucoup plus loin que nous.

Ils sont donc au courant des voyages dans les étoiles, pensa tristement Jason. Cela avait été trop que d’espérer qu’ils ne sachent pas.

— Pas moi, je n’ai jamais quitté la Terre, répondit-il. Je suis resté chez moi.

— Mais, d’autres ont voyagé.

— Oui de nombreux autres, reconnut Jason.

— Et ils communiquent ? Par télépathie ?

— Oui, bien entendu.

Cela ne servirait à rien de le nier. Ils avaient tout appris. Peut-être n’avaient-ils vraiment rien entendu de précis, peut-être ne leur avait-on rien dit, peut-être n’avaient-ils appris que des fragments d’histoire qu’ils avaient mis bout à bout ? Une poignée de petits faits suffisait pour qu’ils sachent tout. Il se demanda s’il s’agissait d’une nouvelle faculté – une meilleure psychologie, une capacité d’intuition, de prédiction ?

— Nous aurions dû collaborer plus tôt, dit Harrison.

— Je ne comprends pas, dit Jason.