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Ça ne marcherait sans doute pas, mais ça valait la peine d’essayer.

Second message : « Au QG de l’Alliance à Varandal, ici le capitaine John Geary, commandant par intérim de la flotte. Je vais tenter de vaincre cette flottille syndic et je demande toute assistance que vous pourrez nous fournir. Sachez que l’objectif des Syndics est de provoquer l’effondrement de votre portail d’hypernet afin de déclencher une décharge d’énergie à l’échelle d’une nova. En l’honneur de nos ancêtres. Geary, terminé. »

Desjani se rappela à son attention : « Cresida est en train de diffuser son paquet. Il devrait toucher tout le monde dans ce système.

— Parfait. » Il s’accorda un instant de réflexion et regarda ses vaisseaux se déplacer dans l’espace ; les arcs de leurs trajectoires dessinaient une résille brillante sur l’hologramme. Les cuirassés décrivaient une courbe d’une grande amplitude, tandis que les croiseurs de combat coupaient à travers le système stellaire pour aller prendre position de part et d’autre des Syndics.

N’aurait-il pas dû ajouter quelque chose pour son arrière-petite-nièce ? Mais que dire au beau milieu d’un combat ? Tu as sans doute remarqué que le Riposte n’accompagne plus la flotte. Cela parce que ton frère a sans doute trouvé la mort en couvrant notre retraite dans le système mère syndic. Au fait, il m’a confié un message pour toi.

Non. Toute information d’ordre personnel devrait attendre. Jane Geary n’avait nullement besoin de cette distraction. Lui non plus. Tant que la bataille n’aurait pas pris fin, il resterait avant tout le commandant de la flotte. Le capitaine John Geary n’arriverait qu’en deuxième position et le grand-oncle de Jane Geary en troisième, très loin derrière.

Les croiseurs de combat adoptaient une formation avec leurs croiseurs légers et leurs destroyers, tandis que les cuirassés perdaient déjà du terrain. Une longue attente succéderait à toute cette précipitation et cette effervescence. En dépit de leur plus grande vélocité, les croiseurs de combat n’atteindraient leur objectif (une orbite entre les Syndics et le portail) que dans vingt-cinq heures. Dans deux heures et demie environ, la flottille de réserve syndic assisterait enfin à l’émergence de la flotte de l’Alliance. Et celle-ci ne la verrait réagir qu’un peu moins de trois heures plus tard.

Geary appela la flotte. « Quittez le statut de combat imminent. Laissez se reposer votre équipage.

— Capitaine, le Howitzer demande des instructions. »

Il accepta le message et vit la mâchoire du commandant de ce vaisseau s’affaisser à sa vue. « Quels étaient vos ordres, capitaine ? » demanda-t-il.

Il fallut quelques instants à cette femme pour s’en remettre. « Euh… Nous avions pour instructions de maintenir la position près de ce point de saut, capitaine, en faisant si nécessaire office d’éclaireur et d’estafette.

— Très bien. Ce n’est sans doute pas la plus séduisante des affectations, je vous le concède, mais elle est capitale. Restez à votre poste. Si les Syndics réussissent à provoquer l’effondrement du portail, vous les verrez s’employer à détruire ses torons. N’attendez pas d’assister à son effondrement, car vous seriez anéantis par l’onde de choc. Vous vous rendrez sans doute compte de son imminence. Sautez juste avant et allez annoncer que Varandal a probablement été détruit.

— O-oui, capitaine.

— Merci. » Geary s’assit et fixa l’hologramme après la disparition de l’image du commandant de l’Horowitz en réfléchissant à ce qui pourrait mal tourner. « Où en seront les réserves de cellules d’énergie des croiseurs de combat quand nous atteindrons les Syndics, Tanya ?

— Plus ou moins à quinze pour cent, capitaine, selon ce que feront les Syndics.

— Quelle quantité de cellules d’énergie cette flotte brûle-t-elle lors d’un engagement normal ? »

Desjani ouvrit les mains. « Un des vôtres ou un de ceux que nous livrions avant que vous ne preniez le commandement, capitaine ?

— Un des miens.

— Les vôtres ne sont jamais “normaux”, capitaine. » Elle eut un sourire d’encouragement. « On pourra s’en sortir avec quinze pour cent.

— Si la foi se comptait en cellules d’énergie, vous pourriez alimenter toute la flotte, capitaine Desjani.

— Je ne suis pas la seule à avoir la foi, capitaine Geary. » Elle loucha vers les vigies de la passerelle qui discutaient de la situation, calmement ou avec excitation. Aucun de ces officiers ne trahissait une once d’appréhension ou d’irrésolution. « Ils ne redoutent absolument pas le dénouement. »

Environ cinq heures plus tard, Geary étudiait de nouveau l’hologramme. Le capitaine Jane Geary s’y encadrait dans une fenêtre ; elle accusait réception de ses ordres, la voix tendue, le regard brûlant, dans une posture rigide. Manifestement épuisée par la longue bataille qu’elle avait livrée avant l’émergence de la flotte, elle affichait une mine hagarde. Certes, Geary savait qu’en raison du siècle qu’il avait passé en sommeil de survie son arrière-petite-nièce serait plus âgée que lui, mais constater de visu qu’elle faisait légèrement plus vieille que son grand-oncle lui faisait tout drôle. « Capitaine Jane Geary au rapport. Demande instructions au commandant en chef par intérim de la flotte. Je crois comprendre que nous devons combattre jusqu’à la mort pour empêcher les Syndics de détruire le portail de l’hypernet. Geary, terminé. »

Elle avait sans doute évité de prononcer son nom, mais elle ne contestait pas son autorité. L’espace d’une seconde, Geary lui en voulut de n’avoir pas salué, puis il se rappela qu’en dehors de sa flotte personne ne se pliait plus à ce geste de courtoisie qu’il y avait réintroduit. Son oubli n’était donc pas une insulte délibérée.

Jane Geary avait de toute évidence parfaitement compris les consignes : il fallait à tout prix arrêter les Syndics. Avait-elle aussi compris qu’elle devait autant que possible, dans cette même mesure, éviter la destruction de son propre détachement ?

« Tout va bien, capitaine ? s’inquiéta nonchalamment Desjani.

— Je regrette seulement que mes retrouvailles familiales ne se déroulent pas dans des circonstances moins stressantes. Minute ! Les Syndics réagissent. » Deux heures et demie plus tôt, la flottille de réserve avait altéré sa trajectoire vers le bas pour piquer sur le portail. Geary effectua quelques calculs et constata qu’ils l’atteindraient avant ses croiseurs de combat. « À Jane Geary de jouer. Peut-elle les ralentir ?

— Espérons-le. » Les défenseurs survivants du détachement de l’Intrépide avaient devancé les Syndics et maintenaient l’écart avec l’ennemi qui fondait sur le portail. Geary assista à leur repli pendant près d’une demi-heure, en se demandant ce qu’allait faire Jane Geary.

La réponse lui apparut quand l’hologramme annonça des frappes de mines sur des bâtiments de la flottille de réserve. « Joli, apprécia Desjani. Ils ont attendu que les Syndics aient adopté une trajectoire fixe à leurs trousses pour balancer des mines dans leur sillage. Regardez. Ce croiseur de combat a été touché trois fois.

— Ils ont aussi perdu un croiseur lourd », nota Geary. Aucun autre vaisseau syndic ne semblait atteint, mais chaque coup porté, même infime, contribuait à rétablir un peu l’équilibre.