Выбрать главу

Les visages s’éclairèrent et quelques sourires réapparurent pendant qu’il poursuivait :

« Les probabilités pour que la force syndic chargée de nous intercepter nous attende à Héradao restent assez fortes, puisque ce système se trouve directement sur le chemin de l’Alliance. Si une flottille ennemie s’y trouve, nous la combattrons, car nos réserves de cellules d’énergie ne seront jamais plus hautes avant notre retour. »

Il jeta un coup d’œil vers Desjani, qui ne laissa voir par aucun signe qu’il la citait pratiquement mot pour mot. Je ne peux pas me permettre pour l’instant d’alimenter les rumeurs de favoritisme qui courent déjà sur Desjani, mais, dès que tout sera terminé, je veillerai à ce qu’elle et ses pareils soient récompensés selon leur mérite. Il se contenta donc d’indiquer une étoile blanche très brillante. « Après Héradao, nous gagnerons Padronis et, de là, Atalia. »

Un soupir donna l’impression de parcourir toute la tablée ; le capitaine Badaya, de l’Illustre, exprima à voix haute ce que tous pensaient sans doute tout bas : « Et Atalia ne se trouve qu’à un saut de Varandal.

— En effet, convint Geary. Comme l’espace de l’Alliance et la plus forte concentration d’installations logistiques de la flotte de tout le secteur. Une fois à Varandal, nous disposerons de tout le ravitaillement dont nous aurons besoin.

— La hardiesse est assurément de rigueur, renchérit le capitaine Caligo du croiseur de combat Brillant. L’Alliance a besoin de nous et de tous les prisonniers que nous pourrons arracher au territoire syndic. »

Cette affirmation indéniable valut à Caligo quelques hochements de tête approbateurs et Geary s’accorda un instant pour l’observer. L’homme s’était montré peu loquace lors de ces réunions, la plupart du temps, et il n’avait commencé à s’exprimer que très récemment. Caligo n’avait d’ailleurs encore rien dit d’extraordinaire et il se contentait d’abonder dans le consensuel.

« Nos gens du renseignement estiment que l’arsenal de mines des Syndics s’est considérablement appauvri après toutes celles qu’ils ont disposées dans les systèmes stellaires voisins de Lakota pour tenter de nous piéger, poursuivit Geary. Néanmoins, nous procéderons à une manœuvre évasive préprogrammée et nous serons prêts à combattre en émergeant du point de saut à Héradao. Des questions ?

— Pourquoi pas Kalixa ? demanda le capitaine Kila. Ce système se trouve lui aussi sur notre route et il est doté d’un portail de l’hypernet. » Elle avait manifestement tenté d’imprimer un accent affable à sa voix, mais celle-ci restait tranchante. Décidément, la diplomatie n’était pas le point fort de Kila, mais Geary le savait déjà.

« Nous n’allons pas à Kalixa, répliqua-t-il. Le portail de l’hypernet pose un risque trop élevé. »

Kila feignit l’étonnement. « Cette flotte aurait-elle peur des risques ? Nous ne craignons pas les agissements des Syndics, capitaine Geary, mais ce serait une excellente occasion de leur infliger davantage de dommages en anéantissant un de leurs systèmes.

— Veuillez m’excuser, capitaine Kila, intervint Neeson d’une voix empreinte d’incrédulité, mais vous étiez bien avec nous à Lakota quand notre flotte a failli être détruite, n’est-ce pas ?

— Elle ne l’a pas été, rétorqua Kila. Renoncer à agir par crainte excessive de la riposte ennemie, ce n’est pas ce qu’on attend de la part du commandant d’une flotte, et encore moins de celui d’un croiseur de combat. »

De fureur, le visage de Neeson vira brusquement à l’écarlate. « M’accuseriez-vous de couardise ?

— Silence ! ordonna Geary. Tout le monde ! Capitaine Kila, votre remarque était déplacée. »

Elle haussa les épaules. « Je ne cherchais pas à insulter qui que ce soit. Seulement à faire remarquer que…

— Suffit ! » Geary vit une lueur de défi briller dans les yeux de Kila quand il lui coupa la parole. « Le capitaine Neeson a donné maintes fois la preuve de son courage. Je ne tolérerai pas qu’on mette en doute sans une bonne raison la bravoure d’un de mes officiers. »

Cresida, qui attendait visiblement une ouverture, s’engouffra dans la brèche : « En outre, le capitaine Neeson a parfaitement raison. Lors de l’effondrement du portail de Lakota, la décharge d’énergie était au niveau le plus bas de l’échelle théorique. Je rappelle au capitaine Kila que le plus haut peut être équivalent à celui d’une nova. Nul vaisseau présent dans ce système n’y survivrait, même s’il se trouvait le plus loin possible du portail à l’instant de son effondrement.

— En théorie, lâcha Kila, sarcastique. Nous n’avons rien vu de tel à Sancerre ni à Lakota, tant et si bien que la théorie est peut-être erronée et qu’on pourrait se servir en toute sécurité des portails pour éliminer des systèmes stellaires syndics et leur faire enfin payer plein pot ce qu’ils nous ont infligé pendant cette guerre !

— Cette déclaration trahit une totale incompréhension de ce que nous savons des portails et des données recueillies à Sancerre et Lakota ! éructa Cresida, de plus en plus échauffée.

— Suffit ! rugit de nouveau Geary. Le capitaine Cresida dit vrai. Nous n’avons pas à débattre ici de questions scientifiques. Je vous recommande de vous familiariser avec les données connues avant de suggérer une ligne d’action, capitaine Kila. » Celle-ci vira au cramoisi sous la rebuffade à peine voilée.

Le commandant du Risque-tout opina. « Quant à notre capacité à abattre un portail, nous avons tous vu ce qui était arrivé aux bâtiments syndics qui ont détruit le leur à Lakota.

— Nos vaisseaux… commença Kila.

— Le mien était sur place quand celui de Sancerre s’est effondré, et l’Inspiré s’en trouvait très loin ! Je sais exactement ce qu’on ressent à proximité d’un portail en train de s’effondrer, et, quoi que vous puissiez dire, je ne tiens pas à participer de nouveau à cela. Seules la chance et les vivantes étoiles nous ont sauvés à Sancerre et Lakota.

— Chance, courage et matière grise, ajouta Geary. Tant que la flotte profitera de ces deux derniers ingrédients, nous pourrons réserver le premier aux urgences. Quant à nous servir des portails de l’hypernet pour détruire des systèmes stellaires ennemis, j’ai déjà affirmé que je n’ordonnerai jamais un tel acte. Ni les vivantes étoiles ni nos ancêtres n’approuveraient qu’on commette une telle atrocité et à une telle échelle.

— Il semble donc que nous n’ayons aucune raison de nous rendre à Kalixa », fit observer Duellos.

Kila lui décocha un regard noir, tandis que Caligo intervenait de nouveau : « Nous formons une flotte. Nous croyons tous aux mêmes valeurs. En nous divisant, ces discussions ne peuvent que servir l’ennemi. »

Sa déclaration lui attira de nouveaux hochements de tête approbateurs. Geary non plus, d’ailleurs, n’aurait pu prendre ces paroles en défaut et, pour on ne sait quelle raison, elles eurent le don de clouer le bec de Kila, qui finit par rengracier.

« Y a-t-il d’autres questions ? » s’enquit sèchement Geary.

Il n’y en eut pas et la réunion prit fin dans un tourbillon confus d’images disparaissant, tandis que le compartiment donnait l’impression de rétrécir pour recouvrer ses dimensions normales.