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— J'en suis tout à fait conscient.

— Il faut une autorisation écrite signée du conservateur et du Conseil des bibliothécaires du Vatican.

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— Ou bien, corrigea Langdon, un agrément du pape. C'est du moins ce que précisaient toutes les lettres de refus que votre conservateur m'a envoyées.

Le camerlingue acquiesça.

— Si je ne me trompe, et sans vouloir vous forcer la main, les agréments sont émis par ce bureau? Autant que je sache, ce soir, c'est vous qui êtes aux commandes de cette nation. Compte tenu des circonstances...

Le camerlingue tira une montre de la poche de sa soutane et y jeta un rapide coup d'œil.

— Monsieur Langdon, je suis prêt à donner ma vie, pour sauver cette Église.

Langdon fut ému par la flamme de sincérité qui luisait au fond de ses yeux.

— Ce document, reprit le camerlingue, vous croyez vraiment qu'il se trouve ici? Et qu'il peut nous aider à localiser les quatre cardinaux?

— J'en suis convaincu.

— Savez-vous où se trouvent les archives secrètes?

Langdon sentit son cœur battre un peu plus vite.

— Juste derrière la Porte Santa Ana. Chaque chercheur doit être accompagné par un bibliothécaire. Ce soir, les bibliothécaires sont partis. Ce que vous me demandez est un accès sans contrôle... Même nos cardinaux doivent se faire accompagner.

— Je traiterai vos trésors avec le plus grand soin et le plus grand respect. Les bibliothécaires ne s'apercevront même pas de mon passage.

Les cloches de Saint-Pierre se mirent à sonner à la volée.

Le camerlingue regarda une dernière fois sa montre.

— Je dois y aller.

Il s'arrêta un bref instant et planta ses yeux dans ceux de Langdon.

« Je vais faire envoyer un garde suisse aux Archives, vous le trouverez là-bas. Je vous donne ma confiance, monsieur Langdon. Allez. »

Langdon resta sans voix.

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Le prêtre semblait avoir recouvré un sang-froid surnaturel.

Il tendit la main vers Langdon et lui pressa l'épaule avec une force étonnante.

— Je veux que vous trouviez ce que vous cherchez, monsieur Langdon. Et que vous le trouviez vite!

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46

Les Archives secrètes du Vatican se trouvent au fond du jardin des Borgia, au sommet de la colline sur laquelle ouvre la porte Santa Anna. Elles renferment plus de vingt mille volumes et, notamment, selon la rumeur, les carnets manquants de Leonardo da Vinci, ainsi que certains livres censurés de la Bible.

Langdon remonta d'un pas rapide la Via della Fondamenta, ayant peine à croire qu'il allait enfin entrer dans ce sanctuaire inviolable. Vittoria adaptait sans effort son pas au sien. Sa chevelure aux arômes d'amande ondulait dans le vent, faisant frémir les narines de Langdon. Ce dernier étouffa la griserie légère qui l'envahissait. Ce n'était vraiment pas le moment.

Vittoria se tourna vers lui.

— Allez-vous enfin m'expliquer ce que nous cherchons?

— Un petit ouvrage écrit par un certain Galilée.

Elle sembla surprise.

— Rien que ça. . Et que contient-il d'intéressant?

— Il est censé renfermer le signe, il segno.

— Le signe?

— Signe, indice, signal, il y a plusieurs traductions.

— Et un signe vers quoi?

Langdon accéléra l'allure.

— Un lieu secret, répondit-il. Pour se protéger des espions du Vatican, les Illuminati ont choisi un lieu de rendez-vous ultrasecret, ici même, à Rome. Ils l'ont appelé l'« Église de l'Illumination ».

— Plutôt audacieux de baptiser Église un repaire satanique!

Langdon secoua la tête.

— Les Illuminati de Galilée n'avaient rien de satanique.

C'étaient des scientifiques qui vénéraient la connaissance. Ce lieu de rendez-vous fut simplement choisi pour qu'ils puissent se retrouver et discuter de sujets interdits par le Vatican en toute sécurité. Mais voilà: si nous savons que ce repaire secret a existé, personne ne l'a encore localisé.

— On dirait que les Illuminati savent garder un secret!

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— Absolument. En fait, ils n'ont jamais révélé le lieu de leurs réunions à personne en dehors de la confrérie. Ce secret les a protégés, mais il représentait un frein au recrutement de nouveaux membres.

— Pour croître, ils devaient se faire connaître, renchérit Vittoria dont le corps et l'esprit avançaient au même pas.

— Exactement. La confrérie de Galilée commença à faire parler d'elle vers 1630 et des scientifiques du monde entier entreprirent un pèlerinage secret à Rome dans l'espoir d'y être admis... et, qui sait, d'écouter un exposé du maître, ou d'avoir la chance de regarder dans sa lunette astronomique.

Malheureusement, à cause de cette obsession du secret, les savants en visite dans la capitale ne savaient pas où se rendre pour rencontrer leurs pairs, ni même à qui ils pouvaient s'adresser en toute confiance. Les Illuminati voulaient élargir leur audience, mais sans prendre le moindre risque.

Vittoria fronça les sourcils.

— Voilà une situazione senza soluzione.

— Ou une impasse si vous préférez.

— Alors qu'ont-ils décidé?

— C'étaient des scientifiques. Ils ont examiné le problème sur toutes les coutures et ils ont trouvé une solution. Brillante, d'ailleurs. Les Illuminati ont créé une sorte de carte ingénieuse qui devait guider les scientifiques vers leur sanctuaire.

L'air soudain sceptique, Vittoria ralentit le pas.

— Une carte? Ce n'est pas le moyen le plus sûr. Et si elle était tombée en de mauvaises mains...

— Impossible, fit Langdon. Et pour une bonne raison: il n'en existait aucun exemplaire. Ce n'était pas une carte sur papier. Elle était trop grande pour cela. C'était une sorte de jeu de piste dans la ville.

Vittoria ralentit encore.

— Vous voulez dire qu'ils peignaient des flèches sur les trottoirs?

— En quelque sorte, mais leurs « flèches » étaient d'une grande subtilité. . La carte en question se composait d'une série de «

jalons » symboliques soigneusement dissimulés dans des lieux publics. Chacun de ses jalons menait au suivant et ainsi de suite jusqu'au repaire des Illuminati.

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— On dirait une chasse au trésor..., commenta Vittoria en lui lançant un regard intrigué.

Langdon sourit.

— Après tout c'était bien une chasse au trésor, non? Les Illuminati ont d'ailleurs nommé leur chaîne de jalons « la Voie de l'Illumination » et quiconque voulait rejoindre la confrérie devait la suivre jusqu'au bout. Une sorte de test.

— Mais qu'est-ce qui empêchait la police du Vatican de remonter la même chaîne pour retrouver les Illuminati? objecta Vittoria.

— Pas si simple. La Voie de l'Illumination était dissimulée.

Seuls des êtres au profil bien particulier étaient capables d'interpréter les signes placés sur leur chemin et d'en déduire l'emplacement de l'Église de la secte. Les Illuminati avaient conçu ce jeu de piste comme un rite initiatique, qui ne visait pas seulement à garantir leur sécurité mais se voulait aussi un instrument de sélection éliminant les médiocres pour réserver l'accès de leur repaire aux plus intelligents.

— Je ne marche pas! Au XVIIe siècle le niveau scientifique de certains hommes d'Église n'avait rien à envier à celui des plus grands savants. Si les symboles dont vous parlez étaient disposés dans des lieux publics, il existait forcément quelques ecclésiastiques capables de les interpréter.

— Bien sûr, acquiesça Langdon. Ils l'auraient pu s'ils avaient eu connaissance des signes en question. Mais ils n'en furent jamais informés. Et ils ne les remarquèrent jamais parce que les Illuminati les avaient conçus de telle façon que les ecclésiastiques ne puissent jamais soupçonner leur vrai rôle. Ils ont utilisé à cette fin la méthode de la « dissimulation », dans le sens que les symbologues donnent à ce terme.