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Claude Bourguignon, ingénieur agronome, ancien collaborateur de l’INRA, connu pour ses études sur la microbiologie des sols et fondateur du LAMS (Laboratoire d’analyse microbiologique des sols) et sa femme Lydia parcourent la planète et auscultent les terres depuis plusieurs années. Aujourd’hui, ils estiment qu’il ne reste plus que 1 % des sols cultivés « en bon état ». « Depuis qu’ils cultivent la terre, les hommes ont causé la désertification de 2 milliards d’hectares, dont 1 milliard au seul XXe siècle, à cause des méthodes de l’agriculture intensive et de l’utilisation à outrance des engrais et des produits dits phytosanitaires. » Claude Bourguignon affirme qu’il est encore temps d’agir, en passant progressivement à l’agriculture biologique. À condition, préalablement, de restaurer les sols en abandonnant le labour, en instaurant les rotations de cultures et en implantant systématiquement des « semis sous couverture » destinés à étouffer les mauvaises herbes, à protéger de l’érosion et à nourrir la terre. Ce n’est qu’à ce prix, pour lui, que la terre pourra recommencer à respirer et à se régénérer.

Si vous voulez faire le tri entre le bon et le mauvais bio, il faut savoir qu’en France on importe des produits bio depuis 2009, en grande partie, de l’Italie, de l’Espagne et du Maroc. Certes, il existe une réglementation européenne et des organismes certificateurs. Pour obtenir une autorisation d’exportation, il faut montrer patte blanche, mais sommes-nous protégés des fraudes possibles ? Quand on sait qu’en France un producteur bio est contrôlé en moyenne 1,6 fois par an et que les contrôles se font seulement à l’improviste dans 33 % des cas. Nous avons de la chance, en Espagne, seulement 17 % sont contrôlés, et 3 % en Roumanie. Selon le dernier contrôle de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), en 2010 — cet organisme a été décapité malheureusement depuis cette date —, 9,2 % des poires, pommes, raisins et tomates bio contiennent des résidus de pesticides. C’est peu, comparé au 78 % des fruits et légumes non bio, mais pour les pesticides, la France est championne, notamment pour le raisin, les baies (fraises, framboises, myrtilles), la laitue et le poivron.

Il y a effectivement quelques signes officiels de qualité, qui ont été décernés surtout à des productions locales : reines-claudes, mirabelles de Lorraine, pêches et nectarines de la Drôme. Pourquoi se contenter d’un Label rouge alors que le mieux serait de faire des efforts supplémentaires pour obtenir une AOC qui impose un regroupement des producteurs volontaristes, des exigences d’exemplarité. Les producteurs de fromages s’y maintiennent coûte que coûte, pourquoi pas ceux des fruits et des légumes ? Un effort, s’il vous plaît.

Difficile d’échapper aux mailles de plus en plus serrées des productivistes. Ne jugez pas les fruits sur leur apparence. Renouez le dialogue, parlez avec votre maraîcher, demandez l’origine des produits, encouragez les petits producteurs locaux lors des ventes directes en hausse constante, privilégiez les fruits et les légumes de proximité, synonymes de qualité, présentant peu d’empreinte écologique de transport, des fruits et des légumes de saison qui sont arrivés à maturité sur place et sans avoir subi des centaines de kilomètres dans des cageots.

Pensez à vos enfants. L’étude publiée par l’ASEF (Association santé environnement France) devrait vous alerter, un enfant sur cinq est touché par un problème de surpoids ; que les bourrelets des petits Américains et Anglais ne nous fassent pas oublier ceux des petits Français. Ces pauvres gosses ne savent pas ce qu’ils mangent. Ils ont du mal à citer une dizaine de fruits et légumes, « un écolier sur trois ne sait pas identifier un poireau, une figue, un artichaut ». Quant aux produits transformés, ils ignorent que les frites s’obtiennent à partir de pommes de terre et que les betteraves ne poussent pas en petits cubes directement dans des sachets en plastique. Si ces informations ne vous paniquent pas…

Il serait peut-être urgent de prendre vos responsabilités.

Chapitre 6

LES CONSERVES ET LES SURGELÉS

Les conserves

La vox populi prétend que les conserves sont des produits vieillissants, dépassés, or leur volume de vente n’a jamais baissé, il y aurait même des frémissements d’augmentation.

Le mot « conserve » apparaît en 1359, dans un cadre alimentaire. La plus ancienne méthode de conservation était la dessiccation au soleil, autrement dit, la suppression de l’humidité des aliments. Historiquement, il se pratiquait cinq méthodes de conservation, elles ont chacune fait leurs preuves et sont encore toutes en exploitation.

— Le séchage : encore utilisé pour les poissons et certains fruits secs. Techniquement, on est passé du plein air à l’étuve.

— La salaison : concerne la viande de porc, quelquefois le bœuf, occasionnellement le poisson.

— Le boucanage ou fumage : toujours et encore artisanal, dans une cheminée.

— La graisse et l’huile : évite l’oxydation.

— Les antiseptiques : sucres, alcool et vinaigre.

Ces procédés modifient sensiblement le goût initial du produit.

Dans l’esprit de Nicolas Appert, d’abord cuisinier puis confiseur, a germé l’idée suivante : conserver des aliments dans le temps, sans les altérer, grâce à une cuisson à plus de 100 °C. Il a commencé à travailler sur des bocaux en verre, déjà largement répandus en 1795, et sur des flacons de champagne aux goulots élargis. Après de très nombreux essais infructueux, il maîtrise enfin sa méthode et concentre ses efforts sur les petits pois, les haricots et le bouillon. Très vite, il utilise des boîtes en fer-blanc. Il passe ensuite aux fruits, à la viande et aux plats cuisinés. En 1810, il publie le premier de ses trois livres, L’art de conserver pendant plusieurs années toutes les substances animales et végétales, mais il ne fit jamais breveter ses recherches. Son procédé est pillé par le monde entier. Il meurt seul, le 1er juin 1841, à l’âge de 91 ans. Onze ans plus tard, son neveu dépose un brevet permettant une stérilisation sécurisée des produits à plus de 100 °C, une sorte de grosse Cocotte-Minute, marquant ainsi le début de la conservation industrielle.

Si le succès de la conserve représente une véritable révolution, c’est que celle-ci a très vite permis la conserve artisanale, qui rendait possible la consommation de fruits et de légumes toute l’année, sans avoir à subir les aléas climatiques. N’oublions pas qu’à cette époque une part essentielle de la nutrition des familles était fournie par les récoltes que celles-ci pouvaient espérer.

Chaque année sortent des entreprises hexagonales plus de 4 milliards de boîtes. Peut-on encore prétendre que la conserve est ringarde, démodée ? C’est oublier un peu vite l’histoire.

Essayons de résumer les différents procédés de conservation modernes :

— L’appertisation : méthode qui consiste à chauffer entre 100 et 150 °C un aliment enfermé dans un bocal ou une boîte métallique. Son but est d’éliminer les bactéries, les levures et les enzymes qui pourraient altérer l’aliment.

— La semi-conserve : destinée à une conservation courte, chauffée à 65 et 75 °C, se conserve au rayon frais. Elle a l’avantage de garder les qualités organoleptiques.

— La technique UHT (ultra haute température) : les produits à conserver sont chauffés quelques secondes seulement à une température de 135 °C.

— La pasteurisation : déclinaison de l’appertisation, requiert des températures inférieures, entre 65 et 100 °C.

— Le sous-vide : consiste à soustraire les aliments de l’oxygène.