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-   Nous allons maintenant envahir et conquérir toutes ces terres qui nous sont promises ! ajoute-t-il, déclenchant le délire dans l'assemblée.

Là, ils ont compris et moustiks et séides trépignent d'excitation devant l'envergure de la mission qui leur est confiée. La mission de Mino est bien moins ambitieuse. Il doit simplement arriver à lire l'heure sur la montre que lui a offerte Arthur. Il prend son élan et tente un deuxième essai.

-   Excusez-moi, c'est encore moi ! dit-il poliment au séide. Je vous l'offre ! ajoute-t-il en lui tendant joyeusement la montre.

Abruti comme il est, il y a peu de chances qu'il sache ce que « cadeau » veut dire.

Mino ne lui laisse pas le temps de penser, ça risque de prendre des heures, et il lui passe le bracelet autour du poignet.

-   Voilà ! Ça vous va très bien ! lui dit-il, avant de le quitter. Le séide regarde un instant sa montre, comme un ananas regarderait la télé.

-   Hep ? ! lui fait le séide, un peu perplexe.

Mino a déjà fait dix pas. Il s'arrête et se retourne.

-   Qu'est-ce que tu veux que j'en fasse ? Je ne sais pas lire ! grogne le séide, aimable comme une plaque en marbre.

-   C'est pas grave ! Quand vous voulez savoir l'heure, il vous suffit de lever le bras en direction de quelqu'un qui sait lire. Moi, par exemple. Levez le bras, vous allez voir, c'est facile. Le séide, plus bête qu'un poisson qui n'a jamais vu d'hameçon, écoute Mino et lève les deux bras. La petite taupe peut enfin lire l'heure sur la montre à une distance qui lui convient.

-   Mon Dieu ! Midi cinq ! hurle-t-il, affolé.

Mino part en courant vers ses manettes, laissant le séide planté comme un épouvantail.

En surface, Arthur attend toujours que la petite taupe se manifeste.

Mais rien ne se passe et Arthur commence à désespérer.

Ce n'est pas le moment, Mino fait de son mieux.

L'animal fait ses calculs à toute vitesse et vous n'avez pas idée de la rapidité à laquelle peut calculer une taupe.

Il tire sur plusieurs manettes, ce qui modifie immédiatement la position de plusieurs rubis. Du coup la lumière, qui illuminait la pyramide, disparaît peu à peu, sans que personne ne s'en rende vraiment compte. Tout ce petit monde est trop absorbé par le discours de Maltazard qui se termine par ces mots :

-  ... Que la fête commence ! !

L'armée hurle de joie, comme jamais auparavant.

Chacun jette son arme en l'air avec un ensemble parfait et, pendant quelques secondes, le spectacle a fière allure. La fin du numéro est moins au point. Les armes retombent un peu n'importe où et surtout n'importe comment. Les blessés se comptent aussitôt par dizaines.

Maltazard lève les yeux au ciel, atterré par la bêtise de son armée.

Mino profite du chaos provisoire pour actionner une dernière manette.

D'un seul coup, la lumière est récupérée et se transforme en un magnifique faisceau rouge qui part du sommet de la pyramide et monte directement vers l'extérieur. L'assistance pousse un « Oooohhh ! » admiratif et général. On pense évidemment que ce nouveau jeu de lumière fait partie du spectacle.

-  Oh ! La belle rouge ! entend-on, ici et là.

Mino tourne une manette et le faisceau s'intensifie. Sa puissance est phénoménale et fend, comme un éclair, le ciel de Nécropolis.

-   C'est magnifique, divin souverain ! se réjouit Darkos en applaudissant doucement, afin de ne pas couvrir la clameur qui idolâtre son père.

Maltazard n'y est bien sûr pour rien, mais il ne sait pas comment l'avouer.

Au milieu du jardin, un magnifique rayon rouge sort du sol et monte pratiquement jusqu'au ciel.

Arthur hurle de joie et se jette à terre pour regarder à travers le trou.

Alfred, qui a réussi à récupérer sa balle, s'approche à son tour, attiré par cette appétissante lumière qui ressemble à un gigantesque sucre d'orge.

Arthur plonge la main dans le trou, mais il n'a malheureusement pas le bras assez long.

Mino regarde en l'air l'ombre d'Arthur qui se dessine dans l'ouverture.

Maltazard aussi a vu ces ombres et même s'il n'a pas vraiment compris ce qui se trame, il sent tout de même la menace qui rôde.

-  Il va nous faire repérer cet imbécile ! Arrêtez-le immédiatement ! ! hurle-t-il en direction des gardes qui stationnent autour de la coupole.

Arthur se gratte la tête. La sueur perle à nouveau sur son front.

-   Il faut trouver une idée, Alfred ! Là, maintenant, tout de suite ! dit l'enfant en regardant son chien.

Alfred dresse un peu les oreilles, comme s'il voulait qu'on lui répète la question.

Arthur soupire. Il n'y a rien à tirer de ce chien stupide qui ne sait que baver sur la balle qu'il tient dans la gueule. Arthur marque un temps. Un détail. Une idée.

-  La balle ! Mais bien sûr !

Il crie de bonheur et tend le bras vers son chien.

-  Tu me sauves la vie, Alfred ! Donne-moi ta balle !

Et c'est, avec grand plaisir que le chien repart en courant au bout du jardin, persuadé que le sourire d'Arthur indiquait la reprise du jeu.

Arthur, fou de rage, part en courant derrière son chien, mais à deux pattes contre quatre, il n'est pas près de le rattraper.

Pendant ce temps, les gardes se sont regroupés et marchent vers Mino, leurs lances en avant.

Mino tremble de peur et cherche désespérément une arme pour se défendre.

-   Stop ! Hurle Arthur, comme jamais il n'a hurlé de sa vie. Il s'en est fait mal aux poumons. Ce n'est peut-être pas le cri qui tue, mais tout au moins il paralyse : Alfred s'est arrêté net, tétanisé par ce cri effroyable qui semble venir des entrailles de son maître, comme si un monstre vivait tapi à l'intérieur de lui.

Alfred desserre les mâchoires, la balle en profite pour tomber à terre et Arthur en profite pour la ramasser.

-  Merci ! lui dit l'enfant, à nouveau gentil, en lui frottant la tête.

Voilà un tour de passe-passe qu'Alfred n'est pas près d'oublier.

Chapitre 15

Mino n'est pas près non plus d'oublier ce jour qui s'annonce comme son dernier.

Les gardes sont face à lui et Mino, en dernier recours, se met en position de self-défense, Bruce Lee en version taupe.

-    Attention ! prévient Mino, les mains en avant, je peux devenir méchant !

Méchant est un mot qui résonne bien chez Maltazard. Le souverain, excédé, sort de son fourreau l'épée magique de Sélénia qu'il s'est appropriée.

Il brandit l'épée en faisant un large geste et l'envoie de toutes ses forces en direction de Mino.

Si la taupe a des problèmes pour voir de près, elle voit, en revanche, très bien de loin et Mino distingue parfaitement la fusée qui est en train de lui foncer dessus.

La petite taupe se décale légèrement vers la droite. D'après ses calculs, cela devrait suffire. La lame vient se planter bruyamment à droite, à quelques centimètres du visage décomposé de Mino. Comme quoi, même une taupe peut se tromper dans ses calculs.

Maltazard est furieux d'avoir raté son coup, surtout devant son fils.

Plutôt que d'attendre de trouver une explication logique à son échec, le souverain préfère faire diversion.

-    Emparez-vous de lui ! hurle-t-il en direction des gardes qui tardent un peu.

-  Je vous aurai prévenus ! Je vais me fâcher ! ! insiste Mino, en reculant doucement.

Les séides ricanent et n'en croient rien. Dommage pour eux. Une balle de tennis, deux cent fois plus grande qu'eux, vient de s'engouffrer dans le tuyau qui les surplombe. L'objet, gros comme une météorite, cache la lumière de la surface et les séides lèvent les yeux pour regarder cette ombre qui descend sur eux. Ça ne dure pas longtemps. À peine une seconde. Ils se prennent la balle en pleine tronche.