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- Si tu es bien sage et que tu m'écoutes... Je plaiderai en ta faveur.

Arthur l'embrasse dans le cou.

- Merci Mamie. Je savais que je pouvais compter sur toi ! La vieille femme se défait de cette adorable emprise et se lève.

- Maintenant, on dort ! dit-elle avec fermeté.

Arthur se retourne d'un seul coup et se jette sur son oreiller, prétendant déjà dormir.

La Mamie l'embrasse affectueusement, récupère le livre et éteint la lumière, laissant Arthur dans les bras de Morphée et probablement aussi de Sélénia.

La grand-mère rentre à pas feutrés dans le bureau de son mari, évitant les lattes de parquet trop grinçantes. Elle range le précieux livre à sa place et s'attarde un moment sur le portrait de son mari.

Elle laisse échapper un soupir, immense dans le silence de la nuit. « Tu nous manques Archibald, finit-elle par avouer. Tu nous manques vraiment beaucoup. » Elle éteint la lumière et ferme la porte, à regret.

Chapitre 3

La porte du garage est tellement lourde à ouvrir qu'on dirait une porte de château, un pont-levis, et Arthur met toujours quelques secondes à s'en remettre. Puis il se jette à genoux et fait sortir son bolide du garage. Huit cents chevaux, dans trois centimètres de long. Il suffit d'avoir de l'imagination et Arthur n'en a jamais manqué. Il pose le doigt sur la voiture et la sort doucement, en l'accompagnant d'une série de grognements, cliquetis et autres rugissements dignes d'une Ferrari.

Arthur prête sa voix aux deux pilotes qui sont à bord et à leur chef qui les guide.

« Messieurs, je veux un rapport complet sur notre réseau mondial d'irrigation », dit-il d'une voix de haut-parleur.

- Bien chef ! reprend-il, à la place du pilote.

- Et faites attention à ce nouveau véhicule, il est super-puissant, ajoute le haut-parleur.

- OK chef ! Ne vous inquiétez pas, assure le pilote avant de quitter sa place de parking et de s'enfoncer dans l'herbe du jardin.

La Mamie pousse la porte d'entrée d'un coup de postérieur. Elle a un grand baquet plein de linge ruisselant quelle s'empresse d'apporter au fond du jardin, sous les fils à linge. Arthur pousse lentement sa voiture qui descend dans la rigole creusée à même la terre et remonte l'impressionnant réseau d'irrigation.

« Ici voiture patrouilleur à central. Tout va bien pour le moment », indique le pilote.

Mais la patrouille a parlé trop vite. Face à eux, une énorme balle de tennis (toute neuve) bouche entièrement le passage.

- Oh mon Dieu ! Droit devant ! C'est une catastrophe !

- Que se passe-t-il patrouilleur ?! Répondez ! s'inquiète le chef, aveugle dans son bureau.

- Un éboulement ! Non, ce n'est pas un éboulement ! C'est un piège ! Le yéti des plaines !

Alfred vient de coller sa truffe juste derrière la balle de tennis, et remue la queue tant qu'il peut.

- Central à patrouilleur. Faites attention à sa queue, c'est une arme redoutable ! prévient le haut-parleur.

- Vous inquiétez pas, chef. Il a l'air calme. On va en profiter pour dégager la voie. Envoyez la grue !

Aussitôt le bras d'Arthur se transforme en bras de grue mécanique, avec tous les bruits en option. Après quelques manœuvres, la main-pince d'Arthur parvient à attraper la balle.

- Éjection ! crie le pilote.

Le bras d'Arthur se détend et envoie la balle le plus loin possible.

Évidemment, le yéti des plaines court derrière.

- La voie est libre et nous sommes débarrassés du yéti ! annonce fièrement le pilote.

- Bien joué, patrouilleur ! concède le haut-parleur. Poursuivez votre mission.

La Mamie poursuit la sienne et attrape le deuxième fil à linge pour y étendre maintenant les draps. Au loin, sur la crête des collines, un petit nuage de poussière laisse présager l'arrivée d'une voiture.

Ce n'est ni le jour du facteur, ni celui du laitier. « Qu'est-ce donc encore ? », s'inquiète la grand-mère. Arthur est toujours en patrouille, quand un nouveau drame intervient.

Le yéti est revenu. Il a ses pattes de chaque côté de la tranchée, la balle dans la gueule, prêt à lâcher. Dans la voiture, c'est l'affolement.

« Oh mon Dieu ! Nous sommes perdus ! », s'écrie le copilote.

- Jamais ! hurle le pilote avec la voix d'Arthur qui la lui a prêtée pour l'héroïque circonstance.

Arthur remonte le petit ressort à toute allure.

Le yéti des plaines lâche sa bombe qui tombe dans la tranchée.

- Dépêchez-vous capitaine, supplie son copilote, ou nous allons tous mourir !

La balle roule dans la tranchée. On se croirait dans Indiana Jones, en miniature.

Arthur pose enfin la voiture au sol en direction de la fuite. « Banzaï ! hurle-t-il, même si l'expression japonaise n'est pas vraiment appropriée à la situation.

La voiture bondit en avant, poussée par le souffle de la balle qui allait l'écraser.

Le bolide sillonne dans son canyon, comme un avion de chasse.

Le pilote n'en revient pas lui-même. La boule est distancée, mais malheureusement, la voiture arrive au bout de la tranchée qui apparaît comme un mur infranchissable.

- Nous sommes perdus ! pleurniche encore le copilote.

- Cramponnez-vous ! balance Arthur, le courageux pilote. Le bolide arrive face au mur et le gravit presque à la verticale, avant de s'élever dans les airs et de retomber au sol dans une magnifique série de tête-à-queue. La voiture s'arrête.

La cascade était sublime, quasiment parfaite. Arthur est fier comme le paon qui a inventé la roue.

- Bien joué capitaine, lance le copilote, épuisé.

- C'est rien, mon p'tit ! reprend Arthur, en vieux routier. Une ombre gigantesque vient couvrir le petit bolide. Il s'agit d'un autre bolide beaucoup plus gros, celui de Davido.

La voiture vient s'arrêter au-dessus de celle d'Arthur, qui a poussé un cri de stupeur.

À travers le pare-brise, Davido semble heureux d'avoir fait peur à l'enfant.

Alfred-le-yéti revient avec sa balle, mais il sent que ce n'est pas le bon moment pour continuer à jouer. Il lâche doucement la balle, qui roule sur le bout de bitume, passe sous la vraie voiture et vient se placer sous le pied de Davido qui s'apprêtait à descendre.

Le résultat ne se fait pas attendre. Davido prend appui sur la balle, part en vol plané et se retrouve les quatre fers en l'air. Charlot n'aurait pas fait mieux. Arthur est à terre aussi, mais de rire. « Patrouilleur à central ! Le yéti vient de faire une nouvelle victime ! », annonce le pilote.

Alfred aboie et remue la queue. C'est comme ça qu'on applaudit chez les yétis.

Davido se relève tant bien que mal et s'époussette comme il peut.

De rage, il saisit la balle et l'envoie le plus loin possible. Un craquement déchire le silence et en même temps, la couture sous le bras de sa veste.

La balle atterrit dans le réservoir d'eau, haut de plusieurs mètres.

Furieux pour sa veste mais satisfait de son lancer, Davido se frotte les mains.

« À vous de jouer, central ! », lance-t-il au gamin d'un air vengeur.

Arthur encaisse, sans rien dire. La dignité est souvent muette. Davido tourne les talons et se dirige vers le fond du jardin. La Mamie commence à s'inquiéter des aboiements répétés du chien. Elle remonte le long de sa corde à linge et fait coulisser un drap, pour prendre un raccourci. Elle tombe nez à nez avec Davido, ce qui la fait sursauter. « Vous m'avez fait peur ! », affirme la grand-mère.

- J'en suis désolé, répond Davido, mentant ouvertement. Ménage de printemps ? Besoin d'un coup de main ?