Выбрать главу

Pour t’en revenir, Lucette, cette minette plantureuse, avec accompagnement digital, elle en conçoit une félicité démesurée. Je la laisse s’exprimer à gogo ! J’adore quand elle part en voyage toute seule, ma petite fée. C’est stimulant. Et puis, quelque part, pour être tout à fait sincère, ça flatte ma mâlerie. T’es fiérot de la voir dégager du minouche sous ton impulsion irrésistible, alors que toi, tu gardes tes atouts en main pour la seconde manche. Sentiment puéril de supériorité, nous qui leur sommes si toujours inférieurs, les garces !

Là, elle les largue, les amarres, Mme Clabote. C’est le tout beau lâché de ballons. Le « Vrouhaaa » d’allégresse omnipotent. (Je sais pas s’il rime à grand-chose ce mot omnipotent, à cet endroit, mais je m’en torche. Comme l’écrit à mon sujet Hubert Montheilet, je jouis d’une extraordinaire impunité. N’importe quel confrère huppé écrit le centième de mes conneries, on lui tranche les couilles. Moi, on me crie « Encore » ! Ils veulent voir jusqu’où je vais aller. Attendez, les mecs, c’est pas fini !)

Epuisée par l’intensité du plaisir, elle glisse le long de la porte et choit, en biais, sur un lit de varech-gratte-cul.

Je m’allonge à son côté, glisse mon bras sous sa nuque. J’attends qu’elle se retrouve un peu avant de lui interpréter la gigue sauvage des lanciers. Qu’elle se laisse emplâtrer en connaissance de cause, Lucette, en reconnaissance de mes choses !

« Ainsi donc, me dis-je, tu croyais l’avoir perdue en sautant Ellena devant elle et tu n’as fait qu’allumer son sang ! Pauvre gueux qui se targue de bien connaître les femmes et qui se laisse toujours surprendre. Grand bêta (j’ai pas dit Gambetta) que tu seras jusqu’à ta fin ! »

Je lui donne d’ineffables baisers : au cou, au menton, sur les lèvres. Elle roucoule d’un nouveau bonheur, plus tendre, plus suave que le précédent.

— Chéri, fait-elle, tu es l’être le plus merveilleux que j’aie jamais rencontré.

Je voudrais lui rendre la pareille, mais ça ferait cheap.

Une gonzesse qui te louange d’envergure, c’est même pas la peine de prendre l’air modeste, tu la décevrais. Si elle te veut suprême, sois-le et ferme ta gueule. Elle te voit Prince Charmant ? Alors, dis-toi que tu l’es, quand bien même t’as conscience de figurer parmi les lavedus de première ! En l’occurrence, je prends une expression neutre et lointaine. Le côté : « Ah ! tu l’as remarqué ? J’ai pourtant rien fait pour en installer ! »

J’aimerais lui parler de ma prestation d’hier avec la Ritale, pas laisser de relents entre nous (la chanson de relent). Mais c’est délicat, je risque de rompre le charme, non ? C’est elle qui y vient. Elle murmure :

— Quand je t’ai vu faire l’amour à cette femme, sur le lit de la morte, j’ai trouvé cela tellement beau qu’un désir d’une violence inouïe s’est emparé de mes sens. J’aurais voulu pomper ta belle bite, là, devant mon époux, et te sucer jusqu’à ce que tu imploses !

Elle cause bien. C’est bath la culture.

— Il n’aurait pas apprécié, pronostiqué-je.

Elle a un bondissement félin.

— Justement, cela l’aurait humilié, le salaud !

Du coup, j’en reste comme deux ronds aux flans brunis[5]. La réalité me pète aux yeux : elle hait mon copain Alexis, Lucette.

Je lui en fais la remarque. Elle véhémente à plein régime :

— C’est un être abject sous ses airs de gros gentil. Ce con de rugbyman a tellement pris de gnons dans la tête que cela la lui a fêlée. Un pervers, chéri ! Ce qui arrive à l’institut est dirigé contre lui, sois-en certain. Il fait l’unanimité : tout le monde le hait !

— Que me bayes-tu là, mon amour ?

— La vérité ! C’est un jouisseur, un pourceau, un sale bonhomme. Il saute ses collaboratrices et les tourmente d’une façon sadique. Il houspille le personnel, paie peu et mal. Il exploite ce pays sans gros débouchés et rogne sur les salaires, sur les heures de prestation. L’air bonhomme, avec ça ! Convivial. Faisant mine de rendre service à ceux qui peuvent aider à son développement, mais étranglant les petits.

D’écouter cela, je pantoise. Alex, le bon pote d’autrefois, avec lequel j’ai tant rigolé ! Alex, un tyranno (de Bergerac, son pays de naissance) !

Elle continue sur sa vindicte :

— Il m’a épousée pour mon argent !

— Ne dis pas cela, interrompé-je, tu es la plus ravissante femme que j’aie rencontrée. En te voyant, j’ai cru mourir de commotion ! Plus belle que toi, y a que toi en tenue de soirée !

Elle se blottit contre moi, sa main furète à la recherche de mon renflement, le trouve et elle s’extasie d’un aussi bath volume sous mon futal de flanelle grise.

Mais comme sa rogne perdure, elle repart bientôt dans les imprécations :

— Il m’a pris un maximum d’argent pour fonder cet établissement. Nous avons créé une société dont il détient toutes les actions, si bien que je me trouve proprement spoliée. Il lui arrive de me frapper quand je regimbe, et crois-moi, un talonneur, ça cogne dur. Regarde !

Elle soulève les cheveux masquant sa tempe gauche et me montre un cerne bleu.

— Voilà qui date de quatre jours. Monsieur avait ses humeurs à cause de l’électrocution collective !

— Je suis abasourdi, soupiré-je. Pourquoi ne le quittes-tu pas si les choses sont ce que tu dis ?

— Parce qu’il me terrorise. Si je partais, il me rejoindrait et me tuerait, il en est capable !

Et moi, tu sais ce que je m’entends lui proposer ?

— Pas si tu pars avec moi !

Ah ! non, je te jure… Des comme celles-là, y a que ton Sana pour en balancer. Le côté superman ! Ça me rappelle un book ancien que me lisait ma grand-mère quand j’étais moujingue. Ça commençait dans un bal huppé. Une jeune fille de la haute que son irascible fiancé tourmentait. Un jeune officier intervient, calotte le malotru, et s’inclinant devant la frêle héroïque qu’il ne connaît ni des lèvres ni du paf, lui dit : « Louis-Hubert de la Cloche de Bois, acceptez-vous de m’épouser, mademoiselle ? » Tel que. J’en mouillais déjà dans ma culotte Petit Bateau ! La jeune évanescente acceptait, rouge d’émotion. Ils se mariaient au pas de charge et, ensuite, il leur arrivait une chiée de turbins dont ils triomphaient, bien sûr. En somme, ce roman débutait comme finissaient les autres : par le happy. On gardait la cagate pour après ! Ma vie, quoi !

Et je te reprends ma réflexion : « Pas si tu pars avec moi ! » Oh ! dis donc, où ça va, ça ? Une dame, inépuisablement belle, certes, mais à qui j’ai seulement fait une minette express dans une cabane écroulée ! La femme d’un pote ! Déjà que je le trompe en dégustant sa gerce ! L’embarquer ? Pour l’emporter où cela ? Pas chez ma Féloche en tout cas. Elle en pousserait une tête, ma maman, si elle me voyait installer une dame mariée au château ! Avec elle, Marie-Marie, d’accord ; ou à la rigueur une jeune fille comme il faut ! Mais la polka d’un aminche auquel je fais le pire des galoups, alors là, elle l’aurait saumâtre, ma vieille dearlinge.

— C’est vrai, tu m’emmènerais ? chuchote-t-elle tout bas.

— Il me semble.

Elle se met à sangloter convulsivement (dans les livres, l’héroïne ne sanglote jamais autrement que « convulsivement », sinon ça fait pas vrai).

Peut-être que je devrais la fourrer princesse, à présent, qu’en dis-tu ? Ma main se glisse dans son entre-deux Renaissance. La voie sur berges est libre. J’installe de mon mieux Lucette sur le lit de varech. Etalant son ciré sous ses noix pour lui éviter des picotements, voire des brindilles fourvoyeuses dans la bagouse à cheveux ! Elle se laisse manœuvrer avec une docilité qui confine à l’inertie.

вернуться

5

On dit cela en numismatique.

San-A.