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Xin hocha la tête. Il avait réfléchi un peu à la question. Très vraisemblablement, un conflit mondial suicidaire serait déclenché par la situation de crise actuelle au pôle sud d’Arachnia. Une fois arrivés, ils seraient en position au-dessus de ce site toutes les cinq mille trois cents secondes, avec une couverture quasi permanente assurée par des véhicules plus petits. Tomas Nau avait déjà évoqué les lasers. Quant aux nucléaires… peut-être qu’on pouvait bluffer avec.

Le sergent d’intendance continua sa tournée, lui signalant les limitations de chaque engin ressuscité. La plupart des armes étaient des charges creuses que les zombies d’Omo avaient converties en bombes fouisseuses grossières.

— Et nous aurons la plupart des zombies spécialistes des réseaux à bord de la Main. Ce sont eux qui fourniront les informations de contrôle de tir pour vos manœuvres ; selon les cibles, il se peut que nous devions procéder à des modifications d’orbite substantielles.

Omo parlait avec l’enthousiasme du spécialiste des munitions et mit rapidement Jau au pied du mur. Depuis un an, Jau observait les préparatifs avec une inquiétude croissante ; on ne pouvait lui cacher certains détails. Mais, pour chaque possibilité malhonnête, il y avait toujours une explication raisonnable. Il s’était farouchement accroché à ces « explications raisonnables ». Elles lui permettaient de conserver un minimum de respectabilité ; elles lui permettaient de rire avec Rita lorsqu’ils envisageaient leur avenir avec les Araignées et les enfants qu’ils auraient elle et lui.

L’horreur devait être visible sur le visage de Jau. Omo cessa d’étaler ses sinistres révélations et se tourna pour le regarder en face.

— Pourquoi ? demanda Jau.

— Pourquoi faut-il que je vous l’explique noir sur blanc ?

Omo braqua un doigt sur la poitrine de Jau, le forçant à lâcher la main courante et à s’aplatir contre la paroi. Il recommença. Son visage aux traits durs exprimait une furieuse indignation – la juste indignation de l’autorité émergente dans laquelle Jau avait grandi sur Balacrea.

— Ça ne devrait vraiment pas être nécessaire, pas vrai ? Mais vous êtes comme trop de membres de notre communauté. Vous avez pourri à l’intérieur, vous êtes devenu une sorte de Fourgueur. Nous pouvons laisser les autres se négliger un peu plus longtemps, mais quand la Main sera en orbite basse, nous aurons besoin de votre obéissance intelligente et instantanée.

Omo lui enfonça à nouveau l’index dans l’estomac.

— Vous comprenez, maintenant ?

— Euh… oui. Oui !

Oh, Rita ! Nous ferons toujours partie de l’Émergence.

Quarante-huit

Plus d’une centaine de zombies quittaient les Combles de Hammerfest. Le génie de l’organisation qu’était Trud Silipan avait prévu de les transférer en une seule fois. Tentant de gagner la cellule de Trixia, Ezr nageait à contre-courant d’une véritable marée humaine. Rassemblés en groupes de quatre et de cinq, les Focalisés étaient d’abord conduits dans les étroits tunnels capillaires qui desservaient leurs logettes, puis dans les coursives adventices et, finalement, dans les couloirs principaux. Les gardiens étaient prévenants, mais la manœuvre était difficile.

Ezr s’effaça latéralement dans une niche de service, comme rejeté par le flux principal. Devant lui défilaient des gens qu’il n’avait pas vus depuis des années. C’était des spécialistes Qeng Ho et trilandiens Focalisés juste après l’embuscade, exactement comme Trixia. Certains des gardiens étaient des amis des Focalisés qu’ils guidaient. Veille après Veille, ils étaient venus rendre visite à ces âmes perdues. Au début, il y en avait beaucoup. Mais les années avaient passé et l’espoir s’était presque éteint. Peut-être qu’un jour… Nau honorerait ses promesses de manumission collective. En attendant, les zombies semblaient insensibles à tout témoignage d’affection ; pour eux, une visite était tout au plus un sujet d’irritation. Rares étaient les fous qui avaient persisté des années dans leur démarche.

Ezr n’avait jamais vu autant de zombies en déplacement. L’aération des tunnels n’était pas aussi bonne que celle des alvéoles et l’odeur des corps mal lavés était omniprésente. Anne veillait à la santé du matériel humain, ce qui ne voulait pas dire que tout le monde était joli et propre.

Accroché à une sangle de maintien près d’un confluent, Bil Phuong dirigeait les gardiens de ses différentes équipes. La plupart des zombies d’une même équipe avaient une spécialité commune. Vinh surprit des bribes d’une conversation agitée. Se pouvait-il qu’ils s’intéressent au sort prévu pour le monde des Araignées ? Mais non, ce n’était qu’impatience, propos sans suite et charabia technique. Une femme âgée – une des spécialistes du piratage des protocoles réseau – bouscula son gardien et s’adressa même directement à lui :

— Quand, alors ? dit-elle d’une voix aiguë. Quand est-ce qu’on reprend le travail ?

L’un des membres de son équipe cria quelque chose comme : « Ouais, elle est pas fraîche, la face de cube ! » et s’attaqua au gardien par l’autre côté. Une fois déconnectés, les malheureux perdaient la tête. Toute l’équipe se mit à insulter le gardien. Le groupe formait comme le centre d’un caillot qui s’épaississait dans le flot humain. Ezr se rendit soudain compte qu’une sorte de révolte d’esclaves était vraiment possible… si on empêchait les esclaves de travailler ! L’Émergent qui avait la garde de l’équipe avait manifestement compris le danger. Il se dégagea et tira les cordons neutraliseurs des deux zombies les plus bruyants. Un spasme les traversa, puis ils retombèrent, inertes. Privées de centre, les récriminations de leurs camarades se résorbèrent dans une irascibilité diffuse.

Bil Phuong arriva pour calmer les derniers zombies combatifs.

— Encore deux que je vais être obligé de réaligner ! constata-t-il avec un froncement de sourcils à l’adresse du gardien.

— Va le dire à Trud.

Le gardien lui rendit son regard mauvais et essuya le sang sur sa joue. Empoignant les cordons, il évacua les zombies inconscients par-dessus la tête de leurs collègues. La foule se remit à circuler et, quelques secondes plus tard, Vinh put se catapulter sans encombre jusqu’au bout du couloir.

Les traducteurs n’embarquaient pas sur la Main invisible. Le calme aurait dû régner dans leur section des Combles. Mais lorsque Ezr arriva, il trouva les portes des cellules ouvertes et les traducteurs en train d’engorger les tunnels capillaires. Il se fraya un chemin tortueux au milieu des zombies qui trépignaient et vociféraient. Aucun signe de Trixia. Mais, quelques mètres plus loin, il tomba sur Rita Liao qui venait de la direction opposée.

— Rita ! Où sont les gardiens ?

Irritée, Liao leva les mains.

— Occupés ailleurs, évidemment ! Et voilà qu’un idiot a ouvert les portes des traducteurs !

Trud s’était véritablement surpassé, bien que, très vraisemblablement, il ne s’agisse là que d’une bavure secondaire. Ironiquement, les traducteurs – qui n’étaient pas censés aller où que ce soit – n’avaient pas eu besoin de se faire prier pour quitter leurs cellules, et demandaient bruyamment leur chemin.

— Nous voulons aller sur Arachnia !

— Nous voulons voir les choses de près !

Où était Trixia ? Ezr entendit encore crier au coin d’un couloir ascendant. Il suivit la dérivation et Trixia apparut avec le reste des traducteurs. Elle avait l’air salement désorientée ; elle n’était tout simplement pas habituée au monde extérieur à sa cellule. Mais elle sembla reconnaître Ezr.