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Fox-s’Amp houx !

Il n’a pas quarante ans

Mais aux âmes damnées

Le crime n’attend pas

Le nombre des années.

Et les « honnêtes gens » trouvent Bonaparte « jacobin à l’excès », condamnent le « général Vendémiaire ».

Mais Napoléon Bonaparte hausse les épaules :

« Je tiens au titre de général Vendémiaire, dit-il, ce sera dans l’avenir mon premier titre de gloire. »

Il est un homme nouveau, surgissant au moment même où les conventionnels, même s’ils ont par le décret des deux tiers trouvé le moyen de prolonger leur vie politique, sont las.

« Quatre années toujours sous le fer des assassins ont épuisé nos facultés physiques et morales », dit le Montagnard Dubreuil.

« Il est bien temps que nous quittions la place », ajoute Merlin de Thionville.

Ils se savent rejetés, haïs, méprisés parce que la disette et la misère écrasent toujours le peuple des faubourgs.

Le peuple ne rêve même plus au rétablissement du maximum du prix des denrées. Que peut-on contre l’alliance des plus riches ?

Car le peuple constate que les « ventres pourris » de la Convention sont indulgents pour les « ventres dorés » qui ont « fait » Vendémiaire.

Un rapport de police indique :

« Dans les faubourgs, on observe que les révoltés de prairial étaient moins coupables que ceux du 13 vendémiaire puisque les premiers ne demandaient que du pain et que ceux-ci voulaient attaquer et anéantir la représentation nationale, et cependant ceux de prairial ont éprouvé une bien plus grande sévérité… Les patriotes de prairial allaient par charretées à l’échafaud et les rebelles du 13 vendémiaire ont apitoyé la Convention nationale et courent en poste sur les grandes routes… »

Mais le temps des insurrections est passé.

« Les Tuileries sont changées en un camp de guerre. On n’y voit que tentes, canons, et soldats qui font bouillir la marmite au pied des arbres et des murs des terrasses.

« Les Champs-Élysées offrent le même aspect. Toutes les avenues des Tuileries et de la Convention sont hérissées de fer et de soldats.

« Jamais appareil de guerre ne fut plus menaçant et plus formidable dans cette cité des arts et des plaisirs. »

L’Américain Gouverneur Morris, qui voit ces soldats de toutes les armes éparpillés dans les places, les rues, sur les ponts, conclut : « Je continue à être persuadé que les représentants de cette nation tomberont sous la domination d’un despote unique. »

Et Ruault est plus précis :

« Le canon qui a foudroyé les royalistes et les mécontents a tué aussi l’amour de la République dans un grand nombre de cœurs. Cette façon d’assumer une République en dégoûte tous les hommes sensibles, tous les amis de l’humanité. Le gouvernement militaire établi depuis huit jours épouvante tous les bons esprits.

« La Convention vient de se mettre dans la dépendance de soldats qui créeront peut-être demain un Imperator, un César. »

Pourtant, dans sa dernière séance, le 4 brumaire an IV (26 octobre 1795), la Convention décrète une amnistie générale pour « tous les faits relatifs à la Révolution », exception faite des prêtres réfractaires, des émigrés, et des « vendémiairistes ».

On crie « Vive la République ! ».

Puis les conventionnels déclarent qu’« à dater du jour de la publication de la paix générale, la peine de mort sera abolie dans la République ».

Et la place de la Révolution – où la guillotine avait été si longtemps dressée, où le bourreau avait tant de fois montré des têtes tranchées à la foule et d’abord celle du roi –, cette place ensanglantée, s’appellerait désormais place de la Concorde.

SEPTIÈME PARTIE

Brumaire an TV – Ventôse an V

Octobre 1795 – Février 1797      

« L’audace est le plus beau calcul du génie »

 

« Il y a trois partis bien prononcés : les royalistes

avec les fanatiques, les anarchistes et les vrais républicains.

Le troisième a combattu et contenu

alternativement les deux autres. »

Un commissaire au Directoire

novembre 1795 (brumaire an IV)

« À la guerre, l’audace est le plus beau calcul du génie.

Il vaut mieux s’abandonner à sa destinée. »

Napoléon BONAPARTE, général en chef de l’armée d’Italie

avril 1796 (germinal an IV)

« La Révolution française monte au Capitole.

L’Europe est finie, elle l’a voulu…

Toute espérance est bannie de mon âme.

Baissez la toile, la pièce est jouée.

La royauté n’est qu’une vague réminiscence…

Je n’aperçois ni jour, ni moyens, ni issues. »

Mallet du PAN

1797 (an V)

23.

Le règne de la Concorde ?

Qui peut y croire ou l’espérer, en ce 12 brumaire an IV (3 novembre 1795), en voyant le cortège des cinq Directeurs ?

Ils ont été choisis par le Conseil des Anciens dans une liste de cinquante noms établie par le Conseil des Cinq-Cents.

Barras, La Révellière-Lépeaux, Reubell, Letourneur et Sieyès – ce dernier refusera de siéger et sera remplacé par Carnot – sont tous des régicides.

Ils se sont installés dans deux fiacres escortés par cent vingt dragons et autant de fantassins.

Le cortège parti des Tuileries se dirige vers le palais du Luxembourg, où le Directoire va siéger.

Les Directeurs n’ont pas encore revêtu leur manteau et leur habit d’apparat.

Ils ne sont élus que depuis quatre jours et, dans le palais du Luxembourg dont ils parcourent les pièces, ils constatent qu’il n’y a plus aucun meuble, que depuis le départ du comte de Provence tout est à l’abandon. Les « détrousseurs » de palais sont passés par là.

Les Directeurs s’installent dans une petite pièce au premier étage, autour d’une table branlante. Les sièges sont des chaises de paille, que le concierge a prêtées. Il monte des bûches. La cheminée fume, et l’humidité persiste.

Mais on peut rédiger un procès-verbal d’installation, procéder au choix des ministres, qui sont tous des modérés. Le ministre de l’intérieur serait même royaliste, comme bon nombre de députés, ce qui laisse présager des conflits entre les Directeurs régicides et les Conseils des Anciens et des Cinq-Cents.

Mais pour l’heure on parle costume. On veut de l’éclat, un manteau nacarat, rouge clair aux reflets de la nacre, à doublure blanche, écharpe bleue, broderie d’or, chapeau à panache tricolore.

Les députés porteront la toge, et ceux des Cinq-Cents un turban bleu avec un bouquet d’épis d’or.

La France est misérable, mais ses représentants et ses Directeurs sont résolus à jouir du luxe et des avantages du pouvoir.

Et tant pis pour le peuple, celui des faubourgs ou celui qui est sous les armes.

Les uniformes des soldats qui escortaient les deux fiacres directoriaux étaient usés, quant aux dragons ils montaient sans bottes et l’on voyait leurs bas troués.

Les troupes qui ont conquis la Belgique, celles qui en Italie ont battu sous le commandement du général Schérer les Austro-Sardes ne sont pas mieux loties !

Il en va de même sur les bords du Rhin.

« Les soldats de Pichegru sont dans une situation déplorable, écrit un voyageur. Ils n’ont ni souliers, ni bas, ni chapeaux et bientôt plus d’habits et de culottes. La misère les ronge et les fait déserter par milliers dans l’intérieur. Ceux qui restent dans cet état sont vraiment des héros. Il faut des millions en argent pour réparer ces maux. »

Mais les assignats valent à peine la valeur du papier !