Выбрать главу

Toujours affronté par ce Christ que je ne cherche pas ! Par la gloire de Jupiter, jamais je ne céderai, jamais je ne céderai, jamais je ne céderai !...

Prise d'effroi, sa mère recula.

Jamais, elle ne l'avait vu dans un tel état de déséquilibre.

Tatien présentait un masque indéfinissable de souffrance et de haine comme s'il était d'un seul coup devant son plus terrible adversaire.

Il a dévisagé Cintia, tremblant, s'efforçant en vain de se calmer, puis il a énoncé avec un air de découragement :

Mère, Opilius a raison. Tu es vraiment démente. La peste t'a rendue folle !...

Et après quelques instants de silence pendant lesquels on ne pouvait entendre que sa respiration haletante, il a ajouté, mélancolique :

Demain, j'épouserai Hélène avec un dard empoisonné à me torturer la poitrine.

Peu après, il l'a enlacée nerveusement avec toute la sollicitude de quelqu'un qui conduit un grave malade et, sans dire un mot, il l'a laissée dans sa chambre, affligée et désappointée.

Depuis ce crépuscule inoubliable, Cintia Julia a été considérée comme folle au sein de sa famille.

Le mariage des jeunes gens s'est réalisé lors de solennités exceptionnelles. Pendant trois jours consécutifs, l'exploitation agricole et l'amphithéâtre régurgitaient d'invités pour les jeux et les fêtes de congratulations avec de joyeuses cérémonies de louanges et de reconnaissance aux divinités bienfaitrices. Mais, dans la splendeur de la réjouissance publique, deux personnages étaient stigmatisés par une angoisse infinie. Opilius et Tatien contraints de devoir garder la maîtresse de maison à l'écart de la vie domestique, gardaient le sourire artificiel sur les lèvres de ceux qui reçoivent la joie du peuple comme une tasse lumineuse pleine de fiel.

Les appartements de Cintia restaient sous bonne garde dirigée par Épipode.

La réception de visites lui fut interdite.

L'entrée des serviteurs eux-mêmes était strictement contrôlée. La femme de Veturius ne pouvait voir que les plus intimes.

Et alors qu'Opilius, plus étroitement lié à Galba maintenant, se consacrait à l'élevage du bétail à une large échelle, Hélène et Tatien s'aimaient souriants et heureux, Varrus découragé, sans possible entente avec son fils, avait repris sa position de protecteur des abandonnés, se partageant entre les tâches sacrificielles habituelles et les prières édifiantes dont sa parole sublime semblait se baigner d'une lumière rédemptrice.

La renommée du frère Corvinus augmentait quotidiennement entre la haine gratuite des Romains moqueurs et les remerciements des âmes simples qui cherchaient en lui l'abri et la consolation, la santé et l'espoir...

L'année 235 s'est initiée sous de sombres auspices. L'empire grouillait de troubles incessants.

Sous l'instigation de prêtres voués aux divinités de l'Olympe, un important courant faisait référence aux adeptes de la Bonne Nouvelle leur portant des accusations malveillantes, leur attribuant la cause des désastres qui tourmentaient la vie collective.

La peste qui flagellait le monde latin en tous lieux, les récoltes perdues, les vicissitudes de la guerre et l'instabilité politique étaient considérées comme conséquences du travail punitif des dieux qui condamnaient les chrétiens de plus en plus nombreux de toute part.

Des nuages terribles s'accumulaient sur les travailleurs de l'Évangile, qui, en prières, s'attendaient à ce que s'abattent de nouvelles tempêtes.

Au beau milieu de ces sombres présages, Caius Julius Verus Maximin est monté sur le trône romain.

Alexandre Sévère avait été cruellement assassiné emportant avec lui l'influence des femmes miséricordieuses qui soutenaient le christianisme sur le trône impérial.

Le nouveau César ressemblait à un monstre qui s'était emparé de la pourpre, assoiffé de sang et de pouvoir.

Il a rapidement renforcé les tyrans de l'administration et de l'armée et une vaste persécution aux prosélytes du Christ reprit avec une impulsion destructrice.

Bien que Maximin s'en tienne aux questions belliqueuses dans le monde provincial, l'élan de mort se mit à rayonner au-delà de Rome, éveillant l'autocratie et la violence.

Diverses proclamations ont pris effet, n'ordonnant au début que l'assassinat des évêques et des religieux qui suivraient ce courant, offrant l'amnistie à ceux qui abjureraient de leur foi, mais très vite, la vague destructrice s'est élargie à tous les prêcheurs du credo martyrisé.

Quantité d'églises érigées avec de grands sacrifices depuis l'ascension de Caracalla, furent victimes d'horribles incendies.

Dans la métropole, les persécutés ne se rendaient au culte que dans les catacombes, et dans les villes lointaines, la répression dépendait des personnalités en place.

Avec les partisans de l'Évangile reconduits aux tribunaux, en prison et aux amphithéâtres, recommencèrent de vastes effusions de sang de toute part.

À Lyon, l'église Saint-Jean fut interdite et les objets sacrés passèrent aux mains irrévérentes des autorités sans scrupules. Le corps ecclésiastique et les religieux en fonction furent impitoyablement expulsés, mais certains parmi eux, dont le frère Corvinus, voulurent résister à la situation et restèrent en ville veillant au troupeau tourmenté.

En Gaules cependant, malgré tous les revers de l'immense lutte, invincibles les disciples de Jésus ont persisté courageusement dans leur foi. Comme les druides, leurs héroïques ancêtres, ils sont allés se réfugier dans la forêt pour chanter leurs cantiques de louange à Dieu. Après le travail quotidien, ils marchaient dans la nuit, en route vers les champs amis et silencieux, là sous des cathédrales en bois érigées par la nature sous le firmament étoile, ils priaient et commentaient les divines révélations comme s'ils respiraient, par anticipation, les joies du Royaume céleste.

Quirinus Eustasius, le juge en place, avait noué les fils des plus sombres intrigues et de la calomnie pour qu'il fût procédé à une grande tuerie, mais Artémius Cimbrus, patricien doté de vénérables titres, opposait toute sa puissante influence à toutes résolutions les extrêmes qui étaient prises.

Face aux obstacles qui s'opposaient à ses désirs, Quirinus a lancé l'idée que les grands propriétaires réalisent dans leur propre résidence, ce qu'il avait désigné de « juste châtiment ». Les esclaves reconnus chrétiens seraient condamnés à mort et leurs descendants vendus dans d'autres régions afin que la ville passe par une purge aussi complète que possible.

Un ordre d'un sénateur impérial, qu'il obtint sans difficulté, vint sceller ses intentions et il commença par un massacre dans son propre foyer.

Six hommes captifs ont été assassinés spectaculairement au son des musiques et des joies populaires, étendant petit à petit ces mesures à plusieurs maisons de l'aristocratie romaine.

Arrivé le tour du palais rural d'Opilius, le juge lui a rendu visite pour mettre en place les dispositions nécessaires.

D'après ce que je sais — a informé Veturius, une fois interpellé —, nous n'avons ici qu'un récalcitrant.

Je suis au courant — lui a dit Eustasius malicieusement —, il s'agit de Rufus, ce vieillard têtu que nous connaissons bien.

Tatien fut appelé pour donner son avis.

Le fils de Cintia était accompagné de sa jeune épouse qui tenait dans ses bras Lucile leur nouveau-née qui dormait.

Une conversation animée et féroce s'ensuivit.

Je suppose — a expliqué le dignitaire arrogant — que nous n'avons pas d'autre alternative. Nous exterminerons la canaille ou nous serons exterminés par elle. J'observe que certains de nos compatriotes, et des plus éminents, craignent d'affronter la menace galiléenne dans notre ville, considérant peut-être leur très grand nombre. Néanmoins, il est indispensable de réagir. Lyon est la métropole morale des Gaules, tout comme Rome est le centre du monde. Qu'en serait-il de nous si nous stimulions ici le favoritisme ? Qu'Artémius Cimbrus protège les fourbes, se valant de son prestige auprès des sénateurs et des hauts magistrats de Rome, est une calamité que nous ne pouvons pas éviter, mais devrions-nous en faire de même avec des employés immondes et voleurs, serait-ce digne de notre noblesse ?