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Chien, recule ! Tu ne briseras pas l'harmonie de ma maison ! Ne méprise pas la mémoire du père de Tatien qui nous a toujours été extrêmement sacrée !...

Ses veines gonflées dénonçaient toute l'émotion qui opprimait son âme, Subrius a exprimé une féroce expression sur son visage auparavant flegmatique et impénétrable, et il a rétorqué :

Ce n'est pas la vérité, Tatien ! Opilius m'a ordonné de poignarder Varrus Quint sur les eaux, mais par gratitude au passé, je l'ai épargné en assassinant un apôtre qui l'accompagnait et qui, certainement, lui a légué son nom. Et même si je meurs maintenant, je suis plus soulagé, presque heureux. J'ai vidé le fiel qui m'empoisonnait le cœur, j'ai expulsé quelque chose de ma propre bassesse... Mais, ne perds pas de temps, partons !

Veturius, toutefois, l'a immédiatement attrapé par la taille et a immobilisé ses bras, appelant des serviteurs, alarmé et livide.

Obéissant à leur maître, des esclaves musclés l'enfermèrent dans une pièce agréablement meublée, mais sombre et triste.

Légionnaire dans le temps, malgré son âge, il montra à cette heure l'agilité d'un tigre enchaîné, essayant de réagir à la hauteur de l'agression.

Et avant qu'Opilius et le mari d'Hélène ne se soient retirés, inexplicablement, Subrius

s'est tu.

Ses yeux brillaient maintenant et pris d'une étrange lucidité, après quelques instants il se mit à parler posément :

Tatien, mon histoire est la version réelle des faits. Quelque chose me dit que l'esprit de ton père n'est encore pas parti. Veturius m'a incarcéré pensant faire taire la vérité... Naturellement, il croit qu'il pourra me retenir comme il l'a fait avec ta malheureuse mère, mais il se trompe encore une fois et puisque je suis dans l'impossibilité de faire une confession devant l'envoyé d'Auguste afin de recevoir la punition que je mérite, je mourrai pour que tu crois en moi ! J'échange ma misérable vie inutile pour les moments de consolation que Varrus mérite...

Opilius a émis un rire nerveux réitérant sa conviction que son compagnon délirait.

Restant calme, Subrius s'adressa au jeune homme :

Une fois que je me serai puni moi-même, réfléchis à ma révélation et n'hésite pas...

Veturius, voulant empêcher de nouveaux échanges, a traîné son beau-fils à l'intérieur l'invitant à se préparer pour le repas.

Dans le triclinium, il voulut dissiper la tristesse de son fils adoptif en lui racontant de joyeuses histoires anodines, et une fois le repas terminé, ils sont allés passer un moment sur la

Quand le fils de Cintia fut remis de sa surprise, voici qu'est apparu Épipode, très pâle, annonçant que le vieux Subrius s'était pendu à la plus haute poutre de sa cellule.

Le beau-fils et le beau-père se sont regardés, terrifiés. Ils ont accourus instinctivement dans la sombre pièce et ont trouvé le corps du vieil ami suspendu, inerte, à l'épaisse charpente en bois.

Le vieux soldat avait tenu sa promesse en se suicidant.

Comme s'il était poussé par une insurmontable énergie, Tatien n'a plus hésité. Il s'est éloigné précipitamment en direction de l'écurie et alors qu'il montait dans une voiture légère, il a été étreint par Opilius qui lui a déclaré :

Je vais avec toi. Tu seras convaincu que le misérable sorcier est mort et que Subrius a été simplement victime de folie et d'illusion.

Le soleil des premières heures de l'après-midi scintillait entre les feuilles des gigantesques chênes qui protégeaient le chemin sur lequel les deux associés du destin avançaient calmement, ruminant mentalement chacun ses réflexions. Néanmoins, alors que Tatien, jeune et vigoureux, se perdait dans un abîme d'interrogations, Opilius, amaigri et inquiet, était plongé dans des souffrances torturantes. Comment échapper aux déboires de cette heure si le condamné était encore vivant ? Comment regagner la confiance de son beau- fils si la parole de Subrius se confirmait ?

À la porte du cachot, ils furent reçus par le gardien de la prison avec un respect tout spécial qui, loquace et gentil, les a informés où se trouvait le frère Corvinus moribond...

À la demande d'Artémis Cimbrus, le geôlier Edulius lui prêtait assistance parce que le généreux patricien avait obtenu l'autorisation d'enterrer son corps dès qu'il aurait expiré.

Opilius, tremblant, a supplié l'autorisation de rendre visite à l'agonisant en privé ; demande qui fut immédiatement acceptée.

Une fois l'infirmier éloigné, tous deux ont pénétré dans la pièce étroite où le condamné les yeux immensément lucides, attendait l'instant final.

Des draps très fins, offerts par des mains anonymes, étaient tachés de sang.

Les coups d'Hercules lui avaient massacré l'omoplate, envahissant son thorax qui était

ouvert.

Tatien, dominé par une indicible angoisse, a échangé avec lui un inoubliable regard..

Et l'esprit illuminé par la vérité, comme cela se produit avec les grandes âmes proches de la mort, avec effort, Varrus Quint lui a parlé ouvertement :

Mon fils, j'ai supplié Jésus de ne pas autoriser mon grand voyage sans t'avoir retrouvé... Je suis convaincu que Flave Subrius a révélé à ton cœur tout ce qui s'est passé...

Et comme le jeune homme effrayé se tournait vers Veturius, son père a continué :

je sais... C'est Opilius, qui t'a élevé comme un père. Je comprends son embarras à nous entendre, cependant, je le supplie d'autoriser cet entretien de dernière heure... Hier, Cintia s'absentait de la terre, aujourd'hui c'est moi...

À cette hauteur, le mourant a souri, résigné.

Le jeune homme manifestant toutefois ses propres conflits intérieurs, laissa l'émotion déborder de son cœur et demanda :

Si vous êtes mon père comment comprendre une telle sérénité ? Si Subrius a dit la vérité, mon beau-père n'est-il pas votre plus grand ennemi ? Si Veturius a ordonné de vous faire assassiner pour usurper la destinée de ma mère, comment pouvez-vous tolérer une aussi horrible situation quand une simple parole venant de vous pourrait éclaircir tous les doutes ? Oh dieux, comment vaincre ce ténébreux labyrinthe ?!...

Le condamné dont les traits se recomposaient, essaya cependant d'esquisser un geste d'affection, puis il ajouta avec réserve :

Tatien, ne t'afflige pas juste à l'heure où nous nous quittons. Ne considère pas Veturius comme l'adversaire de notre bonheur... Souviens-toi, mon fils, de l'affection avec laquelle il a guidé ton développement... Personne n'atteint la dignité personnelle sans de dévoués éducateurs. Oublierais-tu, par hasard, le dévouement avec lequel il s'est consacré à ton bien-être ? Le remerciement sincère est une loi pour les cœurs nobles et loyaux. Même s'il était un criminel commun, il mériterait notre respect pour la tendresse avec laquelle il a suivi tes premiers pas... Tu supposes devoir identifier en lui un ennemi de notre maison, néanmoins, nous ne poumons pas oublier qu'il a été l'homme aimé par ta mère... J'ai toujours honoré les désirs de Cintia dans les moindres détails et je ne cesserai de la comprendre dans le choix de son cœur...

Le blessé s'est interrompu pendant quelques instants, retrouvant des forces, et a continué :

Ne me crois pas dépourvu de sentiments... J'ai appris avec Jésus que l'amour, au- dessus de tout, est le moyen de coopérer pour le bonheur de ceux à qui nous nous dévouons... Aimer c'est faire don de soi-même... J'admets que le passé pourrait avoir été guidé par d'autres circonstances, néanmoins, qui de nous pourrait pénétrer avec assurance la conscience d'autrui? Que ferions-nous si nous étions à leur place ? Opilius, certainement, a été désiré avec une infinie tendresse par l'âme à qui nous devons tant et, peut-être pour cela même, il n'a pas hésité à lui manifester les aspirations les plus profondes...