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Un peu plus tard, Seti s’étira et murmura :

— J’aime faire l’amour avec toi. J’ai pourtant été très amoureuse de Bill. Peut-être parce qu’il était une brute. Avec lui, je baisais. Dès que son sexe énorme me touchait, j’étais dans tous mes états, je jouissais comme une folle. Mais il ne m’a jamais caressée et il semblait ignorer que j’avais des seins… Et puis, il a rencontré cette pétasse de Yassira…

— Tu ne la portes pas dans ton cœur…

— C’est une salope ! fit-elle avec une conviction profonde. Elle s’ennuyait avec son Libanais qui la baisait une fois par mois. Elle avait entendu dire que Bill était un coup superbe, elle a voulu l’essayer. Quand elle en aura assez, elle retournera dans sa grande maison de Station Hill, prendra une bonne trempe et Bill restera tout seul comme un con…

Quelle lucidité…

— Il ne s’en doute pas ?

— Je ne sais pas. Quand il a envie d’une femme, il est comme fou. En plus, il pense qu’il est toujours le plus fort, mais ici, les Libanais font la loi. Ils ont trop de complices. Il y laissera des plumes ou sa peau.

— Il reviendra avec toi.

— Je n’en veux plus. Attends ! Je vais reprendre une douche.

Au moment où elle émergeait de la moustiquaire, on frappa un coup à la porte. Seti fit un pas en avant, défit le loquet et entrouvrit. Une violente détonation fit trembler le bungalow. Horrifié, Malko vit Seti rejetée en arrière comme par un poing invisible, une énorme tache rouge au milieu de la poitrine.

La porte avait volé en éclats. Il aperçut le canon d’un shot-gun balayant la pièce à sa recherche.

Allongée sur le dos, Seti, les yeux vitreux, agonisait.

Chapitre VII

Les narines piquées par l’âcre odeur de la poudre, Malko roula sur lui-même, entraînant la moustiquaire, avec une seule idée éviter la prochaine décharge.

Il tomba sur le tapis de raphia au moment où un second coup de feu explosait. La charge de chevrotine déchiqueta les supports de la moustiquaire et creusa un trou énorme dans le mur. Fébrilement, Malko arracha le rabattant de la sacoche en cuir où se trouvait son arme.

Aucun bruit à l’extérieur. Le tueur devait recharger son shot-gun. Malko saisit le Colt 45, tira la culasse en arrière et, dans la foulée, visa la porte le bras tendu. Il lâcha trois cartouches, son index crispé sur la détente.

Profitant de l’abri du lit, il se déplaça ensuite le long du mur vers la porte toujours grande ouverte.

Aucune réaction. L’arme à bout de bras, il plongea à l’extérieur. L’air tiède lui frappa le visage.

Il aperçut, déjà au fond de la cocoteraie, un homme de haute taille qui s’enfuyait vers la route, un fusil à la main. Sans hésiter, Malko vida son chargeur, jusqu’à ce que la culasse reste ouverte. Mais la cible était trop loin. Le tueur disparut. Des Noirs accouraient du Club House de St-Michael Lodge, attirés par les coups de feu. Malko entendit un bruit de moteur dans le lointain. L’assassin s’enfuyait. Il rentra dans le bungalow et se pencha sur Seti.

La jeune femme, étendue sur le dos les yeux fixes, ne respirait plus. Une horrible blessure déchiquetait sa poitrine. La charge de chevrotine lui avait fait exploser le cœur. Il se redressa, des larmes dans les yeux. La mort était une chose abominable, irréversible. Il se retourna trois Noirs regardaient la scène, terrifiés. Il leur dit :

— Allez prévenir Bill Hodges.

Un des Noirs partit en courant. Malko prit le drap et en couvrit la dépouille de Seti. Victime innocente car c’est lui qui était visé, sans aucun doute. Or, il n’avait encore rien découvert sur les deux terroristes chiites. Sa présence seule représentait donc un danger. L’homme qu’il avait vu s’enfuir pouvait être Eya Karemba, le Noir gigantesque qui travaillait pour Karim Labaki. Il pensa soudain à Rugi. Elle aussi était en danger. Il fallait l’avertir.

Ses réflexions furent brutalement interrompues par une tornade.

Wild Bill Hodges.

L’irlandais, riot-gun Beretta à bout de bras, les yeux réduits à un trait, le visage congestionné, avait écarté les Noirs agglutinés autour de la porte comme un boulet de canon. Sans un mot il fonça sur le corps, arracha le drap et contempla Seti. Puis, il se redressa après avoir recouvert le visage de la morte et demanda d’une voix croassante :

— Qui est le salaud qui a fait ça ?

En peu de mots, Malko lui fit le récit du meurtre. Le visage fermé, Wild Bill Hodges interpella les Noirs en créole incompréhensible pour lui. L’un d’eux répondit en hésitant.

— Vous connaissez un très grand Noir qui a une Pajero blanche ? demanda-t-il à Malko.

— La Pajero, je ne sais pas, mais le tueur, cela pourrait être Eya Karemba.

— Karemba ! Cet enculé de salaud !

Il était sur le point d’exploser. Violet. Serrant son riot-gun comme s’il allait s’en servir sur le champ.

— Ce sont ces fumiers de Libanais qui ont voulu se venger, dit-il. Ils vous ont pris pour moi. On va aller voir Labaki et il va y avoir du sang sur les murs. Vous savez vous servir d’un M.79[27] ?

— Pourquoi m’avez-vous donné rendez-vous ? coupa Malko.

L’Irlandais le fixa, sincèrement étonné.

— C’est vous qui m’avez dit de vous retrouver au Gem, le restaurant libanais. Vous m’avez envoyé un type.

Un ange passa. Horrifié.

— C’est moi qu’on visait, corrigea Malko. Pas vous.

Il lui expliqua le coup des deux faux rendez-vous. Bill Hodges l’écouta en silence avant de dire :

— Je vous emmène voir Sheka Songu, le chef de la police. C’est mon pote, il va nous aider. Si c’est ce salaud de Karemba…

* * *

Bill Hodges salua d’un geste désinvolte la sentinelle en uniforme qui veillait devant le bureau du chef de la police Sheka Songu, donna un coup sec sur la porte et entra, suivi de Malko. Le QG de la police était encore très animé en dépit de l’heure tardive. Ils avaient franchi les treize kilomètres séparant Lakka de Freetown à une allure démente, l’un suivant l’autre et Malko avait laissé au passage sa voiture au Mammy Yoko. Le chef de la police leva vers eux un visage courroucé, aussitôt éclairé d’un sourire. Il contourna son bureau et vint vers l’irlandais, la main tendue.

— Bill, my friend !

Le mur derrière son bureau disparaissait sous les images religieuses, allant du Christ en croix au Pape, en passant par la Vierge et toutes sortes de saints… Voilà un homme qui ne cachait pas sa foi… Il avait de curieuses oreilles de faune, comme si on en avait sectionné la partie supérieure. Il prit Bill dans ses bras, l’étreignit puis s’écarta avec un regard de reproche.

— Je ne t’ai pas vu à la messe dimanche…

— J’étais en brousse, dit Bill.

— Ah bon ! fit le chef de la police, soulagé. J’avais cru que tu étais devenu protestant. Pourquoi tu viens me voir ?

— Sheka, fit Bill Hodges, as-tu sous tes ordres un type qui s’appelle Eya Karemba, un grand type costaud ?

Le Noir fronça les sourcils.

— Oui.

— Il a une voiture ?

— Oui, une Pajero blanche. Pourquoi ?

— Il a tué mon amie Seti et tenté d’assassiner mon ami Malko Linge ici présent, il y a deux heures.

Le visage du policier se ferma.

— C’est grave ce que tu dis là… Tu es sûr ?

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27

Lance-grenades.