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Le grondement d’un hélicoptère lui fit lever la tête. Un des appareils se posait derrière l’hôtel. Lui rappelant à quel point il était facile de sortir de Sierra Leone : la compagnie appartenait à Labaki. Il replongea dans ses pensées. Échafaudant un plan basé sur un certain nombre de « si », mais il n’avait guère le choix.

Il allait se lever pour repartir quand une somptueuse silhouette apparut à l’entrée de la piscine.

Rugi.

Celle qu’il voulait justement joindre !

La jeune Noire arborait une robe hyper courte en jersey blanc qui moulait ses formes de façon ultra provocante. Le regard dissimulé derrière des lunettes noires faisait très star. Le Libanais faillit en avaler ses billets. Rugi se dirigea vers Malko d’une démarche pleine de sensualité.

— Malko ! Comment ça va ?

Elle s’assit sur le rebord de la chaise-longue, découvrant ses cuisses café au lait, le regard humide. Le jersey dessinait deux seins aigus aux larges pointes qui semblaient défier Malko.

— Bien, dit-il. Je voulais vous voir. Et vous ?

Elle sourit.

— Je m’occupe d’un ballet folklorique, ce n’est pas très amusant. Et ensuite, je retournerai en Europe. La vie en Sierra Leone est vraiment trop difficile. Est-ce que vous avez revu Bambé ?

— Non.

— Vous lui plaisez beaucoup, dit-elle. Elle me l’a dit. C’est une gentille fille. Avec un dîner et un gara, vous vous l’attachez.

— J’aimerais mieux vous attacher, fit Malko, la regardant droit dans les yeux.

— Cela vous coûterait plus qu’un gara. Le ton était un peu agressif, mais les yeux et la bouche souriaient.

Malko sauta sur l’occasion.

— En attendant le gara, voulez-vous dîner avec moi ? J’ai une idée dont je voudrais vous parler.

Elle fit semblant d’hésiter puis lança :

— Oui, mais je n’aurai pas le temps de me changer. J’habite à Kissy, à l’autre bout de la ville et je n’ai pas d’essence.

— Vous êtes superbe comme ça.

— Bien ! dit-elle, je vais aller me donner un coup de peigne chez le coiffeur. Pour être présentable. Je vous retrouve ici, vers neuf heures…

— OK, si vous êtes en retard, prévenez-moi.

— Je serai là !

Le Libanais manqua avaler ses lunettes en suivant le balancement de ses hanches, avant de jeter un regard de haine à Malko. Celui-ci se leva. Cette rencontre lui avait remonté le moral. Il ne restait plus qu’à recueillir la réponse de Langley.

* * *

Jim Dexter referma avec soin la porte de son bureau. Il avait un papier à la main qu’il posa avant de se tourner vers Malko.

— C’est OK, dit-il d’une voix un peu solennelle. Vous avez le feu vert pour liquider ces salauds. Même s’il doit y avoir de la casse politique.

Chapitre XI

— L’ordre vient du Président lui-même, souligna le chef de Station. Il a signé un nouveau « finding ». Il semble que les interceptions radio transmises par le Mossad aient joué un grand rôle dans sa décision. Et le DDO a plaidé la cause de l’intervention. On ne peut pas se laisser allumer comme des sitting-ducks[34].

Malko regarda le télégramme juste déchiffré qui, en tant que chef d’une mission clandestine, lui donnait des pouvoirs extrêmement étendus. Jim Dexter lui jeta un regard incisif.

— Vous avez une idée de ce que vous allez faire ?

— Je crois, dit Malko. Mais ça risque de faire des vagues…

L’Améncain eut un geste fataliste.

— Le Président y a bien pensé en signant son « finding ». En cas de coup dur, ce ne sera pas un très gros problème de vous exfiltrer. Surtout avec Wild Bill.

L’Américain regarda par la fenêtre à travers laquelle on distinguait le toit plat de l’ambassade d’URSS, avec son antenne cerceau, où une Soviétique faisait du jogging.

— Avez-vous pu apprendre quelque chose sur l’emploi du temps d’Eya Karemba, dimanche ?

— Oui. Coup de pot. Dimanche, Karemba travaillait pour le CID. Il était de permanence à Longi Airport. Il est resté là toute la journée.

Donc, il n’était pas avec Karim Labaki. Malko essaya de deviner ce que le policier noir avait pu faire à l’aéroport.

— Il y a eu des vols internationaux, ce jour-là ? demanda-t-il.

— Oui, une arrivée, un DC 10, en provenance de Paris. L’appareil est reparti sur l’Europe. Comme toutes les semaines.

— Vous pouvez avoir la liste des passagers embarqués et débarqués ?

— Oui, je pense.

— C’est tout ?

— Oui. Peut-être un vol des Ghana Airlines s’il s’est posé. Ils sont très capricieux.

— Et les vols intérieurs sierra-leonais ?

L’Américain eut un sourire ironique.

— Il n’y en a plus. Les Sierra Leone Airlines n’avaient qu’un seul avion prêté par ALIA. Comme ils n’ont jamais rien payé, les Jordaniens ont repris l’avion. Depuis, si vous avez à vous rendre en brousse, il reste les poda-poda et les pirogues. Il n’y a aucun avion privé en Sierra Leone.

— Et les hélicos ?

— Les trois qui font la navette Lungi-Freetown. Plus les deux du président, mais un est accidenté.

Malko se leva. Jim Dexter lui expédia un coup d’œil, quand même inquiet.

— Vous me tenez au courant. Que j’aie le temps de me mettre à l’abri d’une réaction brutale des Libanais…

— Pour l’instant, je me renseigne, dit Malko.

— Combien est-ce que je peux offrir à Bill Hodges ?

— Le moins possible, fit Dexter, toujours aussi économe. Il est gourmand. Partez-moi un peu de votre plan.

— Pas encore, dit Malko. J’en saurai plus ce soir. D’ici là, vous vérifiez les listes de passagers.

— OK. Bonne chance, et bonne guerre, fit le chef de Station avec un sourire un peu crispé.

* * *

Les gardes esquissèrent un garde-à-vous approximatif devant la Mercedes 500 de Karim Labaki sortant de la résidence du président Joseph Momoh. Enfoncé dans ses coussins le Libanais ne les vit même pas. La rage l’étouffait. Depuis qu’il était en Sierra Leone, c’était la première fois qu’il s’était fait traiter comme un petit garçon. Le Président était furieux.

Il avait arpenté son bureau en marmonnant des menaces à l’égard de Labaki et des Iraniens en général. Tremblant de fureur. Tout cela pour un petit journaliste de merde… Seulement le Libanais ignorait que Joseph Momoh appartenait à la même société secrète qu’Eddie Connolly. L’assassinat de ce dernier l’avait profondément choqué.

Le chauffeur se retourna :

— On va à la maison ?

— Non, fit Karim Labaki. À Murray Town. À l’ambassade d’Iran.

Ses amis iraniens commençaient à lui casser les pieds. En plus, l’ambassadeur venait d’annoncer au Président que la nouvelle livraison de pétrole aurait beaucoup de retard. Or, Labaki l’avait déjà revendu, ce pétrole, avec dix dollars de profit par baril, pour racheter du brut nigérien. Et il était obligé de livrer… Plaisanterie qui risquait de lui coûter une dizaine de millions de dollars.

La sentinelle, ouvrit respectueusement la grille devant la Mercedes aux vitres noires. Le Libanais était un des rares à pouvoir être reçu par l’ambassadeur d’Iran sans rendez-vous.

Karim Labaki grimpa le perron, fila directement au premier étage, poussa la porte du directeur du Centre Culturel. Hussein Forugi était en train de se faire les ongles. Il posa sa lime et se leva avec un sourire servile.

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34

Littéralement, canards assis.