Выбрать главу

Malko sortit une liasse de dollars, en compta cinq cents et les posa sur le lit. Bambé ne broncha pas. Pour elle, c’était abstrait. Malko insista.

— Il y en a pour vingt mille leones. L’œil de Bambé brilla enfin. Ça, c’était du concret. Son cerveau se mit au travail, rêvant déjà du petit commerce qu’elle pourrait s’offrir. Un stand de vente de cigarettes pour commencer. Son corps s’alanguit à cette vision paradisiaque et son regard humide se posa sur Malko. S’ils avaient été seuls elle lui aurait probablement donné sur-le-champ ce qu’elle refusait au conseiller culturel iranien…

— Qu’est-ce qu’il faut faire ? demanda-t-elle.

— Vous avez un moyen de joindre Forugi ? interrogea-t-il. Discrètement. Pas par téléphone.

— Oui, dit-elle. J’ai un cousin qui est le frère d’un gardien de la résidence.

C’est-à-dire qu’ils étaient tous du même village.

— Il peut porter un message à Hussein Forugi, de votre part ?

De nouveau, la frayeur revint dans les yeux de Bambé.

— Qu’est-que je lui dis ?

— De venir vous voir. Demain, dès qu’il fera nuit.

— Mais je ne veux pas. Il va…

— Il ne fera rien, promit Malko, je serai là, avec un autre ami. Vous ne craignez rien…

Bambé échangea un regard avec Rugi. C’était le moment critique.

— Accepte, conseilla Rugi. Après tu iras dans ton village quelques jours. Je t’emmènerai.

C’est ce que Malko avait prévu la mettre sous sa protection de Wild Bill Hodges le temps qu’il faudrait. Le sort d’Eddie Connolly était là pour rappeler les dangers d’une collaboration avec lui. Bambé semblait très intriguée par ce mic-mac auquel elle ne comprenait rien.

Mais qu’est-ce que vous voulez lui faire ? demanda-t-elle.

— Lui parler, fit Malko. :

— Vous ne pouvez pas aller à la Résidence ?

Rugi intervint.

— Non. Forugi ne le recevra pas. Il a peur qu’il lui jette un sort. Il faut le voir par surprise.

— Ah bon, fit la jeune Noire. Rassurée par cette précision. On était en pays de connaissance… Elle regarda les billets, puis Rugi, enfin Malko et laissa tomber d’une voix timide :

— Je ne sais pas écrire.

Problème non prévu.

— Je vais te faire le mot, proposa aussitôt Rugi.

Malko la regarda rédiger son piège. Les dés étaient jetés. Le premier acte de sa contre-offensive, destinée à contrer l’opération iranienne.

Chapitre XII

— On danse ?

Rugi ne tenait plus en place. Les énormes haut-parleurs crachaient du Kassav qui balançait vraiment et la jeune Africaine ondulait au fond de son fauteuil comme un cobra heureux, le regard allumé. Malko la précéda sur l’immense piste vide du Moonraker, la disco du casino Bitumani, qui l’avait surpris par son luxe. On ne se serait pas cru dans l’un des pays les plus pauvres du monde, mais plutôt en Europe, avec une décoration 1930, des sièges mœlleux, des éclairages sophistiqués et un disk-jockey qui dansait sur place dans son podium dominant l’ensemble.

À peine sur la piste, Rugi se frotta sans pudeur contre Malko, avec une telle maestria qu’elle lui imposa son rythme. Ses hanches rondes semblaient montées sur roulements à billes. Les rares clients de la disco se mirent à moudre de mauvaises pensées, fascinés par cette croupe qui se balançait à quelques mètres d’eux, provocante et somptueuse.

Malko ne tarda pas à ressentir les effets de cette sensualité naturelle. Instinctivement, son bras se referma autour de la taille de Rugi. La jeune Noire ne ralentit pas son balancement, se frottant sans pudeur à Malko.

— J’adore cette musique ! murmura-t-elle.

Leurs regards se croisèrent et il se dit qu’elle serait à lui avant la fin de la nuit. Puis, elle s’écarta un peu, comme pour se donner encore mieux en spectacle. Le ventre virevoltait, se creusait, s’offrait à la façon d’une danseuse orientale, mais sur un rythme plus sensuel, plus languissant. Deux autres couples les avaient rejoints, sur la piste, mais, à côté de Rugi, leurs évolutions semblaient maladroites et pataudes. Rugi sembla enfin s’apercevoir de l’effet qu’elle faisait à Malko. Fugitivement, elle appuya son ventre contre son sexe tendu.

— Vous n’êtes pas sage ! reprocha-t-elle.

Depuis une heure, Malko se détendait. Ils avaient dîné au Lagonda, le restaurant du Bitumani, cher et mal. Rugi avait fait succéder le Cointreau au vin blanc tiède. Malko avait forcé sur le café très sucré, en prévision d’une nuit agitée. Débarrassée de l’hypothèque Bambé, Rugi avait redéployé tous ses charmes. En dépit de sa complicité amoureuse avec Rugi, Malko ne cessait de penser à Bambé. Si sa manipulation échouait, il ne lui restait plus grand-chose à tenter. Même si elle réussissait, il avait en face de lui une montagne de difficultés. Rugi semblait bien loin de tout cela.

La musique s’arrêta et ils regagnèrent leur table, tout au fond, près des fenêtres donnant sur la baie. Rugi but un peu de Cointreau, suçant ensuite les petits cubes de glace, puis se tourna vers Malko.

— Que voulez-vous vraiment faire avec Hussein Forugi ?

La question directe le ramena sur terre.

— Je vous l’ai dit. Le faire parler.

— Il ne parlera pas, dit-elle. Vous le savez bien.

Elle fixait Malko avec insistance.

— Vous allez le tuer, n’est-ce pas ? lâcha-t-elle d’une voix calme.

— Je ne suis pas un assassin, protesta-t-il. J’ai seulement besoin d’obtenir une information sur une opération terroriste. Pas la peine de le tuer pour cela.

— Il voudra se venger.

— Je ne serai plus là. Et nous aurons mis Bambé en sûreté.

Rugi ne répondit pas.

La musique reprenant, elle abandonna brutalement le sujet, ondulant à nouveau sur son fauteuil.

Et tout à coup, la lumière s’éteignit.

Malko tâta machinalement la sacoche de cuir contenant le Colt 45 posée à côté de lui. Il entendit le rire de Rugi dans la pénombre.

— C’est une panne ! Ils vont mettre le générateur en route.

Le silence fut troublé par quelques interpellations, puis la musique reprit, nettement moins bonne. Un transistor mis en œuvre en toute hâte. Quelques bougies apparurent çà et là, diffusant une faible clarté. La discothèque étant pratiquement vide, cela n’avait guère d’importance. En tendant son verre de Cointreau à Rugi, Malko effleura involontairement sa poitrine. Elle eut un petit sursaut, posa le verre et se pencha sur lui, écrasant sa bouche contre la sienne, dardant une langue aigué et agile comme un petit serpent au goût de Cointreau. Sa main se posa sur le sexe encore gonflé de Malko. Trente secondes plus tard, ils étaient emmêlés comme deux boas constrictors en folie. Rugi se tordait au moindre contact, électrisée. Quand Malko glissa une main sous son pull, taquinant la pointe d’un sein, elle lui mordit la lèvre. Elle continuait à le malaxer fébrilement. Profitant de l’obscurité, elle fit glisser son zip et l’emprisonna entre ses doigts.

Il voulut lui rendre la pareille, mais se heurta au pantalon si étroitement serré qu’il dessinait la forme de son sexe. Lorsqu’il se mit à masser le point le plus sensible, Rugi sursauta et murmura d’une voix humide à son oreille :

— Arrête, tu vas me faire hurler !

Au moins, une Africaine qui n’avait pas été excisée…

Elle le masturbait à grands coups de poignet. Au risque de commettre l’irréparable. Malko mourait d’envie de goûter à sa bouche. Doucement, il inclina son visage vers lui.