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Dominique était sceptique. Il manquait un élément dans cette biographie.

— Le docteur Taylor vous a-t-il parlé d’un journaliste appelé Michael Stern ?

Ils parurent tous deux surpris par la question. Marie-Anne Perard reprit le dossier et le feuilleta.

— En effet. Lors de son arrivée à Londres, il était en possession d’un quotidien qui relatait une tuerie commise ce jour-là à Belfast. Lors de son arrestation, il a déclaré à la police qu’il avait rendez-vous avec ce Michael Stern, le journaliste qui avait commis les meurtres. C’était une manœuvre de diversion qui prouvait son aliénation mentale.

— Cela signifie qu’il n’y avait aucun rapport entre lui et ce journaliste ?

— Aucun. Seulement celui qu’il s’est créé dans la tête.

Dominique secoua la tête avec dépit.

— Pauvre Jacques ! Il en parle encore quarante ans après. Je suis surpris de ce que vous m’apprenez, mais ça ne change rien pour moi. Son passé le regarde. Pour moi, c’est un patient et mon rôle est de soulager ses douleurs.

Marie-Anne Perard intervint.

— C’est tout à votre honneur, Dominique.

Elle se leva pour signifier la fin de la rencontre. Le policier embraya aussitôt.

— En tout cas, vous avez réalisé du beau travail. Sans vous, nous ignorerions encore qui est cet homme.

Dominique se leva à son tour.

Il fit mine d’inspecter la pièce et prit l’air interrogateur.

— À propos, où est le docteur Taylor ?

— Il a souhaité voir Monsieur Bernier avant de partir. Lydia l’a accompagné. Je comptais vous le faire rencontrer, mais il était pressé. Il a sûrement quitté la clinique à l’heure qu’il est, il avait un train de retour à quatorze heures.

Le téléphone retentit alors qu’ils se dirigeaient vers la sortie. Marie-Anne Perard s’excusa et rebroussa chemin.

Dominique sortit du bureau et raccompagna Gérard Jacobs.

Le policier lui serra la main.

— Merci pour votre aide, ça ne se termine pas comme nous le pensions, mais c’est la vie.

Il sortit et traversa le parking pour regagner son véhicule.

Dominique le suivait des yeux lorsqu’il entendit Marie-Anne Perard l’interpeller.

— Dominique !

Elle se précipitait dans sa direction.

— Vite, Dominique, suivez-moi, c’est Bernier !

Ils pressèrent le pas.

— Qu’est-ce qui se passe ?

— Il est arrivé quelque chose.

Ils perçurent de l’agitation et des éclats de voix lorsqu’ils débouchèrent dans le couloir.

Ils pénétrèrent de front dans la chambre. Le chariot de réanimation était installé et un médecin était penché sur X Midi. On lui avait mis un masque à oxygène sur le visage. Le médecin pratiquait le mouvement spécifique de la réanimation cardiaque, les mains jointes sur la poitrine de l’homme. Deux infirmières l’assistaient.

D’un signe de tête, Marie-Anne Perard interpella l’une des infirmières et l’interrogea du regard.

L’infirmière prit l’air désolé.

— Je crois qu’on le perd.

99

Les yeux

Une ombre se profile derrière lui. Il se relève. Je distingue la silhouette de Birkin dans la pénombre. Il avance. Il a retrouvé son allure d’antan. Il est jeune, souriant et bien habillé. Il regarde derrière lui, tend la main. Mary approche. Sa beauté explose dans la lumière. Elle hausse une épaule et sourit à Birkin. Ils ont l’air complices. Mary passe une main dans mes cheveux. Elle fait un signe derrière elle et ma mère apparaît. Elle sourit. Tous trois ont l’air de me jouer un bon tour. Je sens leurs mains sur ma poitrine. Maman m’embrasse sur le front. Je respire son odeur. J’ai attendu si longtemps. Je ne veux plus te blesser. Elle pose une main sur mon visage et me ferme les yeux.

Épilogue

Dominique et Léna sortirent de l’aéroport JFK le mercredi 22 juin 2011 à midi.

Contrairement à ce que les oiseaux de mauvais augure leur avaient prédit, le vol ne leur avait pas paru interminable et les formalités d’entrée ne leur avaient pris qu’une vingtaine de minutes.

Ils montèrent dans un taxi et prirent la direction de Manhattan. L’autoroute et le pont de Queensboro étaient encombrés et ils ne parvinrent à leur hôtel que vers quatorze heures.

À cette époque de l’année, les touristes n’avaient pas encore envahi New York. En surfant sur quelques sites de réservation en ligne, Dominique avait trouvé un hôtel confortable à un prix abordable dans l’Upper West Side, en face du Lincoln Center.

Ils prirent possession de leur chambre, défirent leurs bagages et décidèrent de se dégourdir les jambes dans Central Park.

Depuis leur week-end de février au Coq, Dominique et Léna étaient devenus inséparables. Tous deux parlaient d’un fulgurant coup de foudre. Outre leur joie de vivre communicative, ils s’étaient trouvé de nombreux points communs et s’entendaient à ravir. Ils projetaient de s’installer ensemble dès septembre, lorsque le bail de l’appartement de Léna prendrait fin.

Comme ils devaient s’y attendre, leur union avait fait les gorges chaudes à la clinique, mais le temps, leur attitude professionnelle et leur enthousiasme avaient mis fin aux bavardages.

Ils se promenèrent durant près de deux heures dans Central Park, émerveillés par la fraîcheur et la quiétude qui y régnaient, malgré l’effervescence de la ville toute proche. Ils remontèrent jusqu’au Réservoir, sortirent du parc par l’est, flânèrent sur la Cinquième Avenue et firent un tour dans le centre commercial de Colombus Circle avant de rentrer à l’hôtel pour se rafraîchir.

Vers dix-huit heures, les effets du décalage horaire commencèrent à se faire sentir. Ils prirent un repas rapide au restaurant attenant à l’hôtel et se mirent au lit vers vingt heures où ils s’effondrèrent de sommeil.

Ils se réveillèrent de concert, frais et dispos, alors que le jour se levait. Ils firent l’amour et prirent une longue douche. Ils sortirent de l’hôtel aux environs de huit heures et avalèrent un petit déjeuner dans l’un des nombreux Starbucks Coffee qui parsemaient les rues de la ville.

Ils entamèrent ensuite le programme qu’ils avaient élaboré. Ils descendirent Broadway à pied vers l’Empire State Building dans le but d’échanger un baiser sur la terrasse du quatre-vingt-sixième étage, comme ils s’étaient promis de le faire en regardant Nuits blanches à Seattle.

Dominique faisait une halte tous les dix mètres pour prendre des photos ou s’extasier sur la moindre scène de la vie quotidienne. Léna s’en amusait et renchérissait sur ses propos.

C’étaient leurs premières vacances à deux et New York les fascinait.

Le décès de Jacques Bernier avait été enregistré le mardi 22 février 2011 à 13 h 08. Le rapport du médecin légiste concluait que la mort était survenue à la suite d’une embolie pulmonaire. Selon lui, il ne pouvait y avoir de lien entre les causes de la mort et un choc émotionnel consécutif à la visite du docteur Taylor.

Dès le lendemain, Dominique avait organisé une collecte au sein du personnel de la clinique. Il avait joué de son pouvoir de séduction pour réunir la somme nécessaire à la réalisation de son objectif. Malgré cela, il avait dû solliciter Marie-Anne Perard et Gérard Jacobs pour surmonter certains obstacles administratifs.