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— Alors, pourquoi votre nom ?

Fink parut embarrassé.

— Avant de s’en aller, il m’a laissé quelque chose.

— Quelque chose ? Quoi ?

— C’est loin tout ça, mais une promesse est une promesse et je tiens toujours les miennes.

— Que voulez-vous dire ?

Fink le fixa sans sourciller.

— Je dois vous poser une question et vous n’avez droit qu’à une seule réponse.

Dominique écarquilla les yeux.

— Bien, dans ce cas, je vous écoute.

— Quel a été le premier rock ?

Dominique s’esclaffa.

— Quoi !? Vous me demandez à moi quel a été le premier rock ? Et je n’ai droit qu’à une réponse ? Je n’en sais rien, moi, quel a été le premier rock !

Fink continuait à le fixer.

Dominique lut dans ses yeux qu’il était sérieux.

Il était désemparé et s’apprêtait à déclarer forfait quand la réponse lui apparut telle une révélation.

— Je crois que je sais.

— Je vous écoute.

— Ce n’est peut-être pas le titre complet, mais je pense que ça commence par Maybe.

Fink sourit.

— Je vous crois. Comme vous, je n’y connais rien en rock, mais je ne pouvais remettre cet objet qu’à cette condition, un mot de passe en quelque sorte. Maybellenne, de Chuck Berry. J’y ai encore pensé récemment, il est passé à la télévision pour annoncer sa nouvelle tournée.

Il se pencha et empoigna le sac à dos. Il le déposa sur ses genoux, l’ouvrit et en sortit plusieurs cahiers d’écolier reliés par une large bande élastique.

— Voilà de quoi il s’agit.

Il les tendit à Dominique.

— Il n’a pas précisé s’il m’autorisait à les lire, mais je suis curieux, je l’ai fait, enfin, j’ai tenté de le faire. Ce qui est écrit là-dedans est très confus.

Dominique ôta l’élastique et ouvrit l’un des cahiers.

Les pages étaient remplies d’une écriture serrée ponctuée de nombreuses ratures. Il feuilleta le cahier. L’écriture changeait à chaque page, elle était une fois rectiligne, une fois penchée à droite ou à gauche et la taille des lettres variait. Sur certains feuillets, seuls quelques mots étaient écrits en lettres géantes. En plus des ratures, les pages étaient chargées de dessins, de chiffres, de schémas ou de mots rajoutés en rouge dans la marge.

Fink soupira.

— Vous voyez, ce n’est pas très clair. En gros, il raconte qu’il a enregistré un disque avec un groupe, à Berlin. Il s’est passé des choses dans le studio. Il essaie d’expliquer quoi. Je n’ai pas compris grand-chose, mais je ne me suis pas vraiment investi dans cette lecture.

Dominique soupesa la pile.

— En tout cas, il avait des choses à dire.

— Si vous voulez mon conseil, ne tenez pas trop compte de ce qu’il raconte. Il n’avait pas toute sa tête, ce ne sont que de grandes élucubrations. Mais faites comme il vous plaira. Ces cahiers sont à vous. Promettez-moi seulement une chose.

— Je vous écoute.

— Si un jour, vous trouvez un sens à tout cela, reprenez contact avec moi.

— C’est promis.

Ils se levèrent et se serrèrent la main.

— Merci de votre aide, Monsieur Fink.

— Vous êtes le bienvenu, je l’avais promis à René.

Fink jeta un coup d’œil au tableau.

— Un jour, j’ai pris une photo de lui sans qu’il ne s’en rende compte. Il ne voulait pas qu’on le photographie. Il était vraiment bizarre, cet homme-là.

Ils se firent un signe de la main et partirent chacun de leur côté.

Dominique se perdit dans les salles et dut demander à l’un des gardiens de lui indiquer la sortie.

Dehors, le soleil était éblouissant.

Au bas des marches, un groupe de gospel chantait en exhortant les passants à les accompagner en frappant dans les mains. Dominique obéit à leur injonction et acheta un de leurs CD à la fin de leur prestation. Il chaussa ensuite ses lunettes de soleil, glissa les cahiers sous son bras et entreprit de descendre la Cinquième Avenue.

Il ne prêta aucune attention aux hommes qui lui emboîtèrent le pas.

Remerciements

Je tiens à confesser qu’il m’arrive de visiter Wikipédia ou de surfer sur Internet pour documenter mes textes. Néanmoins, je reste convaincu qu’une mission de reconnaissance sur les lieux de l’action et l’interpellation de témoins-clés sont d’un apport autrement appréciable.

À ce titre, je tiens à remercier Guy Mazairac, médecin-urgentiste au CHU de Namur, qui a secouru le personnage de cette histoire sur le parvis de la gare et l’a baptisé X Midi. Un grand merci à Benjamin Legros, neurologue à l’hôpital Érasme, qui a prodigué les premiers soins à X Midi. Merci également à Pierre Schepens, médecin psychiatre et chef de service à la clinique de la Forêt de Soignes, qui a accueilli X Midi en son établissement et m’a permis de lui rendre visite. Enfin, ma gratitude à Marianne Parache, neurologue, spécialiste du Locked in syndrom, qui a permis à X Midi de me raconter son histoire.

J’adresse un clin d’œil à Michel, qui nous a quittés trop tôt et qui, d’où il est, se sera peut-être reconnu dans les traits de Dominique.

Pour la période rock’n’roll qui a bercé la jeunesse de X Midi, j’adresse mes félicitations à Marc Ysaye et à toute l’équipe de Classic 21, la radio rock. L’écoute assidue de leur fabuleuse station m’a permis d’agrémenter Back up d’une multitude d’anecdotes issues de l’histoire du rock.

Un grand merci à Lydie et Maxime pour leur relecture rigoureuse et leurs bons conseils.

Enfin, j’aimerais adresser un message personnel à mon éditeur ; Pierre, le message que tu m’as envoyé après la lecture de Back up figure désormais en bonne place dans mon bureau. Je ne dois plus le lire, je le connais par cœur. Merci pour cette cure de jouvence quotidienne.