François Villon
Ballades en jargon
I
A Parouart le grant mathegaudie
Ou accolez sont duppez et noirciz
Et par les anges suivans la paillardie
Sont greffiz et prins cinq ou six
La sont bleffleurs au plus hault bout assis
Pour le eviage et bien hault mis au vent
Escheques moy tost ces coffres massis
Car vendengeurs des ances circoncis
S'en brouent du tout a neant
Eschec eschec pour le fardis.
Broues moy sur ces gours passans
Advises moy bien tost le blanc
Et pictonnes au large sus les champs
Qu'au mariage ne soiez sur le banc
Plus qu'un sac n'est de plastre blanc
Si gruppes estes des carieux
Rebignes moy tost ces enterveux
Et leur monstres destrois le bris
Qu'enclaves ne soies deux et deux
Eschec eschec pour le fardis.
Ballades en jargon
Plantes aux hurmes vos picons
De paour des bisans si tres durs
Et aussi d'estre sur les joncs
Enmahes en coffres en gros murs
Escharices ne soies point durs
Que le grand Can ne vous face essorez
Songears ne soies pour dorez
Et babignes tousjours aux ys
Des sires pour les desbouses
Eschec, eschec pour le fardis.
Prince froart des arques petis
L'un des sires si ne soit endormis
Luez au bec que ne soies greffiz
Et que vos emps n'en aient du pis
E schec, eschec pour le fardis.
II
Coquillars en aruans a ruel
Men ys vous chante que gardes
Que n'y laissez et corps et pel
Qu'on fist de Collin l'escailler
Devant la roe babiller
Il babigna pour son salut
Pas ne scavoit oingnons peller
Dont l'amboureux luy rompt le suc.
Changes voz andosses souvent
Et tires tout droit au temple
Et eschiques tost en brouant
Qu'en la jarte ne soiez emple
Montigny y fut par exemple
Bien ataches au halle grup
Et y jargonnast il le tremple
Dont l'ambourex luy rompt le suc.
Gailleurs bien faitz en piperie
Pour ruer les ninars au loing
A l'asault tost sans suerie
Que les mignons ne soient au gaing
Farciz d'un plumbis a coing
Qui griffe au gard le duc
Et de la dure si tres loing
Dont l'ambourex luy rompt le suc.
Prince, arriere du ruel
Et n'eussies vous denier ne pluc
Qu'au giffle ne laissez l'appel
P our l'ambourex qui rompt le suc.
III
Spelicans
Qui en tous temps
Avances dedans le pogoiz
Gourde piarde
Et sur la tarde
Desbousez les pouvres nyais
Et pour soustenir voz pois
Les duppes sont prives de caire
Sans faire haire
Ne hault braire
Metz plantez ilz sont comme joncz
Par les sires qui sont si longs.
Souvent aux arques
A leur marques
Se laissent tous desbouses
Pour ruer
Et enterver
Pour leur contre que lors faisons
La fee les arques vous respons
Et rue deux coups ou trois
Aux gallois
Deux ou trois
Nineront trestout au frontz
Pour les sires qui sont si longs.
Et pour ce bevardz
Coquillars
Rebecquez vous de la montjoye
Qui desvoye
Vostre proye
Et vous fera du tout brouer
Par joncher
Et enterver
Qui est aux pigons bien chair
Pour rifler
Et placquer
Les angelz de mal tous rons
Pour les sires qui sont si longs.
De paour des hurmes
Et des grumes
Rasurez voz en droguerie
Et faierie
Et ne soiez plus sur les joncs
P our les sires qui sont si longs.
IV
Saupicquez frouans des gours arquez
Pour desbouses beaus sires Dieux
Alles ailleurs planter voz marques
Bevards vous estes rouges gueux
Berart s'en va chez les joncheurs
Et babigne qu'il a plongis
Mes freres ne soiez embraieux
Et gardez les coffres massis.
Si gruppes estes des grappez
De ces angelz si graveliffes
Incontinant mantheaulx et chappes
Pour l'emboue ferez eclipses
De vos farges feres besifles
Tout debout nompas assis
Pour ce gardes d'estre griffez
En ces gros coffres massis.
Niaiz qui seront attrappez
Bien tost s'en brouent au halle
Plus n'y vault que tost ne happes
La baudrouse de quatre talle
Destires fait la hirenalle
Quant le gosier est assegis
Et si hurcque la pirenalle
Au saillir des coffres massis.
Prince des gayeuls les sarpes
Que vos contres ne soient greffiz
Pour doubte de frouer aux arques
G ardes vous des coffres massis.
V
Joncheurs jonchans en joncherie
Rebignez bien ou joncherez
Qu'Ostac n'embroue vostre arerie
Ou accoles sont voz ainsnez
Poussez de la quille et brouez
Car tost seriez rouppieux
Eschec qu'accolez ne soies
Par la poe du marieux.
Bendez vous contre la faerie
Quant vous auront desbouses
N'estant a juc la rifflerie
Des angelz et leurs assoses
Berard si vous puist renversez
Si greffir laisses vos carrieux
La dure bien tost ne verres
Par la poe du marieux.
Entervez a la floterie
Chanter leur trois sans point songer
Qu'en astes ne soies en surie
Blanchir vos cuirs et essurgez
Bignes la mathe sans targer
Que voz ans n'en soient ruppieux
Plantes ailleurs contre assegier
Par la poe du marieux.
Prince bevardz en esterie
Querez couplaus pour ramboureux
Et autour de vos ys luezie
P ar la poe du marieux.
VI
Contres de la gaudisserie
Entervez tousjours blanc pour bis
Et frappes en la hurterie
Sur les beaulx sires bas assis
Ruez des fueilles cinq ou six
Et vous gardes bien de la roe
Qui aux sires plante du gris
Et leur faisant faire la moe.
La giffle gardes de rurie
Que voz corps n'en aient du pis
Et que point a la turterie
En la hurme ne soies assis
Prens du blanc laisse du bis
Ruez par les fondes la poe
Car le bizac avoir advis
Fait aux beroars faire la moe.
Plantez de la movargie
Puis ca puis la pour l'urtis
Et n'espargne point la flogie
Des doulx dieux sue les patis
Voz ens soient assez hardis
Pour leur advancer la droe
Mais soient memoradis
Qu'on ne vous face faire la moe.
Prince qui n'a bauderie
Pour eschever de la soe
Danger de grup en arderie
F ait aux sires faire la moe.
VII
En Parouart, la grant matte gaudye
Ou accolez sont caulx et agarciz
Nopce ce sont, c'est belle melodie:
La sont beffleurs au plus hault bout assis,
Et vendengeurs, des ances circoncis
Comme servis, sur ce jonc gracieux,
D'ance plaisant et mes delicieux.
Car Coquillart n'y remaint grant espace
Que, vueille ou non, ne soit fait des sieurs;
Mais le pis est mariage – M'en passe!
Reboursez tous, quoy que l'en vous en dye,
Car on aura beaucoup de vous mercys.
Ronde n'y vault ne plus qu'en Lombardie.
Eschec, eschec pour ces coffres massis!
De gros barreaulx de fer sont les chassis.
Poste a Gautier e serez un peu mieulx.
Plantez picons sur ces beaulx sires dieulx;
Luez au bec que roastre ne passe,
Et m'abatez de ces grains neufz et vieulx.
Mais le pis est mariage – M'en passe!