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Elle le foudroya du regard puis détourna les yeux et se contraignit à respirer plus lentement pour se maîtriser. « Vous ne voyez aucun moyen ? »

Drakon eut le plus grand mal à dissimuler la surprise que lui valait son désappointement. L’aurait-il déçue ? Se serait-elle attendue à ce qu’il sorte d’autres forces mobiles de son chapeau pour sauver Midway ? « Je connais quelques principes de base sur les méthodes de combat. L’un d’eux affirme qu’opposer sa faiblesse, ou même sa puissance, à la force de l’ennemi est une erreur, et qu’il est toujours préférable d’opposer sa puissance à la faiblesse de l’ennemi.

— Comment cela pourrait-il s’appliquer ici ?

— Pas moyen. Des forces terrestres ne sauraient affronter des forces mobiles que si celles-ci se présentaient à elles et s’offraient à leurs tirs, et il n’y a aucune raison pour… » Il s’interrompit et chercha pourquoi cette dernière déclaration lui semblait si importante.

« Général ? interrogea Iceni en le scrutant.

— Madame la présidente, répondit Drakon en articulant très lentement tout en s’efforçant de mettre mentalement le doigt sur une idée qui s’obstinait à lui échapper, comment s’y prendra ce croiseur de combat pour tenter de s’emparer de notre cuirassé ?

— Il n’y a qu’une seule méthode, répondit Iceni. Envoyer une équipe d’abordage. Assez forte pour venir à bout de l’équipage restreint du cuirassé.

— Au moyen de navettes ?

— Non. Un croiseur de combat ne possède que quelques navettes. Elles ne suffiraient pas à convoyer assez d’assaillants. En outre, si le cuirassé disposait d’au moins quelques armes opérationnelles, ces navettes feraient des cibles faciles.

— Nous nous sommes pourtant servis de navettes pour capturer le cuirassé à Kane, fit observer Drakon.

— Et nous redoutions déjà qu’elles ne fussent détruites à leur approche, ajouta Iceni en frappant le dessus de la table de l’index pour ponctuer ses paroles. Nous nous en sommes servis parce que c’était nécessaire, mais nous savions aussi que nous risquions de les perdre. Je n’aurais certainement pas choisi cette méthode si j’avais été en mesure de lancer une attaque depuis mes vaisseaux plutôt qu’avec quelques navettes.

— Il faut donc une force capable de submerger très vite l’ennemi ?

— Oui. Exactement. Est-ce si différent des opérations des forces terrestres ?

— Non. » Drakon réfléchit un instant, le regard dans le vague. « Je n’ai jamais participé à un abordage. Continuez de me guider. Comment réagira le croiseur de combat ? »

Iceni haussa les épaules. « C’est assez simple en l’occurrence. Le cuirassé ne dispose ni d’armes opérationnelles ni d’un équipage assez nombreux pour le manœuvrer. Fuir serait stupide puisque le croiseur de combat le rattraperait sans peine. Le croiseur se rangera donc le long de son flanc et épousera tous ses mouvements, de sorte que les deux vaisseaux seront immobiles l’un par rapport à l’autre. Puis une équipe d’abordage franchira d’un bond l’écart qui les sépare, investira simultanément plusieurs des écoutilles principales, pénétrera dans le cuirassé par ces sas et submergera ses défenses. Le kapitan-levtenant Kontos et son équipage pourront certes se terrer dans les citadelles défensives de la passerelle, de la propulsion et de l’armement, mais les assaillants seront équipés de moyens permettant de les enfoncer en un très bref délai.

— Très près ? questionna Drakon. De quelle largeur, cet espace entre les deux bâtiments ?

— Une cinquantaine de mètres. Voire une centaine, selon la disposition du commandant du croiseur de combat à prendre des risques.

— Et de quelle importance l’équipe d’abordage ? »

Iceni écarta les bras. « Tout dépend. L’équipage d’un croiseur de combat se compose d’environ quinze cents personnes. La doctrine syndic en la matière fixe sans doute la composition d’une équipe d’abordage en fonction de la cible et de son état mais limite son nombre à la moitié de celui de l’équipage.

— Sept cents ? Huit cents au maximum ?

— Si du moins Haris se conforme au manuel. »

Malin avait compris où Drakon voulait en venir. Il afficha un mince sourire. « Sept cents commandos des forces mobiles en combinaison de survie et équipés d’armes de poing ?

— Ouais, fit Drakon. Dont peut-être quelques-uns des forces spéciales, mais ça ne représenterait au plus que deux pelotons.

— Un seul, rectifia Iceni. Et plus vraisemblablement des serpents de Haris que des soldats des forces spéciales. À quoi songez-vous, général ?

— Je suis en train de me dire, madame la présidente, que, si ça devait se solder par une opération d’abordage, nous aurions alors affaire à une situation où les forces terrestres pourraient bien rétablir l’équilibre. » Drakon se pencha. « Si ce cuirassé avait fait le plein en personnel des forces mobiles, nous ne pourrions pas y entasser des gens des forces terrestres en cuirasse de combat. Mais il est pratiquement désert. Il y a de la place pour des soldats. Et, si ce croiseur de combat peut faire franchir l’espace entre les deux vaisseaux à son équipe d’abordage, mes fantassins peuvent parfaitement faire de même en sens inverse.

— Ce n’est pas simple. » Iceni se mordit les lèvres, le regard calculateur. « Mais ça reste jouable. Les gens de mes forces mobiles peuvent exposer aux vôtres les défenses dont disposerait un croiseur de combat dans le cas d’une telle contre-attaque. Il faudrait également que ce soit une surprise complète. Le croiseur de combat devra ignorer qu’un grand nombre de nos soldats les guettent sur le cuirassé.

— Six jours. » Drakon se tourna vers Malin. « Ça peut se faire ? Pouvons-nous embarquer un nombre conséquent de fantassins à bord du cuirassé avant que la flottille de Haris ne s’en approche assez pour observer nos préparatifs ? »

Malin effectua mentalement quelques opérations, le regard voilé, puis il hocha la tête. « Je vais devoir obtenir la confirmation de mon évaluation, mon général, mais nous devrions y arriver, du moins si nous réussissons à placer assez vite nos gens en orbite. Un cargo aménagé en transport de passagers se prépare à partir en ce moment même. Si les vaisseaux de la présidente voulaient bien lui signifier de retarder son départ, nous pourrions l’utiliser. »

Iceni se tourna vers Togo. « Préviens le centre de contrôle orbital que le cargo doit rester en orbite. » Elle pivota de nouveau vers Drakon. « Vous n’avez aucune expérience des opérations d’abordage, n’est-ce pas ?

— Aucune. M’est avis pourtant que nous devrions tenter ce stratagème et m’en laisser malgré tout le commandement. »

Iceni baissa la tête, les coudes en appui sur la table et le front reposant contre ses poings. Elle garda le silence un instant. « Parce que c’est notre dernière chance ou parce que ça pourrait marcher ? finit-elle par lui demander.

— Ce n’est pas notre seule option. Comme l’a fait observer le colonel Malin, nous pourrions encore faire exploser les deux vaisseaux. Mais il me semble qu’une manœuvre destinée à contrecarrer l’abordage pourrait réussir. Si ce que vous m’avez dit de la façon dont s’y prendrait le croiseur de combat est exact, ça vaut la peine d’essayer.

— Et si Haris cherche seulement à détruire notre cuirassé ? »

Drakon rumina la question. La perspective ne l’enchantait guère. « Nous serions cuits.

— Nous le perdrions, avec tous ceux qui seraient à bord. L’équipage, les fantassins et leur commandant sur le terrain. Nous ne pouvons pas nous permettre de vous perdre, général. »