Certains, en revanche, mesurent très bien ce que peut leur apporter la première dame. Le 30 juin, la marque Weekday, propriété du groupe H&M, éditait un T-shirt et un tote bag en son honneur. Le design ? « Brigitte », imprimé en rouge ou noir sur du coton blanc. « L’idée est née comme une réponse à l’engouement autour de Mme Macron[10] », explique l’attaché de presse de l’enseigne. Résultat ? Une razzia en règle dans la boutique parisienne, plus importante encore que lorsque la même opération avait été consacrée à Beyoncé. Appelez-la Brig’Hit ? « C’est vrai que cela a été un succès commercial et nous continuons à avoir des demandes quatre mois après son lancement. »
Une cote que mesure également Amandine Lalizou. Au soir du premier tour de l’élection présidentielle, cette jeune femme a eu l’idée de créer avec un ami la marque We love Brigitte. « Nous nous étions pris d’affection pour elle pendant la campagne, notamment à cause de toutes les attaques qu’elle a subies », nous raconte-t-elle. « De plus, nous avons pensé qu’elle avait un vrai potentiel iconique[11]. » Trois mois plus tard, les deux associés lancent T-shirts et sweats ornés de messages comme « Et la France créa Brigitte » ou « Bribri First Lady ». Des pièces qu’ils commercialisent sur le site www.brigittemacron.com : les équipes d’En Marche ! n’avaient visiblement pas songé à déposer le nom de domaine… « Cela marche très bien », reprend la fondatrice. « Nous nous sommes même rendu compte qu’elle a une communauté de fans à l’étranger ! Nous recevons notamment énormément de mails d’Italie et du Japon. »
Mais c’est toutefois chez elle que Brigitte Macron fait le plus recette. Dans son fief du Touquet, on se frotte les mains d’être associé au couple présidentiel. Car l’avenue Saint-Jean a beau être commerçante, on n’avait jamais vu une telle affluence avant l’élection d’Emmanuel Macron. Eh oui, chacun veut sa photo souvenir devant le numéro 14. « Il paraît que Brigitte continue de venir souvent », nous lancent deux touristes belges, après s’être fait immortaliser par l’un des CRS chargés de protéger la villa Monéjan. « Bon, elle n’a pas l’air d’être là aujourd’hui, mais on aura au moins vu la bicoque. » Ce jour-là comme tant d’autres, ils n’étaient pas seuls à faire le pied de grue devant la jolie maison de ville avec jardin, au cœur du triangle d’or de la cité balnéaire. Depuis l’été, un tour operator y emmène même des cars de retraités, le temps de quelques clichés… Le comité d’accueil est donc assuré au cas où les Macron décideraient de débarquer à l’improviste.
Mais le selfie n’est pas l’unique must have du Touquet présidentiel. En bas de la maison des Macron, la boutique Cape Cod, locataire de leur ancien garage, surfe sur la notoriété de ses illustres voisins (et propriétaires). Ses produits phares ? Le T-shirt et le sweat floqués d’un « Le Touquet City of President », qui s’arrachent pour 39 et 80 euros respectivement. « On avait eu l’idée d’en éditer quelques pièces début juin, au moment de la Pentecôte. En un week-end, tout est parti[12] », se réjouit la responsable du magasin, Christine Bigot. Brigitte, l’une de leurs bonnes clientes, ne s’est pas fait ce petit plaisir, mais le stock s’écoule sans elle. « Maintenant, on nous appelle même d’Angleterre et de Belgique pour nous en commander ! » Un filon qu’exploite aussi la boutique de souvenirs Autre Chose, dans la même rue. Le maître des lieux, Jean-Marc Monteuuis, ne voit plus ces temps-ci les Macron, qui y avaient leurs habitudes avec leurs petits-enfants. Mais il a su compenser la baisse de chiffre d’affaires… « Mon magasin n’étant pas loin de leur maison, l’élection m’a boosté. Des dessous-de-plat que je vendais déjà ont eu beaucoup de succès car on y voit leur villa. Et j’ai édité des T-shirts “Paris-Élysée – President-House – Le Touquet”. Je prévois aussi de lancer des accessoires et des cartes “Le Touquet, ville présidentielle”. » Sans oublier ses boules à neige à l’effigie du chef de l’État, qui ont fait un carton. « On n’a jamais eu autant de monde ! Il faut en tirer profit[13]. » Non loin de là, rue de Paris, les propriétaires de la maison de la presse auraient aimé en prendre leur part. Manque de bol : Emmanuel Macron n’a pas voulu venir y dédicacer Révolution, comme ils l’avaient demandé à Brigitte. Mais le livre a été mis bien en évidence, sur une table au centre de la boutique.
Une affluence que l’on est ravi de gérer dans tous les endroits qu’ont fréquentés les Macron, du salon de thé le Fiftea’s Room aux Mignardises du Touquet, en passant par Petit Bateau, juste à côté de leur maison. Sans oublier bien sûr l’incontournable café des Sports. À l’autre bout de la rue Saint-Jean, juste après le Philae Café (un hommage à François Hollande et son labrador ?), l’établissement est une institution locale… Mais il est désormais surtout connu comme le QG du couple. « L’effet Macron ? Cela représente environ 15 % en plus, estime le patron, Gilbert Fauquembergue. Beaucoup de clients demandent leur table, la 10, et commandent des crevettes grises comme ils le font souvent. Mme Macron continue à venir. Elle ne fait aucun cinéma, accepte les selfies… Elle est très populaire ici[14]. » La preuve par l’image quelques instants plus tard : en sortant, nous croisons une passante portant un T-shirt marqué d’un très trendy « Manu & Bribri »…
La première dame est-elle l’heureuse propriétaire de l’une de ces pièces à son nom ? A priori, non… Mais une chose est sûre : si elle l’avait portée en public, nous serions au courant. Car aucun de ses looks n’est laissé sans décryptage, dans la presse féminine mais aussi généraliste, comme sur Instagram. « The Brigitte Style », « Brigitte Macron Fashion », « Brigitte Macron Fan »… Ou encore « Brigitte C’est Chic », un compte suivi par Valérie Trierweiler, et dont le but est de détourner chaque photo de l’épouse du président pour en faire la muse de Carine Roitfeld, la directrice artistique de Versace, ou la nouvelle égérie du Crazy Horse… Si Brigitte Macron n’est pas inscrite sur le réseau social, elle y est pourtant bien présente. « Elle mérite qu’on lui dédie entièrement un compte ! justifie Léa Darmau, qui a créé la page “Brigitte Macron France”. Les retours sont très positifs. Elle a des fans dans le monde entier, comme je m’en suis rendu compte dans les commentaires[15]. » Son allure est aussi vantée par les grands noms de la mode. Karl Lagerfeld lui attribue les « plus belles jambes de Paris », Olivier Rousteing, alias Monsieur Balmain, se dit « très fier » de l’habiller et Alexandre Vauthier loue son « style français ». Ne nous manque que l’avis d’Anna Wintour, qui mûrit sans doute ses louanges après leur rencontre à l’Élysée le 3 juillet 2017, lors de la Fashion Week parisienne.
Il faut dire que Brigitte Macron travaille son style. Et ce, depuis toujours. Mais elle est désormais passée dans une autre sphère, notamment grâce à deux conseillers privilégiés. Le premier s’appelle Mathieu Barthelat Colin. Ce discret styliste a aussi bien vêtu les candidats de The Voice qu’Éric et Quentin de « Quotidien »… Et dorénavant Brigitte Macron, depuis qu’elle s’est alloué ses services après l’élection. Une aide « à titre bénévole » selon son cabinet, qui semble voir arriver la controverse de loin. « Il n’est pas quotidiennement à l’Élysée. Elle avait bien essayé d’aller en boutique pour acheter des chaussures, mais tous les curieux prenaient ses pieds en photo[16] ! » Son autre coach ? Elle est relativement bien placée dans le secteur de la mode… Il s’agit de son amie depuis Bercy, Delphine Arnault. Fille de (Bernard Arnault), compagne de (Xavier Niel) mais surtout patronne de (Louis Vuitton). C’est elle qui lui aurait suggéré de faire confiance au directeur artistique de l’enseigne, Nicolas Ghesquière. Aussitôt dit, aussitôt fait : après avoir porté quelques-unes de ses créations, Brigitte allait déclarer sa flamme au designer, au terme de son défilé du 9 mars 2016. Lui glissant au passage qu’elle était déjà cliente lorsqu’il œuvrait chez Balenciaga. « Elle est sympathique, drôle, intelligente, accessible et sensible[17] », s’extasie-t-il, ravi d’avoir pu la looker pendant toute la campagne. Il lui a même dessiné spécialement une tenue pour la passation de pouvoir. Des vêtements qu’elle achète ou rend, s’empresse-t-on encore de préciser dans son entourage… Cela n’empêchera pas les critiques de se déchaîner le 14 mai 2017. En cause, son sac du jour, un Capucine de la griffe monogrammée, à 3 950 euros. Serait-il plus dangereux d’être en marque qu’En Marche ! ? Les polémiques sur son style l’ont parfois prouvé. Brigitte Macron rétorque vouloir se faire l’ambassadrice de la couture française, et se dit « protégée » par ses tenues de créateurs… Mais elle se trouve désormais dans l’œil du cyclone.
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Cité dans un article de