Reste à savoir si le « phénomène Brigitte Macron » est parti pour durer. Oui, répond sans hésitation Nathalie Rozborski, directrice générale de l’agence de tendances NellyRodi. « Elle est pour moi la chef de file d’un mouvement plus profond. On a longtemps confondu modernité avec jeunesse mais sa popularité fait bouger les lignes. Et les Macron forment un binôme très ancré dans l’air du temps à la fois par leur pragmatisme, par la singularité de leur couple et par la transparence qu’ils ont mise dans le récit de leur histoire[27]. » Une forme de « réalité augmentée », comme nous l’explique la spécialiste. « C’est un véritable power-couple : ils sont très liés d’un point de vue intellectuel et leur influence l’un sur l’autre est indiscutable. » Brigitte Macron s’impose donc comme une première dame transgressive par son histoire, « et en même temps » rassurante par son âge. Intello dans ses lectures, « et en même temps » hautement terre à terre selon ses proches. Toujours souriante en public, « et en même temps » très cash en privé. C’est sûr, ces deux-là se sont bien trouvés…
CONCLUSION
Ce 13 novembre 2017, elle n’a pu retenir ses larmes. La France commémore les attentats de Paris et, devant le Bataclan, Emmanuel Macron rencontre des familles de victimes. Saluant à sa suite, Brigitte est submergée par l’émotion. Le masque grâce auquel elle éludait ses propres drames dans l’enfance est parfois difficile à maintenir. Et celle qui confie avoir découvert la souffrance des autres pendant la campagne continue d’en prendre la mesure. Elle admet d’ailleurs se sentir impuissante face à des douleurs de cette ampleur, et peu préparée à y répondre.
Pourtant, elle ne cesse de le dire : elle désire préserver ce lien avec les Français. Elle en sera même la garante, atout d’un chef de l’État souvent perçu comme froid. Il peut compter sur elle pour l’épauler, et être constamment à ses côtés. D’ailleurs, personne ne s’y trompe. Lorsque le musée Grévin entame la fabrication de la statue du président, Brigitte Macron est sollicitée pour y faire son entrée avec lui. Ce serait une première pour une First Lady. « Nous souhaitons les avoir ensemble car ils forment un couple très fort, lié par une jolie histoire[1] », nous explique la directrice des relations publiques, Véronique Berecz. Stéphane Bern, président de l’académie Grévin, est bien de cet avis… En cire comme en marche, sa place est donc à la droite du président. Elle semble vouloir y dessiner un rôle inédit.
Sa popularité devait l’y autoriser mécaniquement, mais cela paraît plus compliqué que prévu. Le refus d’une large partie de l’opinion de lui accorder un vrai statut l’a bien prouvé. Les critiques dont elle reste la cible le démontrent aussi. Elle est ainsi en première ligne à chaque débat de société. Ils ont été intenses en ce début de quinquennat et les attaques envers Brigitte Macron le furent tout autant. Lorsque, le 25 novembre 2017, le président a indiqué vouloir établir l’âge du consentement sexuel, et le fixer à quinze ans, les réactions se sont focalisées sur son épouse. Sur les réseaux sociaux, beaucoup, raillant cette annonce, accusaient l’ex-prof de détournement de mineur. Voilà un refrain qu’elle connaît, et qu’elle parvient désormais à ignorer, d’après son entourage.
« Les milliers de courriers reçus, les témoignages de sympathie dans la rue la touchent plus que cela… », assure-t-on au sein de son cabinet. Pour limiter les controverses, elle a de toute façon réduit sa communication au minimum. « Elle ne peut pas être muselée ! », clamaient pourtant ses proches. Mais sa priorité est de ne pas gêner cette présidence qu’elle a, elle aussi, arrachée. « Elle a tout intérêt à rester très silencieuse et à se montrer discrète, analyse le sociologue des médias Jamil Dakhlia. Des interventions fréquentes, avec un tour trop politique, poseraient la question de sa légitimité[2]. » Ses prises de parole sont donc rares. En outre, ses équipes cantonnent officiellement son rôle à des missions de « recherche », à une sorte d’audit de la société française pour le compte de l’Élysée.
L’ampleur plus large de son pouvoir ne fait toutefois guère de doute, du moins dans divers sondages. Le 12 novembre, elle obtenait par exemple la deuxième place du classement des Françaises les plus influentes, réalisé par Le Journal du dimanche. Seule la directrice du FMI, Christine Lagarde, l’y devançait. Dix jours plus tard, c’est Vanity Fair qui la propulsait parmi les Français les plus influents du monde – à la troisième marche du podium après Xavier Niel et Zinedine Zidane. « Le couple qu’elle forme avec Emmanuel Macron et son allure fascinent les médias étrangers », jugeait le mensuel. Rue du Faubourg-Saint-Honoré, son empire est autrement plus concret. La jalousie de certains conseillers en atteste. « Ils ont de la chance, tous ces hommes, qu’elle ne veuille pas entrer en politique, je vous le dis ! », nous avait lancé l’un de ses amis. Elle en fait pourtant déjà, à sa façon : souriante, empathique, mais redoutablement décidée.
REMERCIEMENTS
À tous ceux qui ont accepté de me parler de Brigitte Macron. Mille mercis pour vos anecdotes et précieux éclairages :
Abdel Aïssou, Jean-Louis Beaucarnot, Véronique Berecz, Juliette Bernard, Philippe Besson (pour Closer), Arnaud de Bretagne, Jeannine Briard, Pascal Bruckner, Olivia Cattan, Jamil Dakhlia, Léa Darmau, Sarah Da Silva Gomes, Bertrand Delais, Sébastien Deletoille, Delphine Delord, Jean-Baptiste Deshayes, Ahmed Eddarraz, Cédric Étévé, Gilbert Fauquembergue, Maryse Gérard, Natacha Harry, Bruno Jeudy, Antoine Joannes, Amandine Lalizou, Béatrice Leroux, Mathieu Magnaudeix, Sophie de Menthon, Jean-Marc Monteuuis, Philippe Moreau Chevrolet, Adrien Naselli, Claire Pasquier, Laurence Pieau, Ellie Pithers, Nathalie Rozborski, François Ruffin (pour Closer), Michèle Sabban, Adam Sage, Marlène Schiappa (pour Closer), Robert Schneider, Mickaël Thomas, Patrick Toulmet, Simone Uhl, Christine Ulivucci, Thierry Paul Valette, Justin Vogel, Jean-Paul Voltz. Sans oublier tous ceux qui ont préféré rester anonymes.
Un immense merci à Michel Taubmann, pour son soutien constant et ses si nombreux bons conseils. Ainsi qu’à Jean-Daniel Belfond, pour sa confiance, Pauline Lépinay, pour son écoute patiente, et l’équipe des Éditions de l’Archipel.
À la rédaction de Closer, pour les encouragements quotidiens, revues de presse, coaching sur post-it et autres déchiffrages d’articles en allemand.
À mes deux correcteurs marseillais, pour leur relecture aussi obsessionnelle qu’appréciée.
Insert Photo
