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— C’est bien lui. D’abord elle a été choquée, puis en y regardant mieux … Il fume des cigarillos. Un détail qu’elle avait omis.

Michael était moins sous le coup que son chef.

— Un type formidable tout de même ! Une cloche à Seattle, un patron élégant et mystérieux ici. À lui seul il dirigeait tout un réseau. Il devait également pointer ses livraisons de carburants spéciaux, surprendre ainsi le secret de certaines usines.

Il avait raison. Un type insignifiant, d’apparence inoffensive et qui gardait ses mégots dans une boîte ronde.

— Que faisons-nous, patron ?

— Il y a un avion pour Seattle dans la nuit. On va le prendre dit Kovask. Je suppose que vous avez faim ?

Michael n’osait l’avouer.

— Allons bouffer.

Quand ils arrivèrent à Seattle ils furent tout de même surpris de voir Helliot et Shelby qui les attendaient. Les deux hommes étaient au courant de l’échec de Sacramento, puisque Kovask avait ensuite téléphoné au commodore.

Shelby paraissait surexcité.

— Un truc épatant ! dit-il. La jeune femme est retrouvée. Dans le W905.

Kovask le regardait incrédule.

— On a arrêté le convoi, séparé le wagon. Il contenait simplement de l’essence ordinaire. On a vidangé pour constater que le liquide ne pouvait remplir que la moitié de la place disponible.

C’était à peine croyable, et Kovask eut l’impression que sa langue s’épanouissait.

— Voulez-vous dire que Mrs Gann était dans un compartiment étanche au milieu de cette essence ?

CHAPITRE XIII

C’était à peine l’aube et Kovask avait sommeil. Il avait lutté durant tout le voyage, mais arrivé au but il n’en pouvait plus. Michael n’était guère plus brillant, encore qu’il parût surexcité. Shelby et Helliot avaient ronflé dans l’avion.

— Bien content de venir dans la cité des roses ! Dites donc, on n’est pas très éloigné du Festival qui se donne en ce mois, bâilla Michael.

Alberta Gann avait été prise en charge par la Navy et transportée à l’hôpital maritime. Elle dormait sous l’effet des piqûres. Le commander qui les reçut avait assisté au découpage du wagon.

— Une fois vidé de son essence, on a opéré des sondages et on a découvert l’espèce de cage au milieu. Trois mètres de large, deux de haut et quatre de profondeur. Un système habile de ventilation. Avant de pouvoir découper au chalumeau il a fallu sécher la citerne, chasser les vapeurs qui pouvaient exploser. Un boulot du tonnerre de Dieu ! Heureusement fait par les meilleurs spécialistes des constructions navales. Ils ont l’habitude de travailler dans les bateaux-citernes.

— Comment était cette cage ? demanda Kovask.

— On peut aller la voir. On se croirait dans un cadre de déménagement.

Les quatre hommes hochèrent en même temps la tête.

— La jeune femme était à la limite de l’épuisement. Elle s’apprêtait à percer l’enveloppe étanche de cette sorte de cellule. Heureusement qu’elle n’avait que des moyens limités. Elle aurait été immédiatement engloutie par le liquide. Le fait que ce soit de l’essence n’aggravait pas la chose. Même de l’eau lui aurait été fatale. Il y en avait suffisamment au-dessus de sa tête pour emplir sa prison. Tout était bien calculé.

Le wagon était en route pour Seattle et devait y parvenir d’ici une dizaine de jours.

— Ce wagon devait se balader d’un point à un autre sans jamais être vidé évidemment. De temps à autre Herman ou Maner comme vous voulez, devait le vidanger.

— Peut-être dans la fosse qui a servi de tombe à ce pauvre Gann.

— Peut-être, continua Kovask. Le wagon devait arriver avec d’autres à la W.T.C. et il s’arrangeait pour le faire passer dans l’entrepôt voisin. Quand le ravitaillement était terminé, il le ramenait avec un locomoteur jusqu’à la rame qui quittait les lieux le lendemain matin, et personne n’y faisait attention. Tout se passait de nuit et les seules fois où aucune équipe n’était sur place. Helliot nettoyait ses lunettes.

— Vous croyez que Gann a été liquidé parce qu’il avait découvert l’existence de cet entrepôt voisin ?

— Je ne sais pas, dit Kovask. C’est bien possible.

Le chef du F.B.I. soupira :

— Il a un complice à Seattle. Un type drôlement habile et certainement chargé de surveiller les activités d’Herman. Il l’a liquidé au bon moment, puis sachant que Maner et Herman étaient le même homme, je ne vois pas pourquoi la découverte de Gann l’aurait inquiété. En admettant même que nous retrouvions la jeune femme, ce qui vient d’arriver aujourd’hui, le réseau s’en fout bien. Le meurtre de Gann ne s’explique pas très bien.

Le raisonnement se tenait.

— Vous pensez que c’était tout autre chose que cet entrepôt qu’avait découvert l’instituteur ?

— Oui. Un truc qui nous a échappé. Il nous faudra revenir là-bas et chercher encore.

Kovask pensait à la jeune femme qui dormait, enfin libre et sous contrôle médical. Elle ignorait que son mari était mort dans des conditions assez atroces.

— Venez donc voir ce wagon, dit le commodore Shelby.

Leur guide les entraîna jusque dans la partie la plus déserte de l’arsenal.

— Nous ignorions comment on communiquait avec la cage, expliqua-t-il. Ce n’est qu’ensuite que nous avons découvert qu’il fallait abaisser le niveau du liquide, se glisser à l’intérieur du cadre par le haut.

L’admiration perçait dans sa voix.

— Les joints d’étanchéité invisibles et efficaces ont parfaitement résisté. Les gars qui ont effectué ce travail s’y connaissaient. Il est difficile d’évaluer la dépense totale.

Shelby se tourna vers Kovask.

— Plus que jamais j’ai la certitude que cette prison roulante était destinée à une haute personnalité, et que la jeune femme a servi de cobaye. Si ces gens-là se sont mis dans la tête d’enlever un général ou un homme politique important, qui aurait eu l’idée d’aller le chercher dans l’un des wagons-citernes qui roulent nuit et jour sur le réseau.

Tout un côté du cylindre avait été découpé. Dans le petit jour blême ils pouvaient distinguer le cube intérieur.

— Le cadre est doublé d’aluminium. Avant de l’attaquer il nous a fallu trouver le système de ventilation, pour essayer de communiquer avec la jeune femme, mais une série de filtres empêchaient nos paroles d’arriver au but. Nous avons alors frappé contre la paroi du cadre et la jeune femme nous a répondu. Elle avait compris que la masse isolante du liquide n’était plus là. Évidemment l’émotion, l’air libre ont eu raison d’elle, mais à première vue elle avait une volonté peu commune.

Malgré tout, l’ensemble empestait l’essence et ils s’abstinrent de fumer. Le commander les fit pénétrer dans le cadre. Celui-ci contenait une couchette, une petite table et un tabouret.

— Évidemment ni moyen de chauffage ni de réchaud. Un W.C. chimique dans ce placard. Ici des provisions, là le réservoir d’eau potable. Les eaux usées, de même que le trop-plein de W.C., se déversaient dans un réservoir inférieur que votre gars de Seattle devait vidanger chaque fois que le wagon lui revenait.

Ce qui confirmait la découverte du carbonate de soude entre les voies de l’entrepôt Maison.

— Elle pouvait crier, taper contre les murs. La masse de liquide tamisait les sons. Son seul recours aurait pu être le système de ventilation, mais les filtres étaient hors de sa portée. Elle ne disposait comme objet métallique que d’un ouvre-boîte. Et ce dernier est d’un modèle perfectionné à roulette tranchante. Inutilisable pour creuser dans le bois.