— N’empêche, ajoute-t-il, ton Euréka, j’l’eusse point cru pareillement influenza. D’la part d’un nègre, j’sus d’accord ; mais d’une Danoise aussi blonde et fraîche, j’donne ma langue !
Marika a laissé choir son arc de mort. Elle a repris sa place dans un fauteuil, toute cassée, chenue, quasi vieille. Meurtrie dans son essence, ses instincts, sa passion.
Moi je me réfugie dans l’embrassure de la fenêtre. J’ai le guignol qui me fait mal et la gargane nouée si serrée que je pourrais pas y faire passer la moindre goutte de liquide quand bien même ce serait du Château Yquem ! Une formidable désilluse m’a chopé ! Viscérale, sentimentale. Je sais bien que ça n’est pas sa faute, à ma Merveilleuse, si elle s’est révélée spontanément parfait médium au contact de Satana. N’empêche que le charme est rompu, nous deux. Quelques chose de formide vient de finir. C’est une espèce de faillite, tu comprends ? La vie est garce !
Je distingue des ombres dans le parc. Je reconnais une escouade de gendarmerie, ce fleuron des polices ! Le Vieux, inquiet, a donné l’alarme.
Ils ont évacué le mort (Satana) et les blessés (Dutalion et le nain, plus Marika pour sa commotion cérébrale). Au premier, ils ont découvert une espèce de chambre des tortures « régentée » par un immense demeuré, chauve, sourd et muet. C’est à cet être exquis que me conduisait ma tendre compagne, tout à l’heure !
Le Dabe plastronne. Plumes de paon plein son vieux cul !
Il roule, dirige, explique, commande, commente, indique, précise. Il a tout fait, tout décidé. À lui the victory !
Grand bien lui fasse, je ne songe pas à la lui contester.
À l’issue, il veut tous nous emmener souper à son club. « Même Blanc », précise-t-il. Mlle Zouzou insiste pour qu’on accepte, mais nous refusons. Je prétends la fatigue. M’man qui n’est pas très bien ces jours, avec ce temps d’automne, presque d’hiver, et qui m’attend. M. Blanc plaide Ramadé : c’est la fin du grosso modo du Lion et ils doivent procéder à une cérémonie nocturne avec les mômes. Quant au Gros : il tourne demain un film de cinéma en compagnie de sa femme. Faut qu’ils soivent en forme, les deux. On lui a expliqué le scénar : fumant ! D’après ce qu’il nous raconte, il s’agirait d’une adaptation érotique de Chantecler d’Edmond Rose-Tendre. Les animaux qui partouzent entre eux. Béru doit interpréter le cochon lubrique et Berthe la truie en chaleur.
Allons, Sana ! Du nerf ! Je désenchantais trop vite : la vie n’est pas si mal faite que ça !