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— No inglés.

— Parlez-vous français, alors, et par bonheur ? demandé-je dans ma langue maternelle.

— No francés.

— Voilà qu’est glandoche, mes toutes belles, soupiré-je, vu que je ne suis pas polygotte et qu’excepté ces deux dialectes, je ne comprends que le monégasque moderne, le québécois, le wallon et le romand. Seriez-vous espagnoles, par hasard ?

Je répète en les désignant d’une main qui se retient d’être préhensile.

— Espagnoles. Olé !

On dirait que je viens de marcher sur leurs robes.

— No Espanhola ! Brasileira ! se rebiffe la beauté.

Des Brésiliennes.

Moi, vous me connaissez ! Plus flic qu’un troupeau de bourriques ! Tout de suite je cherche les corrélations, les croisements de détails… La victime de Huret qui s’est suicidée, le dénommé Otto Buspériférick, était un ancien diplomate brésilien. Sur le billet d’avion de mon détrousseur de coffiots, il y avait une réservation Londres-Lisbonne. Lisbonne où, somme toute, on parle brésilien ! Bref, je me mets à subodorer des choses, tout en m’installant entre deux jolies personnes dont les parfums conjugués me chavirent. C’est insolite, inquiétant, paniquant même, quatre splendeurs pareilles lorsqu’elles sont sans homme. Ce sublime cheptel à l’abandon me navre jusque dans mes replis les plus confidentiels. Une consœurerie de gougnasses ? Des prêtresses du gigot à l’ail ? Voire ! Elles ont cependant une manière friponne de me jauger qui me carbonise les endroits inflammables. Leurs mirettes, à ces sublimités, sont aussi excitantes que leurs mamelons.

Les v’là qui m’entreprennent à qui mieux mieux. L’une me sert du champagne frappé au poil, et pas de la limonade de pensionnat, mais du Mercier extra-brut, mes guignols ! L’autre me bascule une méchante louchée de caviar dans mon assiette, pendant qu’une troisième me beurre des toasts et que la quatrième allume les chandelles noires d’un chandelier. À la lueur des bougies, les visages s’avivent, deviennent à la fois plus intenses et plus mystérieux.

Je lichetrogne ma flûte de pinard à ressort. Illico je me sens de l’euphorie dans la cale. Déjà mon godet est de nouveau plein.

Dans le fond, c’est pas désagréable de se sentir cajolé par quatre belles bougresses qui ne parlent pas la même langue que vous. Ça vous oblige d’exprimer par gestes ! Le rêve en pareil cas. Des nanas de cette acabit, vaut mieux se mettre à leur portée avec les mains, ça fait tout de suite plus intime.

Dominant mon éberluement, me voici donc à déguster du caviar en buvant les magnifiques produits des établissements Mercier[23], si bien et si tant qu’en très peu de temps j’ai quasiment oublié la surprenante manière dont je suis arrivé à bord de ce yacht enchanteur. On trinque ! On se roucoule des trucs qu’on suppose gentils, de part et d’autre. Ces personnes ont l’air de très bonnes copines en train d’enterrer la vie de fille de l’une d’elles. Elles demandent qu’à rigoler, à s’étourdir ! Moi, vous me connaissez ? Les vapeurs de gonzesse me grimpent à la pensarde plus vite que des vapeurs d’ammoniaque. Seul avec ces amazones, je crache le feu ! On soufflerait les calbombes, sûr qu’on verrait crépiter des étincelles autour de moi, pire que si j’étais déguisé en cierge magique pour sapin de Noël.

Bientôt je m’enhardis. Un bécot, ici ! Une main baladeuse, la ! Le champ’ coule comme le Drac en crue. On pouffe, on glousse, on rigole carrément ! Parfois, un larbin alerté par la clochette d’argent de la table apporte des succulences et de nouvelles boutanches. On becte je me rappelle plus quoi de formide. On chahute ! J’exige une rotation de mes partenaires de manière à les avoir équitablement à mes côtés, que personne soit privé de caresses. Pas laisser s’instaurer la jalousie, jamais ! Elle est trop néfaste ! Alors, pour pallier les crêpages de touffes, je procède comme au tennis : y’a changement à tous les jeux impairs. Bisouilles miauleuses sur des nuques parfumées ! Gliglis sournois ! Privautés hardies ! On décide des interruptions du dîner pour organiser des tournois de baisers. À celle qui embrasse le mieux ! Je décerne des primes, des prix ! Pire qu’à Cannes ! C’est le Festival de la galanterie de salon ! Y’a la récompense à la menteuse la plus agile ! La palme d’or pour celle qu’a la plus forte autonomie respiratoire. La mention spéciale du Juré pour les lèvres les plus sensuelles. Le prix de l’Office Catholique pour l’étreinte la mieux ponctuante. Ce lichouillage effréné, m’sieurs-dames !

À moi Casanova ! Le Parc aux Cerfs ! Tout le bonheur ! Je serais pas un raffiné, technicien accompli, je foncerais vers les conclusions soudardes ! J’irai recto (et pourquoi pas, rectum ?) à la sauvage culbute ! Au rush dans les coussins qui montagnent sur le canapé voisin ! On assisterait à la partie de sabre tache ! Au grand violent schprountz. Un coup for you, un coup for your little copine, darling ! Approchez-vous de la cuiller à pot ! J’aurais pas autant de self sensual control, vous verriez ces dégâts ! La manière qu’elles tourneraient en charpie leurs belles robes ! La façon qu’on marcherait sur de la lingerie fée-minime. Je leur déblaierais les derniers complexes, à mes marjolaines, si je n’étais pas du garçon admirablement conçu pour l’amour et ses dérivés. Une noire empoignade ! La charge héroïque ! Tout au clairon ! Tara tata tata tata ! Pas si tata que ça, d’ailleurs ! Signé Furax ! Cot’cot’cot’coque coït, chanteraient mes poules ! Présentez vos saute-conduits, belles scélérates ! À hue et adieu ! V’lan ! Planque-moi ça un instant, ça réchauffe ! Te les aurais saponifiées moins de deux, les quatre ! En enfile indienne ! Le quadrige, même chose que sur les mornifles grecques ! Au fouet, je les emportais dans les apothéoses ! Flic ! Flac ! T’avances, Hercule ? Bride abattue ! Seulement, que voulez-vous, j’ai pas été élevé à la Cosaque, mézigue ! J’sus pas Mongol, ni garçon de ferme. La bourrée Auvergnate, c’est pour les fêtes folkloriques. J’sus un délicat intégral ! Un apôtre du rada ! L’intellectuel du fignedé ! Y’en a qui pensent avec leurs génitoires, moi c’est le contraire : je « m’extasie » avec le cerveau ! Gamberge for ever ! J’ai de la matière grise jusque dans l’aumônière. Pas ma faute ! On est comme on naît, je me tue à vous le démontrer.

Après les chefs d’hors-d’œuvre, on batifole dans les folies ! Le rôti souligne nos consentements réciproques. À la crème renversée, on est à point pour attaquer le sublime, et au caoua, on s’embarque à bord de la caravelle Voluptas ! Je veux pas vous raconter, c’est trop terrible ! J’ai déjà eu une levée de boucliers rapport à ma « Langue au Chah » qu’un paquet de lavedus a trouvé trop corsé. On m’a fustigé d’indignances ! M’a traité d’ordurier ! Menacé de plus me lire ! Peut-être pour m’exciter, m’inciter à pousser plus loin ? Probable. Sont marrants, les hommes ! Toujours enveloppés de limites ! Des certains acceptent qu’on polissonne, mais pas qu’on scabre ! Ils ont des irruptions de pudeur qui tout soudain les démangent. Halte là ! ils meuglent ! Vous dépassez la vitesse autorisée ! Ils prennent leur pied tout le temps dans des plumards en 140, plus large, ça serait pas convenable. Faut pas les choquer, ni le entrechoquer ! Veulent pas se rendre complices du délit d’évasion ! Le cher équilibre français ! Bande de gnoufs et de pignoufs ! Bande de fœtus ! Tire-bouchonnés de la coiffe ! Éclaboussures de fichtre et de foutre, que si trop chier ils me font je partirai au bout de moi, sans eux ! Au bout du monde ! N’écrirai plus que pour moi tout seul et crèverai aux antipodes, sur un monceau de manuscrits à la gloire de leur connerie maudite ! Mesquins, minables, pleutres qui se dégoulinent dessus ! Sanieux ! Furonculés de frais ! Sauvages ! Ah, mon Dieu, c’était donc pas assez qu’ils soient mortels ? Pourquoi les avoir fait si cons ! Et votre pitié ? Et nos prières ? Dites ? Du Belge ? faut qu’on fume ? Qu’on se démette ? Vraiment ? Votre volonté est ainsi faite ? J’aurais pas cru !

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J’ai l’air comme-ça de faire de la pub, mais croyez pas c’est gratuit.