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nature ?

LE JEUNE SCIPION, se reprenant,

d'un air ironique et mauvais.

Elle me console de n'être pas César.

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Caligula

Acte Il, Scène XIV

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CALIGULA

LE JEUNE SCIPION

Ah! et crois-tu qu'elle pourrait me consoler de Non.

l'être?

CALIGULA

LE JEUNE SCIPION, même jeu.

Dis-moi du moins ce qu'il contient.

Ma foi, elle a guéri des blessures plus graves.

CALiGULAj étrangement simple.

LE JEUNE SCIPION, toujours raidi

et comme à regret.

Blessure? Tu dis cela avec méchanceté. Est-ce J'y parlais...

parce que j'ai tué ton père? Si tu savais pourtant comme le mot est juste. Blessure ! ( Changeant de ton.) Il CALIGULA

n'y a que la haine pour rendre les gens intelligents.

Eh bien?

LE JEUNE SCIPION, raidi.

LE JEUNE SCIPION

J'ai répondu à ta question sur la nature.

Non, je ne sais pas...

Caligula s'assied, regarde Scipion,puis lui prend brusquement les mains et l'attire de force à ses pieds.

CALIGULA

Il lui prend le visage dans ses mains.

Essaie...

CALIGULA

LE JEUNE SCIPION

Récite-moi ton poème.

J'y parlais d'un certain accord de la terre...

LE JEUNE SCIPION

CALIGULA,,

Je t'en prie, César, non.

l'interrompant, d'un ton absorbé.

CALIGULA

... de la terre et du pied.

Pourquoi ?

LE JEUNE SCIPION, Surpris,

LE JEUNE SCIPION

hésite et continue.

Je ne l'ai pas sur moi.

Oui, c'est à peu près cela...

CALIGULA

CALIGULA

Ne t'en souviens-tu pas ?

Continue.

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Caligula

Acte Il, Scène XIV

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LE JEUNE SCIPION

LE JEUNE SCIPION

... et aussi de la ligne des collines romaines et de cet Oui, oui. C'est tout cela! Mais comment l'as-tu apaisement fugitif et bouleversant qu'y ramène le appris ?

soir...

CALIGULA,

CALIGULA

pressant le jeune Scipion contre lui.

... Du cri des martinets dans le ciel vert.

Je ne sais pas. Peut-être parce que nous aimons les mêmes vérités.

LE JEUNE SCIPION,

s'abandonnant un peu plus.

LE JEUNE SCIPION, frémissant, cache sa tête Oui, encore.

contre la poitrine de Caligula.

Oh! qu'importe, puisque tout prend en moi le CALIGULA

visage de l'amour !

Eh bien ?

CALIGULA, toujours caressant.

LE JEUNE SCIPION

C'est la vertu des grands cœurs, Scipion. Si, du Et de cette minute subtile où le ciel encore plein moins, je pouvais connaître ta transparence ! Mais je d'or brusquement bascule et nous montre en un sais trop la force de ma passion pour la vie, elle ne se instant son autre face, gorgée d'étoiles luisantes.

satisfera pas de la nature. Tu ne peux pas comprendre cela. Tu es d'un autre monde. Tu es pur dans le bien, CALIGULA

comme je suis pur dans le mal.

De cette odeur de fumée, d'arbres et d'eaux qui monte alors de la terre vers la nuit.

LE JEUNE SCIPION

Je peux comprendre.

LE JEUNE SCIPION, tout entier,

... Le cri des cigales et la retombée des chaleurs, les CALIGULA

chiens, les roulements des derniers chars, les voix des Non. Ce quelque chose en moi, ce lac de silence, ces fermiers...

herbes pourries. (Changeant brusquement de ton.) Ton poème doit être beau. Mais si tu veux mon avis...

CALIGULA

... Et les chemins noyés d'ombre dans les lentisques LE JEUNE SCIPION, même jeu.

et les oliviers...

Oui.

104 Caligula

Acte Il, Scène XIV

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CALIGULA

CALIGULA, éclatant, se jette sur lui Tout cela manque de sang.

et le prend au collet; il le secoue.

La solitude! Tu la connais, toi, la solitude? Celle Scipion se rejette brusquement en arrière et regarde des poètes et des impuissants. La solitude? Mais Caligula avec horreur. Toujours reculant, il parle laquelle? Ah! tu ne sais pas que seul, on ne l'est d'une voix sourde, devant Caligula qu'il regarde jamais ! Et que partout le même poids d'avenir et de avec intensité.

passé nous accompagne ! Les êtres qu'on a tués sont avec nous. Et pour ceux-là, ce serait encore facile.

LE JEUNE SCIPION

Mais ceux qu'on a aimés, ceux qu'on n'a pas aimés et Oh ! le monstre, l'infect monstre. Tu as encore joué.

qui vous ont aimé, les regrets, le désir, l'amertume et Tu viens de jouer, hein ? Et tu es content de toi ?

la douceur, les putains et la clique des dieux. (// le lâche et recule vers sa place.) Seul ! Ah ! si du moins, au CALIGULA, avec un peu de tristesse.

lieu de cette solitude empoisonnée de présences qui est Il y a du vrai dans ce que tu dis. J'ai joué.

la mienne, je pouvais goûter la vraie, le silence et le tremblement d'un arbre ! (Assis, avec une soudaine lassi-LE JEUNE SCIPION, même jeu.

tude.) La solitude ! Mais non, Scipion. Elle est peuplée de grincements de dents et tout entière retentissante Quel cœur ignoble et ensanglanté tu dois avoir.

de bruits et de clameurs perdues. Et près des femmes Oh! comme tant de mal et de haine doivent te que je caresse, quand la nuit se referme sur nous et torturer !

que je crois, éloigné de ma chair enfin contentée, saisir un peu de moi entre la vie et la mort, ma solitude CALIGULA, doucement.

entière s'emplit de l'aigre odeur du plaisir aux aissel-Tais-toi, maintenant.

les de la femme qui sombre encore à mes côtés.

LE JEUNE SCIPION

// a l'air exténué. Long silence.

Le jeune Scipion passe derrière Caligula et Comme je te plains et comme je te hais !

s'approche, hésitant. Il tend une main vers Caligula et la pose sur son épaule. Caligula, sans se retourner, CALIGULA, avec colère.

la couvre d'une des siennes.

Tais-toi.

LE JEUNE SCIPION

Tous les hommes ont une douceur dans la vie. Cela LE JEUNE SCIPION

les aide à continuer. C'est vers elle qu'ils se retournent Et quelle immonde solitude doit être la tienne !

quand ils se sentent trop usés.

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Caligula

CALIGULA

C'est vrai, Scipion.

LE JEUNE SCIPION

N'y a-t-il donc rien dans la tienne qui soit semblable, l'approche des larmes, un refuge silencieux ?

CALIGULA

Si, pourtant.

LE JEUNE SCIPION

Et quoi donc ?

A C T E I I I 3

CALIGULA, lentement.

Le mépris.

RIDEAU

SCÈNE PREMIÈRE

Avant le lever du rideau, bruit de cymbales et de caisse. Is rideau s'ouvre sur une sorte de parade foraine. Au centre, une tenture devant laquelle, sur une petite estrade, se trouvent Hélicon et Cœsonia. Les cymbalistes de chaque côté. Assis sur des sièges, tournant le dos aux spectateurs, quelques patriciens et le jeune Scipion.