Beaucoup d'apprentis se découragent et retournent à la boue où les compagnons ne les voient pas.
Le monde oublie que ces âmes anxieuses n'en sont qu'à leurs premiers espoirs, de ce fait, ils affrontent de plus âpres disputes pour briser le cocon des passions inférieures dans leur aspiration à s'élever. Plongée dans la vieille ignorance qui la carac térise, la foule n'appréhende l'homme que dans l'animalité dans laquelle elle se complaît. Si un compagnon prétend s'élever, elle exige bientôt de lui des lettres de créance positives émanant du ciel, oubliant que personne ne peut trahir le temps ou tromper l'esprit de progrès de la nature. Il ne reste guère au chrétien qu'à cultiver ses intentions sublimes et à écouter le Maître : D'abord l'herbe, puis l'épi, puis plein de blé dans l'épi.
103
L'estime du monde
« S'ils ont appelé le maître de la, maison Belzébul, à combien plus forte raison appelleront-ils ainsi les gens, gens de sa maison — Jésus. (Matthieu 10. 25)
De nombreux disciples de l'Evangile sont jaloux de leurs prédilections et de leurs points de vue au niveau individuel.
De fausses conceptions assombrissent leur regard.
Ils s'inquiètent presque toujours de la reconnaissance publique relative aux vertus qui soulignent leur caractère, ils gardent le désir secret d'obtenir l'admiration de tous et se sentent blessés si les autorités transitoires du monde ne leur confèrent pas leur estime.
Ils oublient que le royaume de Dieu ne se manifeste pas sous des apparences ; ils ne perçoivent pas que, pour l'instant, seuls les êtres qui se distinguent à l'avant-garde dans les domaines financiers ou politiques s'arborent en détenteurs de prérogatives terrestres, maîtres presque absolus des hommages personnels et de brillantes nécrologies.
Les fils du royaume divin s'illustrent rarement et, d'une manière générale, ils remplissent le monde de bienfaits à l'abri des regards, comme cela se produit avec le Père lui-même.
Si Jésus a été traité de sorcier, s'il a été crucifié comme un malfaiteur, ravi à son aimante mission pour être soumis à la poutre humiliante, à quoi ses apprentis sincères ne doivent-ils pas s'attendre, même s'ils sont vraiment dévoués à sa cause ?
Le disciple ne peut ignorer que la permanence sur terre découle du besoin de travail salutaire et non de l'utilisation d'avantages éphémères qui, dans de nombreux cas, annuleraient sa capacité à servir. Si la force humaine a torturé le Christ, elle ne pourra s'empêcher de le torturer aussi. Il est illogique de se disputer l'estime d'un monde qui, plus tard, sera obligé de se régénérer pour obtenir la rédemption.
104
L'épée symbolique
« Ne croyez, pas que je sois venu apporter la paix sur la terre ;je ne suis pas venu apporter la paix, mais l'épée. » — Jésus. (Matthieu 10. 34)
D'innombrables lecteurs de l'Évangile sont troublés par ces affirmations du Maître divin, car le concept de paix parmi les hommes depuis de nombreux siècles a été viscéralement vicié. Communément, trouver la paix signifie avoir obtenu des garanties extérieures qui permettent au corps de végéter sans soucis, l'homme peut alors s'entourer de serviteurs, pourrir dans l'oisiveté et s'absenter de l'agitation de la vie.
Jésus n'aurait pu endosser une tranquillité de cette nature, et à l'inverse du faux principe établi dans le monde, il apporta avec lui la lutte régénératrice, l'épée symbolique de la connaissance intérieure par la révélation divine, afin que l'homme entame la bataille de son propre perfectionnement. Le Maître est venu établir le combat de la rédemption sur la terre. Dès son premier enseignement, le front d'un combat dépourvu de sang s'est formé, destiné à illuminer le parcourt humain. Lui-même fut le premier à inaugurer un tel témoignage par des sacrifices suprêmes.
Il y a presque vingt siècles que la terre vit sous ces impulsions rénovatrices, et malheur à ceux qui dorment, étrangers au processus sanctifiant !
Chercher la paix illusoire de l'oisiveté, revient à se dévier de la lumière en fuyant la vie et en se précipitant dans la mort.
Pourtant, Jésus est aussi surnommé le Prince de la Paix.
Oui, le Christ a affectivement apporté au monde l'épée rénovatrice de la guerre contre le mal qui est en soi une source divine de repos pour les cœurs qui se joignent à son amour, et dans les situations les plus dangereuses de la terre, ceux-là trouvent en lui la sérénité inaltérable. Jésus a commencé le combat du salut de l'humanité et représente, en même temps, le fondement de la paix sublime pour tous les hommes bons et sincères.
105 Pas tous
« Or il advint, environ huit jours après ces paroles, que, prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, il gravit la montagne pour prier, » : 9. 28)
Ayons la bienveillance de remarquer l'attitude du Maître qui n'invite que Simon et les fils de Zébédée à être témoins de la sublime manifestation de la montagne, lorsque Moïse et l'autre émissaire divin entrèrent en contact direct avec Jésus sous le regard des disciples.
Pourquoi n'invita-t-il pas d'autres compagnons ?
Philippe ou André n'auraient-ils pas, par hasard, apprécié cette sublime révélation ? Thomas n'était-il pas un compagnon attentif, curieux des questions spirituelles ? Cependant, le Maître connaissait la cause d'une telle décision, seul Lui pouvait correctement doser les dons de la connaissance supérieure.
Le fait doit être rappelé par tous ceux qui désirent forcer la porte du plan spirituel.
Effectivement, l'échange avec tel ou tel groupe d'entités de l'au-delà est possible, mais tout le monde n'est pas prêt, en même temps, à recevoir des responsabilités ou des bienfaits.
On ne confie pas, imprudemment, au premier venu l'appareil d'une précieuse production, dont le maniement dépend de sa compétence préalable, sous prétexte que ses intentions sont bonnes. On ne trahit pas impunément l'ordre naturel. Tous les apprentis et tous les studieux ne recevront pas immédiatement de l'au-delà les grandes révélations. Chaque groupe d'activité spiritualisée doit être présidé par un très grand sens d'harmonie, d'effort et d'affinité. Par conséquent, outre les bonnes intentions, il est indispensable de présenter une fiche de travaux personnels satisfaisants. Dans le monde, tout individu est enclin à vouloir ceci ou cela, mais rares sont les créatures qui sont prêtes à servir et à s'instruire.
106
Donner
« A quiconque le demande, donne, et à qui t'enlève ton bien, ne le réclame pas. » — Jésus. (Luc 6. 30)
Dans les activités de la vie quotidienne, l'acte de donner est des plus sublimes ; néanmoins, dans la pratique beaucoup d'hommes le négligent et sont incompréhensibles quand il s'agit de le mettre en pratique.
Certains distribuent des aumônes avec désinvolture, d'autres oublient de faire preuve de vigilance en livrant leur travail à des malfaiteurs.
Dans les moindres faits, Jésus est notre Maître. Si nous l'entendons nous recommander d'être prêts à donner « à quiconque » nous en fait la demande, nous le voyons répondant à toutes les créatures sur son chemin, non au gré de leurs caprices, mais selon des besoins.