Выбрать главу

« Et peu m’importe que vous vous occupiez des blessés ennemis avec autant de prévenances que des nôtres, hurla-t-il.

Il avait essayé de baisser la voix, mais avait échoué.

« Cependant, vous allez obéir aux ordres que je vais vous donner à leur sujet. Nous nous trouvons dans une base militaire et ces blessés appartiennent à l’autre camp. Ceux dont l’état permet de se déplacer doivent être placés sous bonne garde, afin de les empêcher de commettre des actes de sabotage. Est-ce que vous comprenez, professeur?

— Oui, commandant, répondit Conway d’une voix fluette.

Lorsqu’il quitta la Réception en compagnie de O’Mara, quelques minutes plus tard, Conway avait toujours l’impression d’être sur des charbons ardents. Il était à présent évident qu’il s’était lourdement trompé sur le compte du commandant de la flotte et qu’il devait lui présenter ses excuses pour les pensées peu amènes qu’il avait eues à son sujet. Sous son vernis de froideur, Dermod était un homme foncièrement bon.

Brusquement, O’Mara s’adressa à lui.

— J’aime bien voir ces personnes réservées et possédant un fort contrôle d’elles-mêmes perdre leur sang froid à l’occasion. Sur un plan psychologique, c’est une réaction utile, si l’on tient compte de la tension nerveuse à laquelle Dermod est actuellement soumis. Je ne suis pas mécontent que vous soyez parvenu à le mettre en colère.

— Et quelle est votre opinion à mon sujet? demanda Conway.

— Professeur, votre cas est totalement différent. Vous ne possédez aucun contrôle de vous-même. En dépit de votre nouvelle autorité, qui devrait faire de vous un exemple de tolérance et de bonne conduite, vous réagissez toujours comme un enfant trop gâté et coléreux. Vous devriez vous surveiller, professeur.

Conway avait espérer trouver de la sympathie, pour l’admonestation sévère que lui avait adressée Dermod, ainsi qu’un peu de considération pour la tension à laquelle il était lui aussi soumis, et non des critiques d’un autre tiers. Lorsque O’Mara le quitta pour gagner son bureau, quelques minutes plus tard, Conway était encore trop en colère pour pouvoir dire quoi que ce soit.

XXIV

Le jour suivant, Conway n’eut pas l’opportunité de présenter ses excuses au commandant de la flotte, car les « émeutiers » lancèrent leur plus violente attaque et les responsables médicaux et militaires du Secteur Général eurent bien trop à faire pour avoir un entretien. Mais baptiser cette bataille du nom d’émeute ne faisait pas la moindre différence sur la nature et le nombre des blessés qui affluaient brusquement, pensa ironiquement Conway, car elle commençait comme un véritable massacre pour les deux camps.

Les forces ennemis approchaient et entamaient leur pilonnage de l’hôpital avec une puissance de feu fantastique. Elles serraient le Secteur Général de si près que, parfois, des unités Impériales approchaient à moins d’une cinquantaine de mètres de sa coque. Les vaisseaux de Dermod : le Vespasien, un cuirassé Tralthien et quelques autres petites unités toujours opérationnelles, se ruèrent vers l’hôpital pour s’y ancrer à l’aide de rayons tracteurs. Ils n’avaient plus la place suffisante pour pouvoir manœuvrer sans gêner les servants des batteries lourdes installées sous eux. Ils se posèrent et appuyèrent de leurs armes légères la puissance de feu des batteries fixes, partout où c’était chose possible.

Mais il s’agissait sans doute de la manœuvre qu’attendait le commandement ennemi. Avec une rapidité que seul un plan longuement étudié rendait possible, les attaquants éclaircirent leurs rangs, s’éparpillèrent, puis se regroupèrent sur une petite section du Secteur Général. La puissance de feu des trois quarts de la flotte Impériale se concentra sur ce point.

Une pluie de missiles perfora l’épais blindage. Ils firent voler en éclat les épaves ayant servi à obstruer les cratères creusés par les explosions antérieures et traversèrent la coque interne moins résistante. Rayons tracteurs et vibreurs s’emparaient des épaves encore en place et les déchiquetaient sauvagement, puis ils les écartaient de façon à permettre à de nouveaux missiles de pénétrer plus profondément dans l’hôpital. Les défenses du corps des Moniteurs firent d’épouvantables ravages au sein des vaisseaux étroitement regroupés, mais cela ne dura que quelques minutes. La puissance de feu de l’ennemi se déchaîna sur elles. Les batteries furent pilonnées, éventrées, et harcelées jusqu’au moment où ce ne fût plus qu’une masse informe de chair et de métal. Une section de la coque externe restait à présent sans protection et, brusquement, il fut évident que l’Empire ne lançait pas une simple attaque mais un assaut.

Couverts par le tir des appareils Impériaux regroupés, trois vaisseaux géants et non armés descendaient lourdement vers la section non défendue. Des transports de troupes …

Le Vespasien fut aussitôt envoyé combler le vide dans les défenses. Le cuirassé se rua vers le point où le premier transport de troupes allait se poser, soutint le feu roulant des Moniteurs autant que celui de l’ennemi, et utilisa toute sa puissance de tir dès que sa cible apparut au-dessus de la courbe de la coque …

On donna maintes explications à ce qui se passa. Une erreur de calcul de la part du pilote, un coup porté par l’ennemi, une erreur de tir de la part d’autre Moniteurs ou encore des missiles qui dévièrent de leur trajectoire juste au mauvais moment. Mais on n’avança jamais l’hypothèse que le colonel Williamson avait pu délibérément vouloir éperonner le transport ennemi, car tous savaient qu’il s’agissait d’un officier compétent qui gardait la tête froide et qui rendait coup pour coup. Même à un stade aussi désespéré de la bataille, il aurait su que c’était une tactique stupide en raison de la supériorité numérique écrasante de l’adversaire.

Le Vespasien heurta le plus gros, mais le moins solide, des transports à proximité de sa poupe. Il semblait devoir le transpercer entièrement lorsqu’il s’immobilisa en crissant silencieusement. À l’intérieur de l’épave une unique petite explosion embrasa le brouillard créé par l’atmosphère qui s’échappait, mais les deux vaisseaux restèrent rivés l’un à l’autre, en tournant lentement sur eux-mêmes.

Durant une seconde, la bataille sembla s’interrompre. Puis les batteries des Moniteurs se remirent en action, ignorant les autres cibles si leurs projecteurs pouvaient atteindre le second transporteur qui approchait. En quelques minutes, les vibreurs arrachèrent des plaques de blindage en trois points de sa coque et l’entamèrent plus profondément. L’appareil se retira lourdement en perdant son atmosphère. Le troisième battit en retraite, imité par le reste des forces adverses, mais sur une faible distance seulement. L’intensité du pilonnage avait légèrement diminué, mais il n’avait pas cessé pour autant.

Même avec un effort d’imagination on ne pouvait prendre cela pour une victoire du corps des Moniteurs. L’ennemi avait simplement fait une erreur de jugement, il s’était un peu trop hâté. Il était indispensable d’affaiblir encore un peu les défenses de l’hôpital.

Les rayons tracteurs atteignirent les épaves et interrompirent doucement leurs révolutions sur elles-mêmes, puis les ramenèrent vers la coque ravagée du Secteur Général. Des Moniteurs s’élancèrent dans l’espace pour aller à la recherche des survivants et les blessés ne tardèrent pas à affluer dans les services. Mais par des routes détournées car sous les épaves des vaisseaux se trouvaient à présent d’autres ruines et d’autres équipes de secours qui luttaient pour libérer les blessés qui étaient victimes de cette guerre absurde pour la seconde ou troisième fois …