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Helvidius confia à son père toutes les impressions qu'il rapportait d'Asie Mineure, se rappelant des scènes vécues ou évoquant de doux souvenirs, faisant ressortir néanmoins ses profondes inquiétudes morales concernant sa fille dont les connaissances prématurées en matière de religion et de philosophie le hantaient, depuis qu'accidentellement, elle avait pris plaisir à écouter les esclaves de la maison parler des dangereuses superstitions de la nouvelle croyance qui envahissait l'Empire de toute part. Il expliqua, ainsi, au délicat et généreux mentor spirituel de son existence, toute la situation familiale, lui présentant les détails et les circonstances sur le sujet.

Après l'avoir écouté attentivement, le vieux Cneius Lucius dont la pratique éducative expérimentée lui serait d'un grand secours pour trouver une solution, promit de lui apporter son soutien moral sur la question.

Peu de temps après, nos amis s'installaient dans leur magnifique résidence du Palatin, initiant un nouveau cycle de vie citadine.

Helvidius Lucius était satisfait de sa nouvelle position, soulignant que comme adjoint substitut de son beau-père dans les fonctions de censeur, un rôle important lui était réservé dans la vie de la ville sous le regard bienveillant de l'Empereur. Quant à Alba Lucinie, assistée de Tullia, grâce à ses capacités artistiques innées, transformait la vieille propriété, conformément au goût de l'époque, édifiant dans chaque coin un peu de l'harmonie de son foyer où son mari et ses filles pourraient se reposer dans les moments de grande agitation de la vie.

Inutile de dire qu'engagée par Tullia, Hatéria fut admise dans le foyer d'Alba Lucinie, s'imposant à tous par son humilité habile, elle gagna toute la confiance de ses maîtres en quelques jours à peine.

La semaine suivante, sous prétexte de vouloir se reposer quelque temps chez son grand-père qu'elle Idolâtrait, Célia fut conduite par ses parents à sa résidence sur l'autre rive du Tibre, aux pieds de l'Aventin.

Cneius Lucius habitait dans un palais très confortable au style romain accentué en compagnie de deux de ses filles déjà âgées qui le remplissaient d'affection couvrant d'étoiles la nuit de sa vieillesse.

Il reçut sa tendre petite-fille avec les preuves de satisfaction les plus évidentes.

Le lendemain dans la matinée, il ordonna de faire préparer sa litière personnelle pour aller offrir un sacrifice au temple de Jupiter capitolin en sa compagnie.

Célia l'accompagna calme et agréable bien qu'elle remarqua le regard expressif avec lequel l'ancien l'observait, soucieux peut-être de maîtresse ses sentiments les plus intimes.

Cneius Lucius ne s'arrêta pas seulement au sanctuaire de Jupiter mais il se dirigea, également, au temple de Sérapis où il se mit à parler à sa petite-fille des plus anciennes traditions de la famille romaine. La fillette ne contredisait pas ses paroles, ni n'interrompait son affectueux discours, se soumettant avec la plus grande obéissance à tout ce qui se rapportait au rituel des temples conformément aux règles instituées à Rome par les flamines.

Le soir tombait quand le généreux vieillard considéra leur pèlerinage terminé à travers les édifices religieux de la ville. Alors que le soleil se couchait, Cneius Lucius désireux de connaître toute l'intensité des nouvelles pensées de sa petite-fille, la conduisit finalement à l'autel familial où étaient alignées les magnifiques icônes en ivoire des dieux domestiques.

Célia, ma chérie - a-t-il dit enfin se reposant sur un grand divan devant les idoles - je t'ai emmenée aujourd'hui aux temples de Jupiter et de Sérapis où j'ai offert des sacrifices pour notre bonheur ; mais plus que notre bonheur, je désire ma chère enfant le tien. J'ai remarqué que tu accompagnais mes gestes et, néanmoins, tu ne démontrais pas une dévotion sincère et ardente. Peut-être, as-tu rapporté de la province quelque idée nouvelle, contraire à nos croyances?!...

Elle écouta les paroles de son vénérable grand-père, l'âme perdue dans de profonds schismes. Elle comprit d'un regard toute la situation et habituée aux rigoureuses traditions de la famille, elle devina que son père avait sollicité une telle intervention dans l'intention de la faire revenir sur ses idées ainsi que sur ses convictions les plus intimes.

Cher grand-père - a-t-elle répondu les yeux humides où transparaissait sa sublime innocence -, je vous ai toujours aimé de toute mon âme et vous m'avez enseigné à dire toute la vérité en toutes circonstances.

Oui - s'exclama Cneius Lucius admiratif devinant les émotions de l'adorable enfant , à tout instant tu es présente dans mon cœur. Parle, mon enfant, avec la plus grande franchise! Je n'ai appris d'autre chemin que celui de la vérité face à nos traditions et à nos dieux...

D'abord je dois vous dire que je pense que c'est mon père qui vous a demandé de m'amener à changer mes sentiments religieux actuels.

La vénérable ancien a fait un geste d'étonnement en raison de ce commentaire inattendu.

Oui - a continué la fillette -, peut-être que mon père ne peut me comprendre... Il ne pourrait jamais m'entendre avec bienveillance sans protester énergiquement, mais même ainsi, je continuerai toujours à l'aimer, malgré son cœur qui ne me comprend pas.

Alors, mon enfant, pourquoi nier à Helvidius tes plus Intimes confidences ?...

J'ai essayé de lui parler un jour alors que nous étions encore en Judée, mais j'ai immédiatement compris que mon père jugerait mal mes paroles les plus sincères, percevant ainsi que la vérité pour être totalement comprise doit être examinée par des cœurs du même âge spirituel.

Mais, ma fille, que fais-tu des liens sacrés de la famille ?

Ils sont dans l'amour et dans le respect que j'ai toujours cultivés ; toutefois grand- père, sur le terrain des idées, les liens de sang ne signifient pas toujours l'harmonie des idées entre ceux que le ciel a unis dans le cocon familial. Vénérant et estimant mon père de mon affection filiale, tout en respectant les traditions de son nom, j'ai épousé des idées auxquelles je ne pouvais adhérer à son avis, pour l'instant...

Mais que veux-tu dire par âge spirituel ?...

Que la jeunesse et la vieillesse, comme nous les voyons de par le monde, ne sont que l'expression d'une vie physique qui finit avec la mort. Il n'y a pas de jeunes, ni de vieux mais des âmes jeunes dans leur façon de raisonner ou profondément riches dans le domaine des expériences humaines.

Que veux-tu dire par là ? - a demandé l'ancien fort admiratif. - As-tu une aussi vaste connaissance des auteurs grecs ?! Cela est bien étrange, ton père vient juste de trouver un esclave cultivé destiné tout spécialement à enrichir ton éducation et celle de ta sœur.

Grand-père, vous connaissez bien ce profond désir d'apprendre qui m'a toujours poussée dès mon enfance. Bien qu'étant jeune, je sens dans mon esprit le poids d'un âge millénaire. Pendant toutes ces années d'absence en province, j'ai passé mon temps disponible à dévorer la bibliothèque que mon père ne pouvait emporter dans ses déplacements en Idumée.

Mais ma fille - s'exclama le respectable ancien sincèrement consterné -, tu n'aurais pas agi comme les malades qui, à force de chercher la vertu dans tous les médicaments à portée de main, finissent lamentablement intoxiqués ?!...

Non, cher grand-père, je ne me suis pas empoisonnée. Et si une telle chose est arrivée, depuis plus de deux ans je porte dans le cœur le meilleur des antidotes contre l'influence nocive de toutes les toxines de ce monde.

Lequel ? - a interrogé Cneius Lucius de plus en plus surpris.

Une croyance fervente et sincère.

As-tu soumis de telles pensées à l'invocation de nos dieux?...