Agneau sacré de Dieu,
Seigneur de toute la vérité,
Sauveur de l'humanité,
Verbe sacré de lumière !..
Berger de la paix, de l'espoir,
De ta divine demeure,
Seigneur Jésus, illumine
Le supplice de notre croix !...
Toi aussi, tuas eu ton calvaire
De douleur, d'angoisses, de calomnies,
En offrant au monde entier
La lumière de la rédemption ;
Tu as souffert de la soif et des tourments,
Mais, sous le fiel, et les maux,
Tu as racheté les pécheurs
Du plus triste esclavage !
Si toi aussi tu as bu le calice De l'amertume et de l'ironie,
Nous voulons la joie
De souffrir et pleurer... Car tels des moutons égarés, Nous sommes les fils de l'erreur, Qui en cette terre d'exil Vivent à t'attendre.
Donne-nous Seigneur que nous puissions
Vivre le bonheur
Des bénédictions de l'Éternité
Qui ne se trouvent pas ici ;
La joie de te rencontrer
Dans les dernières souffrances,
Allume en nous le plaisir
De bien mourir pour Toi !...
Seigneur, pardonne les bourreaux
De ta doctrine sacrée !
Protège, soutiens, relève
Ceux qui dans le mal vivent pour mourir...
En route vers Ton royaume, Toute la douleur se transforme,
Toute larme est bonheur,
Le bien consiste à souffrir!...
Console, Jésus aimé,
Ceux qui nous sont chers,
Qui sont restés en arrière
Dans la nostalgie et dans l'amertume ;
Donne-leur la foi qui transforme
Les souffrances et les pleurs
Dans les trésors sacrés
De la vie de Ton amour!...
D'autres strophes se sont élevées au ciel comme des soupirs de résignation et d'espoir...
La poitrine criblée de flèches qui saignaient son cœur alors qu'il contemplait le cadavre de son fils qui expirait devant lui vu sa faiblesse organique, Nestor a senti qu'un tourbillon de souvenirs indéfinissables a affleuré sa pensée déjà vacillante, confus, au bord de l'agonie. Les yeux troublés par l'angoisse de la mort à lui ravir ses forces, il perçut la foule qui les huait et entendait toujours son tumulte bestial... Il a regardé la tribune impériale où devaient se trouver ceux qui avaient mérité son affection pure et sincère, mais sentit remonter de son for intérieur des émotions intraduisibles, il s'est vu lui aussi dans ses souvenirs confus à la tribune d'honneur portant la toge de sénateur, décoré de pourpre... Couronné de rosés3 lui- même applaudissait la tuerie de chrétiens qui, sans les poteaux du supplice ni les flèches empoisonnées à leur transpercer la poitrine, étaient dévorés par des fauves hideux et insatiables... Il voulut marcher, bouger, mais en même temps il se voyait agenouillé au bord d'un grand lac devant Jésus de Nazareth dont le regard doux et profond pénétrait les secrets de son cœur... Agenouillé, il tendait les mains au Maître divin, implorant son soutien et sa miséricorde... Des larmes ardentes lui brûlaient le visage triste et décharné..
À ses yeux moribonds, la foule furieuse du cirque avait disparue...
Nestor était la réincarnation de l'orgueilleux sénateur Publius Lentulus Corneille. (Voir l'œuvre* Il y a 2000 Ans... ») Note d'Emmanuel
C'est alors qu'une figure d'ange ou de femme4 a marché vers lui, lui tendant ses mains affectueuses et translucides... Le messager du ciel s'est agenouillé auprès du corps ensanglanté et lui a caressé les cheveux, l'embrassant doucement. L'ancien esclave a ressenti la caresse de ce baiser divin et son esprit fatigué et affaibli s'est légèrement endormi comme s'il était un enfant.
Livia. (Voir * Il y a 2000 Ans... ») - Notes d'Emmanuel
Dans toute l'arène ont vibré des radiations invisibles descendant des régions les plus élevées de la spiritualité... Des êtres dévoués et resplendissants tendaient fraternellement leurs bras aux compagnons qui abandonnaient leur enveloppe périssable, témoignage de leur foi, par l'injure et par la souffrance.
Quelques minutes plus tard, tandis que les serviteurs de l'amphithéâtre retiraient des poteaux de martyre les restes ensanglantés aux cris des applaudissements de la foule en folie, Helvidius Lucius, à la tribune d'honneur, serrait nerveusement les mains de sa femme, lui laissant comprendre les commotions inexplicables qui l'accablaient en son for intérieur. Pendant cela, obligée de garder une attitude protocolaire, elle fixait son compagnon de ses yeux larmoyants.
Mais, dans le palais de l'Aventin, en cet après-midi limpide et serein, le spectacle fut peut-être plus impressionnant par sa majesté douloureuse et silencieuse.
Recueillis dans une salle de repos, Cneius Lucius el sa petite-fille observaient tous les mouvements extérieurs aux cérémonies d'Hadrien, remarquant que la vague du peuple s'était engouffrée dans le cirque pour les derniers spectacles programmés.
Alors que le ciel romain s'obscurcissait, la jeune fille alla chercher le bout de parchemin où Cirus avait écrit les huit rimes du dernier hymne, s'exclamant au vieillard doucement :
Grand-père, à cette heure Nestor et Cirus doivent être en marche pour le sacrifice !
Tu crois, grand-père, que nos êtres chers peuvent revenir du ciel pour soulager notre destinée?
Pourquoi pas, ma fille ? Puisque Jésus a promis de venir à la rencontre de ceux qui se réunissent en son nom, en ce monde, pourquoi ne permettrait-il pas à ses messagers de revenir auprès de ceux qui les aiment déjà dans cette vie ?
Célia a tourné vers le vieillard ses grands yeux tristes illuminés par une candeur merveilleuse.
Ensuite, très sereine, elle s'est levée, s'est dirigée vers la grande fenêtre qui donnait sur le Tibre dont les eaux reflétaient les nuances de l'heure crépusculaire.
Fixant le parchemin, elle en a lu tout le contenu en silence, puis chanta d'une voix presque imperceptible les vers de l'hymne chrétien et s'arrêta d'une manière particulière à la dernière strophe, la relisant en larme, elle cherchait à deviner dans ces lignes la pensée de l'élu de son cœur.
Le vénérable patricien écoutait sa voix tendre, comme s'il écoutait un oiseau déplumé, abandonné et seul parmi les hivers du monde, sans pouvoir extérioriser les émotions qui assaillaient son âme douloureuse.
Les réflexions les plus tristes peuplaient son être, elle sentait son cœur battre à un rythme terriblement accéléré.
L'âme torturée, il observait sa petite-fille qui se tournait maintenant vers le ciel à chercher parmi les nuages du bleu vespéral le cœur de celui qu'elle idolâtrait.
Quelques minutes se sont écoulées ainsi, longues et pénibles pour sa pensée épuisée et meurtrie.
À un moment donné, alors que le firmament s'était déjà évanoui, de ses yeux tendres et profonds, la jeune fille a fixé le ciel avec une plus grande attention comme si elle percevait une vision qui l'émerveillait.
Elle semblait absente de toutes les sensations du monde extérieur, de tout ce qui l'entourait, se figurant même ne pas percevoir la présence de son grand-père qui accompagnait son extase, prise d'émotion.
Après quelques instants, cependant, ses bras ont à nouveau bougé, les expressions qui lui étaient propres reprenaient le cours de la réalité et de la vie.
C'est vrai ! - a soupiré Cneius Lucius presque dans un murmure.
Grand-père - a-t-elle dit alors avec une placidité divine qui brillait dans ses yeux -, j'ai vu un groupe de colombes blanches dans le ciel, on aurait dit qu'elles sortaient du cirque du martyre !...