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Je refuse donc la tte de mon empire les commentateurs des gomtres qui vnrent comme idole ce qui a servi btir et, de ce que les meut un temple, adorent son pouvoir dans les pierres. Ceux-l me viendraient gouverner les hommes avec leurs vrits pour triangles.

Cependant je m'attristai:

Il n'est donc point de vrit, dis-je mon pre.

Si tu russis me formuler, m'expliqua-t-il en souriant, quel souhait de la connaissance Une rponse est refuse, je pleurerai aussi sur l'infirmit qui nous entrave. Mais je ne conois point l'objet que tu me prtendais saisir. Celui-l qui lit une lettre d'amour s'estime combl quels que soient l'encre et le papier. Il ne cherchait l'amour ni dans le papier ni dans l'encre.

CV

Il m'apparut donc que les hommes, soumis aux illusions de leur langage et ayant observ qu'est fertile de dmontrer l'objet pour acqurir des connaissances, ayant constat de cette mthode l'efficacit foudroyante, ruinrent leur patrimoine. Car ce qui est vrai, et sans doute non absolument de la matire, devient faux pour l'esprit. Tu es en effet toi, homme, ainsi bti que les objets te sont vides et morts s'ils ne sont point d'un royaume spirituel et que mme si te voil pais et ladre tu ne souhaites cet objet-ci plus beau que l'autre qu' cause du sens qu'il a chez toi, de mme que l'or, tu le souhaites comme gonfl de trsors invisibles et que ta femme, si elle souhaite cette parure ce n'est point pour s'en alourdir la chevelure mais cause qu'elle est convention dans un langage et hirarchie et message secret et signe de domination.

M'apparut ainsi la seule fontaine o se pussent abreuver l'esprit et le cur. Le seul aliment qui te convnt. Le seul patrimoine sauver. Et qu'il te fallait rebtir l o tu avais dilapid. Car te voil assis parmi tes ruines d'objets pars, et si l'animal est satisfait, l'homme est chez toi menac par la famine et ne connaissant point ce dont il a faim, car tu es de mme ainsi bti que ton besoin de nourriture est le fruit de ta nourriture et que si une part de toi est maintenue chtive et en demi-sommeil faute d'aliment ou d'exercice, tu ne rclames ni cet exercice ni cet aliment.

C'est pourquoi tu ne sauras point, si nul ne descend vers toi de sa montagne et ne t'claire, quelle route suivre te sauvera. De mme que tu ne croiras point, aussi savamment que l'on te raisonne, quel homme natra de toi ou s'y rveillera puisqu'il n'y est point encore.

C'est pourquoi ma contrainte est puissance de l'arbre et par elle libration de la rocaille.

Et je puis, d'tage en tage, te faire communiquer avec des trsors de plus en plus vastes. Car certes est dj beau celui de l'amour et de la maison et du domaine et de l'empire et du temple et de la basilique qu'est devenue l'anne quand l'ont change les jours de fte, mais si tu me permets de te guider pour t'aider gravir la plus haute montagne, j'ai des trsors pour toi si durs conqurir que beaucoup y renonceront dans leur ascension, car pour btir l'image nouvelle, je leur vole les pierres d'autres temples auxquels ils tiennent.

Mais, russissant pour quelques-uns, je leur suis tellement pathtique que l'me leur brle. Car il est des structures si chaudes qu'elles sont comme un feu pour les mes. Ceux-l je les dirai embrass par l'amour.

Viens donc chez moi te faire btir, tu sortiras resplendissant.

Mais Dieu se perd. Car je te l'ai dit du pome. Si beau qu'il soit il ne peut pas t'alimenter pour tous les jours Ma sentinelle qui va de long en large ne peut non plus tre jour et nuit fervente l'empire. Se dfait souvent dans les mes le nud divin qui noue les choses. Va voir chez le sculpteur. Il est triste aujourd'hui. Il hoche la tte devant son marbre. Pourquoi, se dit-il, ce nez, ce menton, cette oreille car il ne voit plus la capture. Et le doute est ranon de Dieu, car il te manque alors et te fait mal.

CVI

Mais tu ne communiques qu' travers un crmonial. Car si, distrait, tu coutes cette musique et considres ce temple, il ne natra rien en toi et tu ne seras pas aliment. C'est pourquoi je n'ai point d'autre moyen de t'expliquer la vie laquelle je te convie que de t'y engager de force et de t'en allaiter. Comment t'expliquerais-je cette musique quand l'entendre ne te suffit pas, si tu n'es pas prpar pour t'en faire combler? Si prte mourir en toi l'image du domaine, pour ne laisser d'elle que ses gravats. Le mot d'ironie qui n'est que de cancre, un mauvais sommeil, un bruit qui te gne et te voil priv de Dieu. Te voil refus. Te voil assis sur ton seuil avec en arrire ta porte close, et totalement spar du monde qui n'est plus que somme d'objets vides. Car tu ne communiques point avec les objets mais avec les nuds qui les nouent.

Comment donc t'y ferai-je accder quand tu t'en dcroches si aisment?

D'o l'importance de mon crmonial, car il s'agit de te sauver de tout dtruire quand il t'arrive d'tre la porte de chez toi.

C'est pourquoi je condamne avant tout le mlangeur de livres.

Et je te btis et te maintiens tel, non que tu sois perptuellement aliment, ce qui n'est point de la faiblesse de ton cur, mais que tu sois route bien trace, porte bien ouverte, temple bien bti pour recevoir. Je te veux instrument de musique attendant le musicien.

C'est pourquoi je t'ai dit que le pome que je t'ai rserv tait ascension de toi-mme.

Et ceux-l seuls accdent la connaissance vritable qui refont le chemin perdu et retrouvent les tres qu'ils ont rpandus en gravats.

Je veux te montrer ta patrie qui est la seule o ton esprit se puisse mouvoir.

Et c'est pourquoi je dis encore que ma contrainte te dlivre et t'apporte la seule libert qui compte. Car tu appelais libert ce pouvoir que tu as de dmolir ton temple, de mler les mots du pome, d'galiser les jours que mon crmonial avait btis en basilique. Libert de faire le dsert. Et o te trouveras-tu?

Moi j'appelle libert ta dlivrance.

C'est pourquoi je t'ai dit autrefois: libert de l'esclave ou de l'homme, respect de l'ulcre ou de la chair saine? Justice pour l'homme ou pour la pgre? C'est contre toi, travers toi, pour toi que je suis juste. Et certes je suis injuste pour l'homme de la pgre ou le cancre ou la chenille qui n'a pas mu puisque je les force de se renoncer et de devenir.

CVII

Car t'instruisant je te contrains. Mais telle est la contrainte qu'une fois absolue elle

devient invisible, comme de t'obliger au dtour pour chercher la porte travers le mur, et tu ne me la reproches ni ne t'en lamentes.

Car les rgles du jeu de l'enfant sont contraintes. Mais il les souhaite. Car mes notables tu les vois briguer les charges et les devoirs des notables, lesquels sont contraintes. Et les femmes tu les vois qui obissent l'usage dans le choix de leurs parures, lesquelles varient chaque anne et l aussi il s'agit d'un langage qui est contrainte. Car nul ne souhaite la libert de ne plus tre compris.

Si je dnomme maison tel arrangement de mes pierres tu n'es point libre de changer le mot sous peine d'tre seul, faute de savoir te faire entendre.

Si je dis de fte et de joie tel jour de l'anne, tu n'es point libre de n'en point tenir compte sous peine d'tre seul, faute de communier avec le peuple dont tu sors.

Si je tire un domaine de tel arrangement de mes chvres, de mes moutons, de mes demeures, de mes montagnes, tu n'es point libre de t'en affranchir sous peine d'tre seul, faute de collaborer quand tu travailles l'embellissement du domaine.

Ta libert quand elle a fondu tes glaciers en mare te laisse d'abord seul, car tu n'es plus lment du glacier qui gravit le soleil sous son manteau de neige, mais gal l'autre et au mme niveau, sous peine de vous har cause de vos diffrences, et ayant trouv l'tat de repos que trouvent bientt les billes mles, et n'tant plus soumis rien qui vous domine, mme l'absolu du langage, voil dsormais interdite toute communication entre vous, et, vous ayant invent pour chacun votre langage particulier, ayant lu chacun votre jour de fte, vous voil tranchs les uns d'avec les autres et plus seuls que les astres dans leur infranchissable solitude.