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Elle aida Garrison à se lever.

— Tu es sûre qu’ils sont partis ?

— J’ai vérifié avec Mongenstern et les autres. Tous les terroristes ont regagné le maître cylindre, il n’y en a plus un seul dans le B. Ici, tout est calme… pour le moment. St. George va venir avec quelques-uns de ses bonshommes pour nous aider à défendre la maison.

Garrison trébucha sur une racine noueuse et Arlène l’agrippa par les épaules pour qu’il ne tombe pas.

— Tu dois te dire que je suis la reine des pommes, hein ? C’est moi qui ai armé ces guérilleros, c’est grâce à mon argent qu’ils sont venus ici.

— Vous n’êtes pas le seul à avoir financé le F.R.P.

— Je croyais qu’on serait en sécurité ici, loin d’eux, marmonna Garrison. Ils auraient renversé le Gouvernement mondial… ça se serait passé sur la Terre, loin. Ils ne pouvaient rien nous faire sur Île Un…

— Ne vous cassez pas la tête. Je vous dis qu’ils sont repartis. Ils ne reviendront peut-être pas.

— Si, ils reviendront.

— Vous avez été formidable, fit Arlène en le serrant plus fort. Vous étiez prêt à m’échanger contre vos collections.

— Je… (Garrison lui décocha un coup d’œil aigu. Le visage d’Arlène était rayonnant.) J’ai perdu un instant la tête, c’est tout, grommela-t-il. Je n’aurais jamais fait ça si…

— Vous l’avez quand même fait. Vous étiez décidé à leur donner ce que vous possédez de plus précieux pour me sauver.

— Arrête de larmoyer comme ça, bougonna Garrison.

— C’est bon, je me tais.

Mais elle avait l’air radieuse.

— Assez de simagrées !

Elle éclata de rire.

— Vous êtes loin d’être aussi mauvais que vous vous le figurez, si vous voulez mon avis.

— Et loin d’être aussi malin. Je me suis conduit comme un imbécile, comme le dernier des ânes. Quel idiot j’ai été ! Les regarder s’entre-tuer, c’est une chose… Quand ils envahissent votre demeure…

— Désormais, nous serons prêts. Nous serons protégés.

Garrison secoua la tête avec lassitude.

— Mais il n’y a pas d’endroits où se cacher ! Où veux-tu qu’on aille pour qu’ils ne nous trouvent pas ? Il n’y a pas d’endroits où se cacher, nulle part…

42

Un demi-million d’années passées à débusquer les bêtes par monts et par vaux, dans la chaleur et dans le froid, en plein jour et de nuit, ont fait acquérir à nos ancêtres l’équipement dont nous avons encore terriblement besoin pour abattre le dragon qui rôde aujourd’hui sur la Terre, épouser la princesse de l’espace et vivre heureux dans les clairières aux biches d’un monde où chacun sera éternellement jeune et beau.

Mais le doute assombrit cette vision paradisiaque. Les chasseurs qui tuaient les mammouths et surpassaient les fauves en astuce étaient des hommes dans la fleur de l’âge. Ils atteignaient rarement cinquante ans. Ceux qui parvenaient à cet âge vénérable finissaient leurs jours devant le feu de camp pendant que leurs fils et leurs petits-fils couraient la proie. Ils avaient pour fonction d’enseigner la sagesse des anciennes méthodes à leurs cadets… La souplesse d’esprit ne leur était pas nécessaire.

Elle l’est pour leurs descendants. Les barbons qui siègent aux conseils des nations d’aujourd’hui ont besoin d’autre chose que de la sagesse des jours anciens. Il leur faut être capables de se dépouiller des modes de pensée de leur jeunesse aussi prestement qu’Ona se défait de sa peau de bête quand il s’agenouille pour bander son arc…

Ces vieillards ne peuvent-ils pas se rendre compte que… le passeport pour une vie nouvelle est à portée de la main, qu’il leur suffit de le demander mais seulement à condition de renoncer à la prudence traditionnelle des hommes politiques… d’acquérir un esprit aussi audacieux et aussi flexible que celui du chasseur qui traque l’ours ?

Ne peuvent-ils comprendre que l’alternative au changement culturel n’est pas la perpétuation du statu quo mais l’échec d’une expérience cosmique, la fin des grandes aventures humaines ?

Carleton S. Coon,
The Story of Man,
Alfred A. Knopf éd., 1962.

Sortant du poste de surveillance, David s’engagea sur l’entrelacs de passerelles suspendues qui serpentaient entre des cornues de la taille de barils d’essence et des tubulures de métal gercées de buée.

Réduire toutes les sources lumineuses de l’aire de travail au tiers de leur intensité normale, subvocalisa-t-il dans son communicateur buccal.

Les panneaux luminescents pâlirent et la cristallerie féerique du laboratoire se mua en une sombre forêt enchantée.

Toutes communications radio et vidéophoniques avec l’extérieur sont interdites, ordonna-t-il.

Il entendit l’ordinateur lui répondre en entonnant sa mélopée crépitante et il hocha la tête avec satisfaction : ses implants lui permettaient de contrôler tous les systèmes du module.

Les lumières de la nacelle continuaient de briller de tout leur éclat et, tapi dans l’ombre qui noyait la passerelle, il voyait distinctement l’intérieur du bureau à travers sa large fenêtre.

Les voici.

Leo, Evelyn, Hamoud et Bahjat entrèrent dans le poste par la trappe d’accès du sas encastrée dans le plafond et descendirent lentement l’échelle. Ils avaient tellement hâte de se faire soigner qu’ils ne se sont fait accompagner par personne, pensa David. Ils n’ont sans doute même pas dit aux gens du F.R.P. qu’ils sont contaminés. Pour éviter la panique.

Les nouveaux venus regardaient autour d’eux, Hamoud visiblement furieux, Evelyn pâle et l’air épuisé. Leo s’écroula dans le fauteuil le plus proche. Seule Bahjat eut l’idée de se pencher à la fenêtre pour examiner le labyrinthe de tubes et le fouillis d’appareils encombrant le laboratoire. Elle avait du mal à tenir sur ses jambes et sa tenue était débraillée mais elle remarqua le pistolet que David avait laissé devant le téléphone et elle s’en empara.

Sceller le sas. Directives à l’intention de la tour de contrôle : récupérer la navette.

Il n’y eut que quelques déclics et quelques vibrations qui passèrent inaperçus des arrivants quand, automatiquement, le tambour du sas se referma et que la petite embarcation mit le cap sur le maître cylindre.

Maintenant, aucun d’entre nous ne peut plus s’échapper.

— Où est-il ? brailla Hamoud.

— Je suis là, dit David en approchant d’une flaque de lumière qui éclaboussait la passerelle.

La première réaction du terroriste fut d’essayer de fracasser la baie d’un coup de crosse mais l’arme ne fit que rebondir contre le plastoverre anti-explosions, désarticulant presque le bras d’Hamoud, brutalement ramené en arrière.

— Leo ! appela David. C’est vous qui êtes le plus mal en point. Venez. Je vais vous montrer où sont les produits dont vous avez besoin.

Le Noir bondit hors de son siège et se rua sur la porte donnant sur la passerelle. Hamoud voulut l’arrêter mais Leo le repoussa et sortit. Il n’avait pas lâché son fusil.

— Si c’est pas la bonne came, tu le regretteras, fit-il d’une voix de rogomme.

— N’ayez pas peur, lui répondit David.

Hamoud était sur le seuil de la porte.

— L’antidote ! Je veux l’antidote !

Leo se retourna à moitié de sorte que l’arme qu’il tenait négligemment dans son poing de Titan se pointa sur l’Arabe et il gronda :