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Deux FAL Commando étaient posés sur le siège passager. Alex en avait acheté huit à un trafiquant yougoslave qui se les procurait en pièces détachées à l’usine de Herstal.

Franck avait exigé qu’ils soient chargés à blanc, ce qui avait occasionné une discussion houleuse avec Sergio qui soutenait qu’en cas d’arrestation, un vol à main armée était puni de la même façon, que l’arme soit chargée à blanc ou à balles réelles.

Franck avait rétorqué qu’en cas d’arrestation, il préférait être condamné pour vol à main armée que pour homicide volontaire.

Ils montèrent sur la route et la Volvo partit à la rencontre du fourgon.

Recroquevillés dans le souterrain, Alex et Sergio pataugeaient dans la boue. Malgré le froid, ils étaient tous les deux en sueur. Ils étaient venus au lever du jour pour enfoncer un long poteau métallique dans le conduit.

Quand la base du tube était entrée en contact avec le sol, le sommet affleurait à la surface de la chaussée.

Sergio s’était incliné devant la précision avec laquelle Julie avait élaboré l’intervention. Elle avait également tenu compte de la vitesse du fourgon, de son poids et de l’emplacement des biellettes de direction pour déterminer le diamètre du poteau et la hauteur à laquelle il devait être hissé.

Dans la Volvo, le talkie-walkie crachota.

— Bravo.

Franck vit apparaître le fourgon au bout de la ligne droite.

Laurent tenait sur ses genoux un cadre métallique rectangulaire.

L’objet ressemblait à un châssis de fenêtre équipé de croisillons. Les profils étaient bourrés de semtex, un explosif qu’il s’était procuré au prix fort dans une entreprise de démolition hollandaise. Le produit avait l’aspect d’une pâte à modeler. On pouvait le manipuler sans danger, mais un seul kilo était capable de souffler une maison entière.

Julie avait estimé que la partie centrale de la cloison latérale se prêtait au mieux à l’explosion tout en minimisant le risque pour les convoyeurs.

— Charlie.

Franck déroula la cagoule sur son visage et se déporta vers le milieu de la route, obstruant en partie le passage en sens inverse.

Surpris par la manœuvre, le chauffeur du fourgon ralentit et serra à droite.

Les yeux vissés aux jumelles, Julie observait la scène. Le scénario se déroulait tel que prévu.

Elle sentit son estomac se contracter et enfonça la touche du talkie-walkie.

— Delta.

Sous la chaussée, Alex s’essuya les mains et agrippa les poignées fixées de part et d’autre du tube.

Le fourgon était à une trentaine de mètres.

— Echo.

Alex souleva le poteau et le fit coulisser dans le conduit pendant que Sergio glissait un bloc de bois sous la base. Alex reposa le pilier sur le bloc et tous deux sortirent du tunnel au pas de course.

À la surface, le chauffeur du fourgon vit surgir le pieu, mais resta sans réaction.

Dans un fracas de tôle, le véhicule percuta l’acier et fit une violente embardée. Les deux occupants furent précipités vers l’avant et la tête du convoyeur heurta le pare-brise.

Comme l’avait prévu Julie, le fourgon continua sa course au ralenti sans dévier de sa trajectoire. La roue avant droite était en partie arrachée, le sous-bassement raclait le sol et des étincelles jaillissaient de toutes parts.

Le véhicule parcourut encore quelques mètres avant de s’immobiliser.

Franck avala la distance qui le séparait du fourgon, tira le frein à main et sortit de la Volvo.

Il pointa son arme en direction du chauffeur tandis qu’Alex et Sergio, en tenue kaki et cagoulés, surgissaient à l’arrière du fourgon avec leur FAL. Au passage, ils immobilisèrent les roues arrière à l’aide de cales, se positionnèrent de chaque côté des vitres latérales et mirent en joue les deux hommes.

Laurent sortit à son tour de la Volvo, muni du cadre.

Des aimants étaient rivés à chaque coin du châssis. Il fonça vers le côté gauche du fourgon, plaqua l’explosif contre la paroi et planta un détonateur à mèche d’une dizaine de centimètres dans le semtex.

Malgré l’entraînement et les répétitions, il remarqua que ses mains tremblaient.

Face au fourgon, les muscles crispés, Franck guettait les environs.

Une voiture surgit en provenance de l’autoroute. Le conducteur se rendit compte de ce qui se passait, fit demi-tour et repartit à tombeau ouvert.

Laurent fit signe qu’il était prêt.

Franck hurla.

— Restez dans la cabine, mettez-vous à plat ventre et ouvrez la bouche, ça va péter.

Livides, les deux hommes obéirent et disparurent sous le tableau de bord.

Laurent mit feu à la mèche et s’écarta. Quatre secondes plus tard, une déflagration déchira l’air et fit trembler le fourgon.

Laurent, Alex et Sergio se ruèrent dans la brèche pendant que Franck maintenait son arme pointée en direction du véhicule.

Les trois hommes réapparurent trente secondes plus tard, chargés de sacs bourrés d’enveloppes. Ils les glissèrent dans leur dos, coururent vers la Volvo et jetèrent les sacs dans le coffre.

Alex s’installa au volant.

Franck, les sens en alerte, jeta un coup d’œil circulaire avant de monter à son tour. Rien en vue. Alex passa devant le fourgon éventré, remonta sur l’autoroute et prit la direction de Bruxelles.

À quelques centaines de mètres de là, Julie remonta dans l’Audi. L’estomac noué, elle rejoignit l’autoroute, mais la prit dans le sens inverse et se dirigea vers Namur.

Elle sortit quelques kilomètres plus loin et s’enfonça dans un chemin qui menait au bois Henrard.

Elle parcourut quatre cents mètres et s’arrêta derrière une Volvo blanche en tous points identique à celle utilisée pour le braquage. Elle ouvrit l’une des portières arrière et alluma les bougies plantées dans une boîte d’allume-feu Zip.

L’idée du leurre était de Franck, la conception venait d’elle, la réalisation était signée Laurent.

Selon la longueur des bougies, il était possible de minuter l’instant où les flammes atteindraient les allume-feu, puis le temps que les allume-feu mettraient pour faire fondre le bidon en plastique dans lequel un mélange d’huile, de savon noir et d’essence prendrait la relève.

Elle prit soin d’entrouvrir les fenêtres pour assurer un appel d’air et referma la portière. Elle remonta ensuite dans l’Audi et repartit en direction de l’autoroute.

À vingt kilomètres de sa position, les quatre membres de la bande précipitaient leur Volvo dans la Meuse à proximité de Dave.

Dès que la voiture eut disparu, ils se séparèrent.

Alex et Sergio grimpèrent dans la camionnette Volkswagen qu’ils avaient utilisée le matin pour transporter le poteau. De leur côté, Franck et Laurent emportèrent le butin et montèrent dans une BMW.

À 10 h 46, le talkie-walkie fit tressaillir Julie.

La voix de Franck résonna.

— Zulu.

Elle arrêta le chronomètre.

L’opération avait duré vingt-deux minutes et quarante secondes, l’attaque du fourgon deux minutes et cinquante-deux secondes, soit sept secondes de plus que ce qu’elle avait prévu dans ses calculs.

Elle alluma la radio dans un état second.

La voix chaude de Freddie Mercury emplit l’habitacle.

Des larmes lui montèrent aux yeux. Elle pensa à Franck, à l’amour dévorant qu’elle lui vouait et à sa vie qui venait de basculer.

43

Un beau pactole

Le braquage de Lustin leur rapporta dix-sept millions de francs belges.

Le succès de l’opération suscita un élan d’enthousiasme au sein de l’équipe. Tout s’était déroulé comme ils l’avaient prévu dans le scénario, les automatismes étaient acquis et chacun avait respecté sa partition à la lettre.