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– Mon cher époux, maintenant j’ai le droit de parler et de te dire que je suis innocente et que l’on m’a faussement accusée.

Et elle lui dit la tromperie de la vieille qui lui avait enlevé ses trois enfants et les avait cachés. Pour la plus grande joie du roi, ils lui furent ramenés et, en punition, la méchante belle-mère fut attachée au bûcher et réduite en cendres. Pendant de nombreuses années, le roi, la reine et ses six frères vécurent dans le bonheur et la paix.

Du Souriceau, de l’oiselet et de la saucisse

Il était une fois un souriceau, un oiselet est une petite saucisse qui s’étaient pris d’amitié, avaient mis en commun les soucis du ménage et vivaient fort heureux, tranquilles et contents depuis un bon bout de temps. L’oiselet avait pour tâche d’aller chaque jour d’un coup d’ailes jusque dans la forêt pour ramasser le bois; le souriceau s’occupait de puiser l’eau, d’allumer le feu et de mettre la table; la saucisse faisait la cuisine.

On n’est jamais content quand les choses vont bien. Et c’est ainsi que l’oiselet, un jour, rencontra en chemin un autre oiseau devant lequel il se félicite de l’excellence de son état. L’autre le rabroua et le traita de tous les noms, ce pauvre idiot qui faisait tout le gros travail pendant que les autres avaient la belle vie dans la maison: «Quand le souriceau a apporté son eau et allumé le feu, disait-il, il n’a plus qu’à aller se coucher dans la chambre, paresser et se reposer jusqu’à ce qu’on l’appelle pour se mettre à table. La petite saucisse, elle, n’a rien à faire qu’à rester douillettement devant le feu en surveillant la marmite, et quand approche l’heure du repas, tout ce qu’elle a à faire, c’est de plonger une fois ou deux dans le bouillon ou dans le plat, et c’est fini: tout est graissé, parfumé et salé!

Ils n’attendent que toi et ton retour avec ta lourde charge, mais lorsque tu reviens ils n’ont qu’à passer à table, et après qu’ils se sont gavés ils n’ont plus qu’à aller dormir à poings fermés, le ventre bien garni, jusqu’au lendemain matin. Voilà ce qui peut s’appeler une belle vie!»

Le jour suivant, l’oiselet, sensible à la provocation, se refusa à aller chercher le bois, affirmant aux deux autres qu’il était leur esclave depuis assez longtemps dans sa stupidité et qu’il fallait que ça change! Le souriceau et la saucisse eurent beau le supplier de toutes les manières, il ne voulut rien savoir et ce fut lui qui resta le maître, imposant ses conditions: ils n’avaient qu’à tirer au sort les différentes tâches. Ils tirèrent et le sort désigna la saucisse pour aller au bois, le souriceau pour la cuisine et l’oiselet pour puiser l’eau.

Qu’arrivera-t-il? La petite saucisse s’en alla de bon matin dans la forêt pour ramasser le bois, l’oiselet alluma le feu à la maison, et le souriceau prépara la marmite et surveilla la cuisson; puis tous deux attendirent le retour de leur compagne. Mais elle resta si longtemps en route qu’ils finirent par s’inquiéter vraiment, trouvant que cela ne présageait rien de bon. L’oiselet s’envola pour aller un peu à sa rencontre, et voilà que, sans aller bien loin, il rencontra un chien qui avait trouvé la saucisse à son goût et, la voyant en liberté, l’avait croquée d’un coup. L’oiselet pouvait bien s’en prendre au chien, l’accuser de vol et d’assassinat, qu’est-ce que cela changeait? Le chien, lui, se contenta d’affirmer qu’il avait trouvé des messages compromettants sur la saucisse, et qu’à cause de cela il avait bien fallu qu’il lui ôtât la vie.

Affligé de ce deuil et tout triste dans son cœur, l’oiselet ramassa le bois et rapporta la charge à la maison, où il fait le récit de ce qu’il avait vu et entendu. Le souriceau et l’oiselet étaient en grand chagrin, mais ils finirent par décider de faire contre mauvaise fortune bon cœur et de rester ensemble. L’oiselet, donc, dressa la table et le souriceau prépara la cuisine; au moment de servir et voulant imiter la saucisse et faire pour le mieux, il se plongea dans la marmite afin de parfumer le plat et relever son goût; mais, hélas! il n’alla pas bien loin: à peine entré, il était cuit et devait laisser là son poil, et sa peau, et ses os et sa vie, s’il faut tout dire.

Quand l’oiselet s’en vint pour chercher la marmite, il n’y avait plus trace de cuisinière dans la maison! Il chercha, fouilla, alla jusqu’à retourner tout le bois, mais il n’y avait plus de cuisinière dans la cuisine. Et voilà que, dans son émoi, il ne vit pas que le feu avait pris dans le bois qu’il venait de retourner; quand il s’en aperçut, c’était déjà un commencement d’incendie. Et il mit tant de hâte à courir puiser de l’eau pour l’éteindre, qu’il laissa échapper le seau et fut entraîné derrière lui au fond du puis, d’où il lui fût impossible de ressortir, et dans lequel il finit par se noyer.

Le Sou volé

Père, mère et enfants étaient tous à table, un jour, avec un ami qui était venu leur faire visite et qui partageait leur repas. Midi sonna pendant qu’ils étaient en train de manger, et au douzième coup, la porte s’ouvrit, à la grande surprise de l’invité, qui vit entrer un enfant d’une étrange pâleur et tout de blanc vêtu. Sans prononcer une parole, sans seulement détourner les yeux, il alla droit dans la chambre à côté, d’où il ressortit au bout d’un petit moment pour gagner la porte et s’en aller comme il était venu, silencieusement et sans tourner la tête. Comme cela se reproduisit exactement le lendemain et le surlendemain, l’ami finit par demander au père qui était ce bel enfant qui venait tous les jours et entrait dans la chambre.

– Je n’ai jamais rien vu, répondit le père, et je n’ai pas la moindre idée de l’identité possible de cet enfant. Le jour suivant, quand l’enfant entra de nouveau, l’ami le désigna au père qui regarda bien, mais ne put le voir, pas plus, d’ailleurs, que la mère ni les autres enfants. Alors l’ami se leva et alla sur la pointe des pieds entrouvrir la porte de la chambre pour voir ce qu’il s’y passait. L’enfant blanc était à genoux par terre, grattant et fouillant fiévreusement avec ses petits doigts dans les raies entre les lames du parquet; mais dès qu’il aperçut l’étranger, il disparut. L’ami revint alors à table et raconta ce qu’il avait vu, décrivant si bien l’enfant que la mère, tout à coup, le reconnut. «Mon Dieu! s’écria-t-elle, c’est lui, c’est le cher petit que nous avons perdu il y a quatre semaines.» Ils allèrent alors arracher le parquet dans la chambre et trouvèrent deux petits sous. Ces deux piécettes, c’était la mère qui les avait données, un jour, à son petit garçon pour qu’il en fît la charité à un pauvre; mais le garçonnet s’était dit qu’avec ces sous, il pourrait s’acheter quelque sucrerie; et il les avait gardés en les cachant dans une rainure du parquet. À présent, dans sa tombe, il ne connaissait pas le repos et il revenait tous les jours sur le coup de midi pour chercher les sous. Mais après que les parents les eurent vraiment donnés à un pauvre, jamais plus l’enfant n’est revenu.