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— En ma qualité de sénateur de l’Alliance, je ne jouis d’aucune autorité sur cette flotte, capitaine Midea, déclara Rione d’une voix plate. Vous l’ignoriez ? »

Midea rougit. « Si la coprésidente Rione exerce une grande influence sur les décisions de son commandant, cela revient au même. »

Rione eut un mince sourire. « Je suis parfaitement disposée à jurer sur l’honneur de mes ancêtres que le capitaine Geary n’a que très rarement suivi mes conseils à cet égard.

— L’honneur d’une politicienne… » marmonna quelqu’un.

Quelques commandants de la République de Callas se rembrunirent. Mais pas tous. D’autres réagirent à ce camouflet par un léger sourire. La plupart restèrent impassibles.

Geary était conscient que ses propres sentiments n’étaient que par trop transparents. « Mon propre honneur suffira-t-il à satisfaire ceux qui doutent de l’affirmation de la coprésidente Rione ? » les défia-t-il. Rione n’avait pas profité de l’occasion pour exprimer ouvertement ses doutes et il en était à la fois soulagé et reconnaissant.

Seul le silence fit écho à ses paroles, jusqu’à ce que le capitaine Mosko intervienne maladroitement : « On s’attendait à vous voir la défendre, capitaine Geary. Compte tenu de votre relation. Mais c’est aussi la réaction d’un officier honorable.

— La coprésidente Rione ne donne pas d’ordres au capitaine Geary et, si elle s’y essayait, il ne l’écouterait pas, déclara Desjani d’une voix claire et dépourvue d’émotion. C’est ce que j’ai pu déduire de mon observation directe du capitaine Geary sur la passerelle de l’Indomptable. Je l’affirme sur mon honneur et je suis bien convaincue que nul ne s’imagine que j’entretiens avec la coprésidente Rione une relation qui m’obligerait à la défendre.

— Vous vous sentez pourtant contrainte de défendre le capitaine Geary », insinua le capitaine Midea, sur un ton laissant entendre que les devoirs de Desjani envers Geary n’étaient pas de nature purement professionnelle.

Desjani le foudroya du regard. « Capitaine Midea, je défendrais tout officier capable de vaincre l’ennemi, surtout s’il montrait autant de compétence que le capitaine Geary. C’est mon commandant, celui de cette flotte et un homme d’honneur. Ce sont les Syndics et ceux qui les aident mes ennemis. »

Cette fois, le silence recéla une tension encore plus palpable. Le capitaine Casia le rompit, mais en donnant l’impression de n’appuyer les propos déplacés de Midea qu’à contrecœur. « Discussions et débats entre les commandants sont tolérés au sein de cette flotte sans donner lieu pour autant à des accusations de haute trahison.

— Ai-je accusé quelqu’un de haute trahison ? »

Geary profita du silence embarrassé qui suivit pour reprendre la parole : « Discussions et débats ouverts sont effectivement tolérés, mais pas après qu’on a décidé d’une ligne d’action. Je sais que certains officiers disent tout bas ce qu’ils n’osent pas dire tout haut. Je l’ai déjà déclaré et je le répète : j’encourage les suggestions et les commentaires constructifs, mais, en tant que commandant de cette flotte, j’ai aussi le devoir et la responsabilité de prendre des décisions et de donner des ordres. »

Le capitaine Badaya opina. « C’est ce que nous avons appris à attendre de vous, déclara-t-il en jetant un regard de mépris à Casia. Si nous ne pouvions pas emprunter le portail de Lakota, quel serait notre prochain objectif ? »

Reconnaissant à Badaya de lui fournir une occasion de débattre de problèmes stratégiques plutôt que de relations personnelles réelles ou fantasmées, Geary montra l’hologramme : « Deux options favorables s’offrent à nous. Le choix de notre destination suivante dépendra avant tout de ce que nous trouverons à Lakota et de l’importance des combats qui en résulteront. » Il chercha du regard le capitaine Tyrosian et les autres commandants des auxiliaires assis tout au bout de la longue table virtuelle. « Grâce au remarquable travail de nos auxiliaires, nous avons pu reconstituer nos stocks de munitions et de cellules d’énergie à un niveau convenable, même s’il en manque encore environ un pour cent à chacun de nos vaisseaux. Mais, pour ce faire, nous avons dû épuiser la majeure partie des minerais que nous avions récupérés à ce jour. Il nous faudra donc en trouver davantage pour remplir les soutes de nos auxiliaires. L’urgence de cette opération sera fonction du nombre de cellules d’énergie que nous devrons griller à Lakota et de la quantité des munitions que nous devrons y dépenser.

— Nous perdons beaucoup de temps à protéger et réapprovisionner les auxiliaires, semble-t-il, grommela le commandant de l’Aventureux.

— Si nous nous en dispensions, vous seriez déjà dans un camp de travail syndic, fit remarquer Duellos d’une voix enjouée. Difficile de se battre sans énergie ni munitions. »

Le commandant de l’Étançon acquiesça d’un hochement de tête. « Mon vaisseau a subi de gros dommages à Daïquon. Les ingénieurs se sont crevé la paillasse pour nous aider à réparer. Mes gars et moi sommes ravis de continuer à les escorter jusqu’à ce que nous soyons à nouveau opérationnels. »

Un certain nombre d’officiers se retournèrent vers Yin et les commandants par intérim du Majestic et du Guerrier. On procédait actuellement à de lourdes réparations sur ces trois cuirassés et aucun d’eux n’avait défendu les auxiliaires.

« Nous leur sommes tout aussi reconnaissants, se hâta d’affirmer le capitaine de frégate Suram du Guerrier. Nous le serons peut-être à temps pour Lakota. »

Le commandant du Revanche sourit. « Sans vous la quatrième division n’est plus la même. » Son sourire s’évanouit. « Il nous reste toujours à venger le Triomphe. Nous serons bien contents de trouver le Guerrier à nos côtés pour nous aider à rendre aux Syndics la monnaie de leur pièce. »

Les dommages. Geary fixa le dessus de la table, la mine renfrognée, en cherchant à se rappeler le détail des avaries infligées à ses vaisseaux les plus endommagés. Le Titan avait réparé les siennes, causées par une mine, et le Guerrier était en bonne route, mais Orion et Majestic restaient tout juste capables d’avancer, tandis qu’un certain nombre d’unités plus légères s’employaient âprement à se remettre en état. Si seulement il pouvait s’affranchir de la traque des Syndics pendant deux mois, dans un système stellaire riche en ressources… et disposant d’un chantier naval… d’un gros… Autant espérer tomber sur un portail de l’hypernet non surveillé par les Syndics. Nos chances sont à peu près aussi fortes. « Nous les ferons encore payer, ajouta-t-il. La flotte ajustera sa trajectoire vers le point de saut pour Lakota. Nous y pénétrerons plus lentement qu’ici et, cette fois, dès notre émergence, nous négocierons un virage sur tribord pour éviter les champs de mines. Nous serons encore parés au combat, mais je ne m’attends pas à tomber sur une force d’interception aussi puissante qu’à Ixion.

— Quand les autorités syndics d’Ixion auront rendu compte de l’aisance avec laquelle nous avons balayé les défenseurs du point de saut de Daïquon, leur haut commandement ne répétera certainement pas la même erreur, fit observer Tulev.

— Sauf si nous avons de la chance, répondit Geary, faisant éclore quelques nouveaux sourires. D’autres questions ? Parfait. Nous nous reverrons à Lakota. »

Quatre silhouettes s’attardèrent cette fois avec Geary dans la salle de conférence après la disparition des autres officiers : Tanya Desjani, bien sûr, mais aussi Badaya, Duellos et Tyrosian.