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Machinalement, elle lui rendit son sourire. En passant au milieu des touristes la religieuse fut séparée du délégué. Instinctivement elle sortit à demi le parabellum de sa poche.

Lo-ning aperçut l’arme une fraction de seconde. Déjà la Noire était sur le trottoir, à l’extérieur de la grille, et avait rejoint le délégué. La Chinoise se demanda si elle n’avait pas rêvé. Mais elle revit le sourire bizarre et crispé du Noir. Quelque chose de pas normal du tout était en train de se passer sous le nez de toutes les barbouzes veillant au bon déroulement du vote.

Plantant là ses touristes elle prit ses jambes à son cou, fonçant vers le bar des délégués où elle savait trouver Malko. Ensuite, elle changea d’avis. Pour gagner du temps, elle se rua sur un téléphone, dans l’entrée, et alerta la section chinoise. À charge, pour eux, de répercuter le tocsin.

* * *

Ce n’est qu’à la quatrième religieuse que le garde de l’ONU à l’entrée du bar des délégués commença à se poser des questions. Deux d’entre elles étaient ressorties en compagnie chacune de deux délégués. Mais c’était trop tard, elle était déjà passée, escortant un petit Guyanais qui lui arrivait à l’épaule. Cent mètres plus loin, dans le promenoir Gandhi, la religieuse vit venir à elle deux Chinois, marchant très écartés l’un de l’autre. Comme pour lui barrer le passage.

Tirant le Malais par le bras, elle bifurqua brutalement sur la droite, pour rattraper le grand escalier. Les Chinois se mirent à courir.

Il y eut deux bruits sourds et étouffés. Un des Chinois boula sur le tapis et resta immobile. L’autre glissa lentement le long d’une superbe tapisserie chinoise. La religieuse entraîna le Malais, rentrant son parabellum. Le diplomate était trop terrorisé pour crier lorsqu’ils passèrent devant un garde de l’ONU.

De toute façon, les gardes en uniforme n’étaient pas armés.

* * *

Un peu plus tard le secrétaire général des Nations Unies fut extrêmement surpris de trouver sur le palier du trente-huitième étage – son étage – un individu qui le salua poliment sans toutefois rentrer un Smith et Wesson de gros calibre à faire rêver Pecos Bill. Le péché mignon de Chris Jones. Le diplomate se dit qu’il était temps qu’il retourne dans son pays. Jusqu’ici, s’il n’avait empêché aucune guerre, il était au moins arrivé à faire régner la paix dans les couloirs de l’ONU.

Chapitre XIX

Cette fois le colonel Tanaka voulait être tranquille. Il assista à la sortie des fausses religieuses, au volant de sa Mercédès, juste devant le dais de l’entrée des délégués.

Tout semblait se passer bien. Les deux voitures des hommes de Lester étaient garées de l’autre côté de l’avenue. Tanaka compta avec satisfaction les délégués emmenés. La balance repenchait de son côté. Lester avait eu une bonne idée. Les délégués enlevés appartenaient à des pays qui n’étaient pas sous les projecteurs de l’actualité. Le fait qu’ils n’apparaissent pas en séance ne choquerait pas. Cela se produisait fréquemment, lors des abstentions.

Les deux voitures démarrèrent.

La porte de la Mercédès s’ouvrit brutalement au moment où Tanaka embrayait. Malgré tout son sang-froid Tanaka sursauta.

Une jeune Chinoise se pencha à l’intérieur de la voiture, l’air affolé.

— Monsieur, dit-elle, laissez-moi monter. Vite. Il y a un enlèvement. Les deux voitures là-bas. Il faut les suivre.

Le colonel Tanaka crut vraiment que le Fuji-Yama lui tombait sur la tête. Il ne manquait plus que cela. Son trouble fut tout à fait sincère.

— Je ne comprends pas, mademoiselle. Que se passe-t-il ?

La Chinoise monta à côté de lui et lui dit d’une voix autoritaire :

— Sortez et suivez les deux voitures là-bas, la blanche et la verte. Et arrêtez-vous près du premier policier que nous rencontrerons.

Lo-ning avait compris que personne, à part elle, n’aurait le temps d’intervenir. Elle se préparait à arrêter une voiture sur la Première Avenue lorsqu’elle avait repéré Tanaka au volant de sa voiture.

Tanaka obéit, le cerveau en ébullition. Les deux voitures avaient déjà cent mètres d’avance. Il les recolla facilement et regarda sa voisine. Elle s’était un peu calmée. Il frémit en pensant à ce qui se serait passé si elle était montée dans une autre voiture que la sienne.

— Expliquez-moi ce qui se passe, fit-il, jouant le diplomate idiot. Est-ce que je peux vous aider ?

Un peu détendue, la Chinoise expliqua :

— Les gens dans les deux voitures devant ont enlevé des délégués à l’ONU pour les empêcher de voter cet après-midi.

— Mais il faut prévenir la police, fit « horrifié » le Japonais. Ce n’est pas votre travail.

— C’est un peu mon travail, dit Lo-ning. Mais je préviendrai la police dès que je pourrai. Je vous remercie de m’aider. C’est une chance que vous ayez été là.

— C’est une chance, en effet.

On ne savait pas encore pour qui. Les deux voitures filaient droit au nord, vers Harlem. Vers un building de West End Avenue.

— Ils sont armés, fit sombrement Lo-ning.

Le colonel Tanaka demeura silencieux. Il fallait absolument trouver un moyen d’éliminer cette Chinoise. En plein New York, à quatre heures de l’après-midi. Et il n’était pas armé. Depuis l’élimination de Rikoro c’était dangereux. Soudain, la jeune fille gesticula.

— Là, là…

Une voiture de police était stoppée au coin de la 61e Rue. Tanaka ralentit mais objecta :

— Nous risquons de les perdre.

— C’est vrai, reconnut Lo-ning.

Elle baissa la vitre de la Mercédès et chercha à attirer l’attention des policiers. Sans aucun succès. Tanaka avait accéléré pour rattraper les deux autres voitures.

Ils ne rencontrèrent plus aucune voiture de patrouille jusqu’à Harlem. Lorsqu’elle vit les voitures s’engager dans le parking souterrain, Lo-ning poussa un cri de joie.

— Arrêtez, arrêtez tout de suite. Il faut prévenir la police.

— Allons au plus proche commissariat, suggéra Tanaka.

— Non, je veux attendre ici, fit Lo-ning. C’est plus sûr. Cela peut être une feinte. D’ailleurs il y a une cabine téléphonique un peu plus loin. Je vous remercie de m’avoir rendu service.

Le colonel Tanaka prit l’air profondément ennuyé.

— Mademoiselle, cela m’ennuie de vous abandonner ici seule. C’est dangereux.

— Bon, d’accord, dit Lo-ning. Amenez-moi jusqu’à la cabine. Je vais appeler et nous resterons là jusqu’à ce que la police arrive.

Tanaka ralentit. Il lui restait moins d’une minute pour se débarrasser de la Chinoise.

* * *

Tout le monde avait commenté le meurtre de Mamadou Rikoro parmi les délégués. Mais la disparition des autres membres était passée complètement inaperçue. De même que le meurtre des deux agents chinois. En effet la séance de l’Assemblée générale venait de reprendre. Malko tenait un conseil de guerre dans le bureau du colonel MacCarthy avec Al Katz. Jamais on n’avait vu un tel tohu-bohu à l’ONU.

— Il n’y a plus qu’à prier, reconnut Malko. En espérant qu’aucun autre délégué n’ait été acheté d’une façon ou d’une autre. L’orgie n’avait pas donné les résultats attendus. Sauf dans un cas…

— Nous disposons encore de deux heures, dit Al Katz. Avec le système électronique cela ne dure pas plus d’une demi-heure.

Effondré, le colonel MacCarthy promit de tripler les gardes autour de la salle et d’y mettre tous les civils armés dont il disposait.