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— Sergent, si votre Rennie est capable de mettre sur écoute les appels qui viennent de l’extérieur du Dôme, nous sommes dans de sales draps.

— Ce n’est pas mon Rennie.

— Je suis heureux de vous l’entendre dire.

— Et je ne suis plus dans l’armée. Je ne vois même plus la 67 dans mon rétroviseur, aujourd’hui, monsieur.

— Légèrement inexact, sergent. Par ordre du président des États-Unis, vous avez été réintégrée. Soyez la bienvenue.

— Monsieur, je me demande si je dois vous dire merci, ou bien d’aller vous faire foutre. »

Cox rit, mais sans beaucoup de joie. « Jack Reacher vous envoie le bonjour.

— C’est par lui que vous avez eu mon numéro ?

— Oui, et il a ajouté une recommandation. Une recommandation de Reacher, ce n’est pas n’importe quoi. Vous m’avez demandé ce que vous pouviez faire pour moi. La réponse est double, mais les deux choses sont simples. Un, sortir Barbara du merdier dans lequel il est. À moins que vous ne le pensiez coupable ?

— Non, monsieur. Je suis certaine de son innocence. Ou plus exactement, nous en sommes certains. Nous sommes plusieurs à le penser.

— Bien. Excellent. » Le soulagement était perceptible dans la voix du colonel. « Et deux, faire dégringoler ce salopard de Rennie de son perchoir.

— Ce serait le boulot de Barbie. Si… vous êtes sûr que la ligne est sécurisée ?

— Sûr et certain.

— Si nous pouvons le faire sortir.

— C’est déjà en route, non ?

— Oui, monsieur, je crois bien.

— Excellent. De combien de Chemises brunes dispose Rennie ?

— À l’heure actuelle, une trentaine, mais il continue à recruter. Et ici, à Chester’s Mill, ce serait plutôt des chemises bleues, mais je crois avoir compris ce que vous vouliez dire. Ne le sous-estimez pas, colonel. Il a une grande partie de la ville dans sa poche. Nous allons essayer de faire sortir Barbie, et vous devez prier pour que nous réussissions, parce que toute seule je ne peux pas faire grand-chose contre Big Jim. Renverser des dictateurs sans la moindre aide extérieure, ce n’est vraiment pas dans mes cordes. Et sachez que je n’appartiens plus à la police de Chester’s Mill. Rennie m’a botté les fesses.

— Tenez-moi informé, quand vous pourrez et dans la mesure où vous le pourrez. Faites évader Barbara et confiez-lui votre opération de résistance. Nous verrons bien qui se fera botter les fesses.

— On dirait que vous regrettez de ne pas être ici, monsieur.

— C’est rien de le dire. » Il avait répliqué sans hésiter. « J’enverrais son petit train valser dans le décor en une demi-journée. »

Jackie en doutait, cependant ; les choses se passaient différemment, sous le Dôme. Ceux de l’extérieur ne pouvaient pas comprendre. Même le temps s’y écoulait de manière différente. Cinq jours auparavant, tout était normal. Et maintenant, regardez.

« Encore une chose, reprit le colonel Cox. En dépit de votre emploi du temps chargé, prenez le temps de regarder la télé. Nous allons faire de notre mieux pour pourrir la vie à Rennie. »

Jackie lui dit au revoir et coupa la communication. Puis elle retourna auprès d’Ernie. « Vous avez un générateur ? demanda-t-elle.

— L’animal m’a lâché hier au soir, répondit-il avec un humour grinçant.

— Eh bien, allons quelque part où il y a une télé qui fonctionne. Mon ami dit que nous devrions regarder les infos. »

Ils prirent la direction du Sweetbriar Rose. En chemin, ils rencontrèrent Julia Shumway et l’emmenèrent avec eux.

AU TROU

1

Le Sweetbriar devait rester fermé jusqu’à dix-sept heures, heure à partir de laquelle Rose avait prévu de proposer un repas léger, avant tout composé de restes. Elle préparait une salade de pommes de terre, un œil sur la télé posée sur le comptoir, lorsqu’on frappa à la porte. Elle reconnut Jackie Wettington, Julia Shumway et Ernie Calvert. Rose traversa la salle vide du restaurant, s’essuyant les mains à son tablier, et déverrouilla la porte. Horace le corgi trottinait aux basques de Julia, oreilles dressées, arborant un sourire amical. Rose vérifia que le panneau FERMÉ était toujours bien en place avant de redonner un tour de clef derrière eux.

« Merci, dit Jackie.

— Je vous en prie, lui répondit Rose. Je voulais justement vous voir.

— Nous sommes venus pour ça, dit Jackie en montrant la télé. J’étais chez Ernie et nous avons rencontré Julia en chemin. Elle était assise de l’autre côté de la rue, face à ce qui reste de son journal, à se désoler du désastre.

— Je ne me désolais pas, protesta Julia. Horace et moi, nous tentions d’imaginer comment on pourrait faire pour tirer un journal après la réunion de demain soir. Nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il se réduirait sans doute à deux pages, mais qu’il y en aurait un. J’y suis bien décidée. »

Rose eut un coup d’œil pour la télé. Une jolie jeune femme était à l’écran. Dessous, on lisait sur une bande défilante : ENREGISTRÉ UN PEU PLUS TÔT PAR ABC. Il y eut tout d’un coup une explosion et une boule de feu se déploya dans le ciel. La journaliste eut un mouvement de recul, poussa un cri et fit volte-face. Déjà, la caméra la quittait pour se braquer sur les fragments de l’avion d’Air Ireland qui dégringolaient vers le sol.

« Il n’y a rien d’autre que le passage en boucle de l’accident d’avion, dit Rose. Si vous ne l’avez pas encore vu, faites comme chez vous. Jackie ? J’ai vu Barbie en fin de matinée. Je lui ai apporté des sandwichs et ils m’ont laissée descendre jusqu’à sa cellule. J’avais Melvin Searles comme chaperon.

— Petite chanceuse, ricana Jackie.

— Comment l’avez-vous trouvé ? demanda Julia. Il va bien ?

— Il a l’air d’avoir essuyé la colère divine, mais je crois qu’il va bien, oui. Il a dit… je devrais peut-être ne confier cela qu’à vous, Jackie.

— Quoi qu’il ait dit, je crois que vous pouvez parler devant Julia et Ernie. »

Rose réfléchit, mais pas longtemps. Si Ernie Calvert et Julia Shumway n’étaient pas blanc-bleu, alors personne ne l’était. « Il m’a dit que je devais vous parler. Me réconcilier avec vous, comme si nous nous étions disputées. Il m’a dit de vous dire que j’étais correcte. »

Jackie se tourna vers Ernie et Julia. Rose eut l’impression qu’un échange question-réponse venait d’avoir lieu. « Si Barbie le dit, c’est que c’est vrai », observa Jackie, sur quoi Ernie approuva vigoureusement du chef. « Voilà, nous avons organisé une petite réunion pour ce soir. Au presbytère de la Congo. C’est un peu secret…

— Non, pas un peu, très, intervint Julia. Étant donné ce qui se passe ici en ce moment, rien ne doit être ébruité.

— Si c’est à propos de ce que je pense, j’en suis », dit Rose. Puis elle baissa la voix : « Mais pas Anson. Il porte l’un de ces foutus brassards. »

Juste à cet instant, le logo de CNN DERNIÈRE MINUTE apparut à l’écran, accompagné de l’horripilante et funèbre Musique pour un désastre qui signalait tout évènement lié au Dôme. Rose espérait voir Anderson Cooper ou, mieux encore, son bien-aimé Wolfie — tous deux étaient maintenant en résidence à Castle Rock —, mais ce fut Barbara Starr, la correspondante de la chaîne auprès du Pentagone. Elle se tenait devant le village de tentes et de mobile homes qui servait de base avancée à l’armée, à Harlow.

« Le colonel James Cox, le patron des opérations nommé par le Pentagone depuis qu’a commencé à se manifester ce mystère abyssal du Dôme, samedi dernier, est sur le point de tenir sa deuxième conférence de presse depuis le début de la crise. Son thème vient d’être annoncé aux journalistes, et il est assuré d’avoir toute l’attention des milliers d’Américains qui ont des parents ou des amis à Chester’s Mill. On nous a rapporté… » Elle se tut, écoutant ce qu’on lui disait à l’oreillette. « Voici le colonel Cox. »