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— Les déséquilibrés n’ont pas pour habitude d’agir de la sorte.

— Qu’en savez-vous ? s’énerve le professeur.

— Je vous rappelle que je suis garde du corps. J’ai protégé des gens célèbres, victimes de malades mentaux. À mon avis, c’est vous qui êtes visé. Pas votre fille.

Reynier repose sa tasse un peu brutalement sur la table.

— Et si c’est vous qui êtes visé, c’est vous que je dois protéger. Et non Maud…

— Maintenant, c’est vous qui allez m’écouter, répond Armand. Je veux que vous restiez ici pour protéger ma fille. Moi, je peux me défendre tout seul.

— Si vous le dites…

— C’est bien clair, Luc ?

— Très clair, monsieur.

— Et vous ferez des rondes pendant la nuit.

Luc hausse les épaules.

— Comme vous voudrez. Mais il attendra que j’aille me recoucher pour venir.

— Vous pouvez aussi tomber nez à nez avec lui, espère le professeur.

— Ça se peut, en effet, admet Luc.

— Et que ferez-vous, à ce moment-là ?

— Ce que je dois faire. Je le neutralise et j’appelle la police.

— Non. Vous le neutralisez et vous m’appelez. Moi, et personne d’autre. Compris ?

Luc le fixe longuement avant de répondre.

— Je le neutralise, je vous appelle… Et ensuite ? Vous l’égorgez avec votre scalpel ?

— Vous verrez bien, conclut le chirurgien.

— Vous n’aimez pas les violeurs, on dirait !

— Pourquoi ? Vous oui ?

Luc se permet un petit sourire en coin.

— Quel homme digne de ce nom les aimerait ? rétorque-t-il.

Armand se lève et se dirige vers la sortie. Mais au dernier moment, il se retourne et ajoute :

— Si je me retrouve en face de ce fumier avec un scalpel, ce n’est pas la gorge que je lui couperai.

Le chirurgien disparaît et Luc reste longtemps à fixer la porte qui vient de se fermer.

* * *

Il court à petites foulées dans les rues calmes.

Il est à peine huit heures, Maud n’est pas encore levée. Il peut donc se permettre un jogging en dehors de la propriété. Toutefois, Luc a décidé de rester dans le quartier pour pouvoir intervenir au plus vite en cas d’alerte.

Entretenir sa forme fait partie de son métier, après tout.

D’ailleurs, dès aujourd’hui, dans un coin de l’immense garage, il s’aménagera une mini-salle d’entraînement avec l’accord du maître des lieux. Un sac de frappe, un punching-ball, une barre pour les tractions, un mannequin de bois…

Il croise une vieille dame qui promène son chien, la salue d’un signe de tête. Il longe de magnifiques maisons, en partie cachées par de hauts murs d’enceinte et une abondante végétation.

Marianne aimerait vivre ici. Dans ce joli quartier, qui respire le calme et le luxe.

Luc ferme les yeux, elle arrive. Elle court à côté de lui, il entend son souffle régulier. Il accélère, elle aussi. Marianne est une sportive, elle n’a jamais eu aucun mal à le suivre.

Il arrive devant la propriété des Reynier, appuie sur le bouton de la télécommande et monte l’allée en courant.

Sur la terrasse de son studio, il décide de poursuivre son entraînement tant qu’il est chaud. Il pousse la table et les fauteuils et commence une série de pompes. Mais il est très vite interrompu par la sonnerie de son portable.

— Allô ?

— Bonjour, Luc. C’est Maud.

— Bonjour, Maud. Qu’est-ce qui se passe ?

— Rien de grave… Tu peux venir dans la cuisine ?

— Oui, bien sûr. J’arrive.

Il pousse la porte de son studio, attrape une serviette dans la salle de bains, se sèche rapidement et change de tee-shirt avant de marcher d’un pas rapide vers la maison. Il la contourne, longe la piscine et toque à la porte.

En ouvrant, Maud lui offre un sourire timide.

— Je t’ai dérangé ?

— Non, pas du tout, je m’entraînais.

— Entre.

Il pénètre dans la cuisine où la température fait glisser un frisson le long de sa nuque.

— Vous voulez un petit déjeuner ? propose Amanda. Après tous ces efforts, vous devez avoir faim !

— Oui, je veux bien, merci.

— Assieds-toi, ajoute Maud.

Le jeune homme s’exécute et Amanda pose devant lui un mug de café et une panière de toasts.

— Ici, tu ne vas pas mourir de faim ! sourit Maud.

— Je vois ça ! Ta belle-mère n’est pas encore levée ?

— Pourquoi, elle te manque ? lance la jeune femme avec un regard oblique.

— C’était juste une question…

— Sa Majesté Charlotte prend son petit déjeuner au lit, voyons !

Luc rigole de bon cœur tandis qu’Amanda s’installe avec eux.

— Alors, comme ça, tu t’entraînes tous les matins ? demande Maud.

— Tous les jours, oui. Ça fait partie du boulot.

— Et ça consiste en quoi ? questionne Amanda.

— Muscu, course, krav-maga…

— Krav-maga  ? répète Maud. C’est quoi, ce machin ?

— Du self-défense. Savoir désarmer un agresseur muni d’un couteau ou d’un flingue, notamment… Je fais aussi de la boxe thaï.

L’ambiance est détendue, Luc oublierait presque pourquoi il est là.

— D’ailleurs, faut que j’aille en ville récupérer quelques trucs pour m’aménager un espace d’entraînement dans le garage.

— Dans le garage de M. Reynier ? s’inquiète Amanda.

— C’est toujours mieux qu’au milieu de son salon, non ? Ne vous en faites pas, je lui ai demandé la permission et je n’abîmerai pas sa voiture !… Mais si je m’absente, ce serait bien que toi, tu ne sortes pas, ajoute-t-il à l’intention de Maud. Je n’en aurai pas pour très longtemps…

— Je t’ai justement appelé parce que je dois aller à Nice. Le lieutenant Lacroix m’a téléphoné ce matin pour me demander de passer au commissariat. Je crois qu’il veut me montrer des photos de pervers en tout genre. Et comme papa m’a interdit de sortir seule…

— Je vais t’accompagner.

— Faut que je vous laisse, dit Amanda en préparant un petit plateau.

— Vous allez apporter le petit déjeuner à Charlotte ? suppose Luc en consultant sa montre.

— Non ! Ça, c’est pour le jardinier. Il vient d’arriver…

Amanda les abandonne et Luc termine son café.

— Je me demande si Amanda n’est pas amoureuse de Sébastien, murmure Maud avec un sourire d’adolescente. Dès qu’il arrive, elle lui saute dessus !

— Vraiment ? s’étonne Luc. Il m’a l’air un peu rustre, pourtant… Et pas très futé.

Maud hausse les épaules.

— Je sais pas. Ce qui est sûr, c’est qu’il est bizarre… Une fois, il m’a fait un cours sur la libération spirituelle et l’unité des visages de Dieu !

Luc écarquille les yeux.

— C’est quoi, ce charabia ?

— Aucune idée ! Je n’ai rien compris à ses théories… On bouge ? Quand on sera passés chez les flics, on ira récupérer ton matériel. On va prendre la caisse de Charlotte, elle est plus spacieuse que la mienne.

— Je suis à vos ordres, mademoiselle Reynier.

* * *

L’Audi de Charlotte roule sur la promenade des Anglais. Les plages sont noires de monde, la crème solaire coule à flots. Maud contemple la mer qu’un vent léger ourle d’écume. Puis son regard glisse sur la multitude de corps qui cuisent au soleil.

Elle n’a reconnu personne. Des dizaines de visages, effrayants ou banals. Mais aucun qui ressemble de près ou de loin à la brute l’ayant agressée.