Выбрать главу

— Je ne veux pas lui faire peur. Je la sens si fragile, en ce moment… Quand je l’ai vue dans la piscine, tout à l’heure, j’ai cru que…

— Vous devez lui dire la vérité, tranche Luc. Elle sait que vous lui cachez des choses et ça ne l’aide pas, croyez-moi.

— D’accord. Je vais aller lui parler… Nous partirons avec l’Audi, je suppose ?

— Non. Avec le fric que vous prendrez demain à la banque, nous achèterons une voiture.

— Pourquoi ?

Luc soupire.

— Nous achèterons une voiture. Je connais un endroit où on pourra la payer en liquide. Nous achèterons aussi un portable à carte. Il ne faut pas qu’il puisse nous tracer.

— Je vois… Et cette maison, elle est où ? demande encore le professeur.

— Dans la Drôme, près de la Chapelle-en-Vercors. Une maison paumée en pleine montagne, précise Luc. Un endroit où personne ne pourra jamais vous retrouver…

* * *

Luc frappe avant d’entrer dans la chambre. Maud est assise par terre, contre le lit, vêtue d’un simple peignoir beige. Ses cheveux mouillés tombent lourdement sur ses épaules.

— Tu as préparé tes affaires ? demande Luc.

— Non…

D’un mouvement de la tête, elle désigne la valise posée près de la fenêtre. Une valise plutôt imposante. Mais encore vide.

Luc se poste devant elle, la regardant de haut.

— Il faut que tu sois prête demain matin, rappelle-t-il d’un ton sec.

— Je sais, murmure Maud.

Il la détaille quelques instants, comprend qu’elle est au plus mal.

— Tu es en manque ?

Elle se contente de hocher la tête.

— Prends un calmant. Tu dormiras et demain, ça ira mieux.

— Si c’était si simple…

Il soupire, en signe d’agacement.

— Tu veux de la codéine ?

— J’en ai pas…

— Je t’en ai apporté, dit-il en fouillant dans sa poche.

Il passe dans la salle de bains, revient avec un gobelet d’eau.

— Allez, prends ça, dit-il. Ça va te soulager un peu.

— Merci…

Il y a tant de détresse dans ses yeux qu’il consent à s’asseoir près d’elle.

— Je vais rester un moment…

Elle hoche à nouveau la tête. Remerciement silencieux.

— Cette saloperie de came, murmure-t-elle. Et pourtant, je donnerais n’importe quoi pour en avoir !

— Tu as bien failli donner ta vie, rappelle durement Luc.

Il regarde son visage abîmé par les coups du dealer.

— Il t’a violée ?

La question, brutale, la met mal à l’aise.

— Non.

— Tu as eu de la chance, alors !

— Quand t’es arrivé, il venait de se calmer et de me dire de me tirer. Mais au début, il était comme enragé ! J’ai vraiment cru qu’il allait me tuer.

Luc prend sa main dans la sienne.

— Pourquoi tu as fait ça ? demande-t-il.

— Fait quoi ?

— La piscine…

— Je sais pas, avoue-t-elle. Il me passe de drôles de trucs par la tête, des fois…

— Je ne veux plus que tu recommences, dit Luc. Tu me promets ?

Elle hoche la tête.

— Dis-le, exige Luc.

— Je te promets, murmure Maud.

— Bien… Ton père t’a expliqué la situation ?

— Oui.

Elle essuie une larme qu’elle n’a pas réussi à retenir.

— Ce type veut vraiment le tuer ?

— Il semblerait que oui.

— Tu… Tu crois qu’on va s’en sortir ?

— Je fais tout ce qu’il faut pour, assure Luc.

— Mais pourquoi il ne veut pas prévenir les flics.

— Parce qu’il a trop de choses à se reprocher. Et qu’il finirait en taule. Pour longtemps, apparemment.

— Mais la mort de cet enfant, c’était un accident ! s’écrie Maud avec rage. D’accord, il a commis une faute et il a menti, mais…

— Il n’y a pas que ça, indique Luc.

— Il m’a dit qu’il avait trafiqué les comptes de la clinique et planqué de l’argent à l’étranger… C’est si grave que ça ?

Luc hoche la tête à son tour.

— Si tout cela est révélé au grand jour, l’addition pourrait être salée et il peut dire adieu à sa chère clinique.

— Putain…

— Tu devrais essayer de dormir, maintenant.

— Ça m’étonnerait que j’y arrive !

— Il ne viendra pas cette nuit.

— Comment peux-tu en être sûr ?

Il hausse les épaules et se remet debout.

— Ce type est déterminé, mais il obéit à certaines règles. Je crois que cette nuit, on sera tranquilles.

Il lui tend la main, la soulève du sol. Elle se retrouve collée contre lui, ferme les yeux un instant.

— C’est un cauchemar, murmure-t-elle. C’est pas possible, je vais me réveiller…

— Je suis désolé, Maud.

— De quoi ?

— De tout ce qui t’arrive.

— Je n’ai jamais eu aussi peur de toute ma vie.

— Je suis là… dans la chambre juste à côté de la tienne.

— J’ai déjà perdu ma mère, je ne veux pas perdre mon père, sanglote Maud.

Il caresse ses cheveux, l’embrasse sur le front.

— Repose-toi, maintenant. La journée de demain risque d’être éprouvante.

Elle s’assoit sur son lit, tandis qu’il s’éloigne. Mais avant de sortir, il se retourne.

— Au fait, il faudra que tu laisses ton smartphone ici.

À l’expression de son visage, on dirait qu’il vient de lui demander de se couper une main.

— Je t’achèterai un autre téléphone demain.

— Mais…

— Fais ce que je te dis, prie Luc. Bonne nuit, Maud.

Il l’abandonne et avance discrètement dans le couloir. Lorsqu’il arrive devant la chambre du professeur, il s’immobilise et colle son oreille contre la porte.

Au début il n’entend rien d’autre que sa propre respiration. Mais bien vite, il perçoit un bruit étouffé.

Les sanglots de Reynier. Qu’il écoute pendant de longues minutes.

48

Luc range les sacs dans le coffre du Range Rover qu’il a acheté le matin même. Un 4 × 4 puissant, avec un faible kilométrage et des papiers en règle.

Trois valises et deux sacs pleins de provisions.

Reynier le regarde faire sans lever le petit doigt.

— Tout y est ? demande le garde du corps.

— Il manque la valise d’Amanda, indique le professeur.

Luc fronce les sourcils.

— Quand m’avez-vous entendu dire qu’Amanda venait avec nous ? rétorque-t-il.

— Mais… on ne peut pas la laisser là !

— Elle n’a qu’à prendre quinze jours de congé, voilà tout !

— Elle n’a pas d’appartement, nulle part où aller. Je ne vois pas en quoi ça vous dérange qu’elle nous accompagne…

— Vous avez peur d’avoir à nettoyer les chiottes vous-même, professeur ? C’est ça ?

— Ne soyez pas blessant ! s’offusque Reynier. Elle a peur de rester seule ici. Je vous rappelle que ce malade l’a agressée l’autre jour et qu’on sait qu’il va revenir !

— Eh bien payez-lui un bon hôtel sur la Croisette. Ça lui fera des vacances.

Soudain, la gouvernante sort de la dépendance et s’avance, une petite valise à la main. Luc ferme le coffre et s’adosse à la voiture, bras croisés.

— Salut, dit-il.

— Salut… Jolie voiture, dis-moi ! Il reste de la place pour mon bagage ?