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— C’est extraordinaire !

— Cette femme, qui est venue me voir, je crois qu’elle veut faire breveter la technologie glanée à partir de ce message, quelle qu’elle soit.

— C’est scandaleux ! s’insurgea Heather. Même si ce message existe – et j’en doute vraiment – il appartient à tout le monde ! De plus… ajouta-t-elle après une pause.

— Quoi ?

— … eh bien, reprit-elle, les sourcils froncés, si ce message existe, alors Josh s’est bien tué après avoir vu ce qu’il contenait. Peut-être que… peut-être ne veux-tu pas savoir ce qu’il dit ?

— Tu penses que son suicide serait lié au contenu de ce message ?

— C’est possible. Comme je te l’ai déjà dit, il n’était ni gay ni bisexuel, pour autant que je sache.

— Mais quel peut être le contenu d’un message qui pousse un homme à se suicider ? Sans doute quelque chose qu’il faut cacher à l’humanité entière ! observa Kyle.

Heather resta un instant silencieuse.

— Le message annonçait peut-être l’existence du paradis ? Le paradis absolu auquel chacun a droit ? hasarda-t-elle.

— Si c’était le cas, pourquoi en faire un secret ?

— Pour que l’humanité continue. Si tout le monde savait que c’est la vérité, nous nous suiciderions tous pour y arriver plus vite, et Homo sapiens disparaîtrait en une nuit.

Kyle médita cette idée.

— Alors, pourquoi laisser une version codée de ce message ? Pourquoi ne pas le détruire, tout simplement ?

— Il s’est peut-être pris pour le pape, dit Heather.

Kyle la regarda d’un air stupéfait.

— On dit bien qu’une prophétie est gardée sous clé au Vatican, expliqua Heather en souriant. Elle est là depuis des siècles. De temps en temps, un pape la regarde, et sa réaction est toujours la même : il est horrifié, et il s’empresse de la remettre sous clé. Du moins, c’est l’histoire qu’on raconte.

Kyle se rembrunit.

— Ce consortium veut que je travaille pour lui. Il me fait un pont d’or.

— Combien ? s’enquit Heather.

Elle le vit hésiter. Elle devina sa pensée avant qu’il eût le temps de lui répondre : si nous ne finissons pas par nous réconcilier, est-ce bien raisonnable que je dévoile l’importance d’une nouvelle source de revenus ?

— C’est une somme très substantielle, répondit-il.

— Je vois.

— Ils ont déjà tendu la perche à un autre chercheur qui est sur le point de trouver la solution.

Il fit une pause.

— C’est Saperstein.

— Ce type que tu détestes !

— Ouais.

— Je ne sais pas… Tu devrais peut-être accepter ?

— Pourquoi ?

— Suppose que Saperstein ou quelqu’un d’autre le fasse à ta place. Le message de Huneker, s’il existe vraiment, ne sera pas forcément rendu public pour autant ; il y a de fortes chances pour que le gouvernement en ait une copie, mais cela fait plus de vingt ans maintenant qu’il la garde à l’abri.

— Possible. Mais je suis sûr que le consortium me fera signer un accord de confidentialité.

— Ah oui, le si convoité ADC ! fit Heather en imitant son mari.

Il sourit.

— Ils ont probablement prévu de me faire signer un contrat très détaillé, dans lequel je promettrais de ne pas divulguer le contenu du message, ni même son existence.

— Hmm. Que vas-tu faire ?

Kyle ouvrit les bras.

— Je pense à une parodie des Monty Python, au sujet d’une plaisanterie si drôle que tu mourrais de rire si tu l’entendais ; elle avait été utilisée comme une arme par les Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle avait été traduite de l’anglais à l’allemand par plusieurs équipes, chaque personne traduisant un seul mot. Un type a vu accidentellement deux mots et il s’est retrouvé en réanimation.

Il s’interrompit.

— Je ne sais pas. Si quelqu’un te tendait un truc comme ça en te disant que c’est vraiment drôle, est-ce que tu n’aurais pas envie d’y jeter un coup d’œil ? Même si Huneker s’est tué après avoir lu le message extraterrestre, je veux savoir ce qu’il contenait.

— Il est peut-être indéchiffrable, comme ceux des Centaures. Même si tu réussis à trouver les nombres premiers, le message n’aura pas forcément un sens. Ce que je pense, c’est que malgré ce que je viens de dire, il y a quelques minutes, je crois qu’il est plausible que Josh se soit tué pour des raisons personnelles, et que ça n’ait rien à voir avec ce message.

— Peut-être, dit Kyle. Ou peut-être que le message faisait un pictogramme qui, par coïncidence, avait une signification uniquement pour Huneker.

Il montra du doigt la peinture de Dali.

— Du genre, il a volé du fric dans les troncs des églises, et le pictogramme évoquait Jésus sur la croix, ou un truc comme ça. Ça l’aurait rendu fou.

— Dans un cas comme celui-là, tu ne risquerais rien, toi, athée comme tu es, plaisanta Heather.

Kyle haussa les épaules.

— Tu devrais peut-être accepter, reprit Heather.

Elle baissa la voix.

— Après tout, si Becky…

Kyle hocha la tête.

— Oui, si Becky me fait un procès, enchaîna Kyle, et si je perds tout ce que je possède, ce ne serait pas mal d’avoir une grosse source de revenus.

Heather médita un instant, puis elle se leva.

— Bon, il faut que j’y aille.

Kyle l’accompagna jusqu’à la porte.

— Merci d’être venue, dit-il.

Heather lui adressa un pâle sourire et quitta le laboratoire.

Kyle retourna s’asseoir pour réfléchir. Y avait-il quelque chose – n’importe quoi – qui pourrait le pousser à se tuer si la révélation lui en était faite ? Non, non, absolument rien.

Excepté.

Il frissonna.

Oui, il y avait une chose qui, si elle lui était révélée, pourrait le pousser à s’en prendre à sa propre vie, comme l’avait fait le pauvre Josh Huneker au milieu de nulle part, si longtemps auparavant.

La preuve que lui, et non Becky, avait de faux souvenirs de ce qui s’était réellement passé pendant l’enfance de sa fille.

Chapitre 16

Heather retourna au laboratoire de Paul Komensky à la fin de l’après-midi suivant. Le minuscule robot s’activait toujours en émettant un petit son discontinu. Il avait déjà découpé le tiers du dernier panneau de substrat.

— Il n’en a plus que pour quelques minutes, annonça Paul en venant accueillir Heather.

Elle se souvint d’avoir entendu dire un jour qu’il ne fallait jamais faire confiance à la notion du temps des ingénieurs.

— D’accord.

Paul lui montra deux grandes boîtes déjà pleines de petites pièces rectangulaires de substrat peint, pour lui prouver que l’attente ne serait pas longue.

Heather prit les deux premiers carreaux et les assembla. C’était parfait. Soudain, le robot émit un son continu. Heather se retourna et constata qu’elle lui bloquait le passage. Elle s’effaça sur le côté et il roula vers la seconde boîte, y déposa un carreau, émit une série de bips variés et s’arrêta.

— Voilà ! C’est fini ! dit Paul.

Heather souleva une boîte. Elle devait peser plus de vingt kilos.

— Il faut que quelqu’un vous aide à les emporter jusqu’à votre bureau, proposa Paul.

Elle aurait bien apprécié un coup de main, mais elle ne voulait pas abuser. Ou plutôt, se dit-elle avec honnêteté, elle avait déjà contracté toutes les obligations possibles envers Paul Komensky. La veille, elle avait trouvé sa compagnie fort agréable, ce qui après coup lui avait fait éprouver quelques remords. Et maintenant, l’heure du dîner approchait. Elle sentait que les choses n’en resteraient pas là s’il l’aidait à traverser le campus avec son chargement.