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AILLEURS ET DEMAIN

Collection dirigée par Gérard Klein

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Le Cycle de Dune

LE MESSIE DE DUNE

LES ENFANTS DE DUNE

L’EMPEREUR-DIEU DE DUNE

LES HÉRÉTIQUES DE DUNE

LA MAISON DES MÈRES

L’auteur

Véritable légende dans l’univers de la SF, l’écrivain américain Frank Herbert (1920-1986) est mondialement connu pour sa série Dune, vendue à des dizaines de millions d’exemplaires. En France, ses œuvres majeures ont été publiées dans la collection « Ailleurs & Demain ».

Cinquante ans après la première parution de Dune en France, l’univers qu’il a créé continue d’inspirer les plus grands réalisateurs : David Lynch puis Alejandro Jodorowsky s’y sont essayés et c’est désormais à Denis Villeneuve d’apporter une nouvelle pierre au monument qu’a construit Frank Herbert.

Titre original :

DUNE

« Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette œuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales. »

© Frank Herbert, 1965

© Galaxy Publishing Corporation, 1969

Traduction française :

© Éditions Robert Laffont, S.A.S., Paris, 1970, 1972

Design : Sabrina Bowers

Révision de la traduction : L’Épaule d’Orion,

lepauledorion.com

En couverture : Alex Trochut

EAN : 978-2-221-12748-3

Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo.

Suivez toute l’actualité des Éditions Robert Laffont sur

www.laffont.fr

PRÉFACE DE DENIS VILLENEUVE

Dune s’ouvre sur un léger vertige : l’humanité a survécu à quelque vingt millénaires lorsque Paul Atréides voit le jour. Cette promesse apparaît encore plus troublante aujourd’hui, alors que nous savons collectivement que notre monde vacille en silence, sous nos yeux, comme dans ces rêves effrayants, dus à une paralysie du sommeil, où le corps ne répond plus à la conscience. Nous entendons quotidiennement les échos apocalyptiques des scientifiques qui prédisent un effondrement de l’équilibre de nos écosystèmes, mais nous ne bronchons qu’à peine, demeurant convaincus que notre maîtrise de la technologie viendra finalement à bout de la nature. Ce fantasme de domination des éléments ne date pas d’hier. Nous avons toujours eu un penchant pour défier les dieux. À l’évidence, nous avons progressivement perdu notre rapport sacré au monde. C’est une des raisons pour lesquelles je crois que Dune est complètement actuel.

Si la phrase : « le XXIe siècle sera mystique ou ne sera pas » attribuée à André Malraux est bien de lui, j’ose imaginer qu’il entrevoyait la potentielle complète désacralisation du monde naturel par l’exacerbation hypnotique d’un capitalisme sauvage. Cette tendance à objectifier la nature débordant des frontières occidentales, les politiques néolibérales et leur globalisation se transformant en véritables dogmes planétaires, la religion économique règne maintenant sur l’ensemble des sphères d’activité humaines. Tout s’achète désormais, même les consciences. Ce système est surpuissant, impitoyable, tricheur, aux relents colonialistes, engendrant même parfois des entités corporatives psychopathes, bref ce système est Harkonnen. Et pour le renverser et survivre à ses conséquences, il nous faudra peut-être suivre les pas du Muad’Dib.

L’idée de Dune est née en 1957, alors que Frank Herbert survole des bancs de sable bordant les côtes de l’Oregon entre Coos Bay et Florence. Il s’est alors déplacé de Seattle afin d’écrire un article sur une expérience écologique : une nouvelle espèce d’herbe venait d’y être introduite dans le but de freiner la propagation des dunes qui menaçaient la végétation, les routes et les plans d’eau potable. De la puissance de la nature et de l’effort humain pour tenter de la maîtriser venait de naître un élan qui allait animer toute sa création pour les vingt-cinq prochaines années…

Frank Herbert explore, notamment, les liens entre l’écologie et les forces religieuses en orchestrant une véritable célébration du vivant et de son interprétation, réintégrant la notion du sacré dans les replis obscurs du monde naturel. La précision maniaque et poétique avec laquelle il réussit à créer les immenses écosystèmes d’Arrakis m’est sincèrement émouvante. Une logique toute scientifique est appliquée dans la description des moindres détails qui constituent les habitats de Dune. « Le buisson d’encens et l’arbre-fumée, la verveine des sables et le buisson créosote, le renard à poche et le faucon du désert » existent par eux-mêmes comme une extension poétique de ce qui constitue nos écosystèmes terrestres. Ces mêmes espèces étant à leur tour réinterprétées par l’imaginaire des habitants des déserts d’Arrakis, les Fremen, peuple poète d’une extraordinaire ingéniosité technique, voire artistique, vivant en symbiose avec les éléments. Et tout au centre de leur rêve éveillé trône l’immense entité du Shai-hulud, le ver des sables géant, incarnation du dieu vivant des espaces désertiques de Dune. Cette symbiose fremen où vie et mort sont au corps à corps et en équilibre, où science et imaginaire de la biosphère évoluent en un élan commun vers la vérité, est un puissant appel à l’humilité. Dune fait vibrer les cordes inconscientes de notre perception première du monde, pour y retrouver une dimension sacrée, une pensée en relation avec le merveilleux du vivant, avec l’Ayat, le signe de vie. Parce que notre futur verra notre relation à la Mère Première redevenir sacrée, ou il ne sera pas.

Les êtres humains de Dune sont donc mélancoliquement isolés, frappés par la puissance d’évocation des paysages qui les ramène à une vulnérabilité et une humilité toutes bienvenues. Le désert s’y inscrivant comme territoire du divin, mais aussi comme miroir des consciences où le silence révèle le rythme des cœurs et des respirations. L’infini nous renvoyant toujours brutalement à notre vie intérieure, l’exploration physique du désert d’Arrakis s’accompagnant d’une plongée involontaire dans l’inconscient. On y descend lentement en soi au gré des dunes, labyrinthe en constante métamorphose, où la source de nos maux les plus intimes semble trop souvent glisser entre nos doigts, insaisissable comme le sable, au risque d’y perdre la raison. À chaque nouvelle dune, un nouvel espoir, comme le réconfort de la prière lorsqu’on s’y adonne sans attendre de réponse.