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Amour

Le yatagan? Les flammes? C’est trop! — Plus modestement, un mal, familier, Comme la paume de mains aux yeux, — Comme le nom d’un enfant — Aux le`vres. Il est vivant, le deґmon En moi, il n’est pas mort! Dans le corps: dans une cale, En soi-me  me: en prison. Le monde: — les murs. Une issue: — la hache. (Le monde — une sce ` ne, — Balbutie le comeґdien.) Le bouffon boiteux, Lui, n’a pas heґsiteґ. Dans le corps: — dans la gloire, Dans le corps: — dans une toge. Vis longtemps! Tu es Vivant, — tiens a` ta vie! (Seuls les poe`tes sont dans Leurs os: — dans leur mensonge!) Non, pas de promenade pour Nous, confreґrie de chantres. Dans le corps: — dans un peignoir Paternel et douillet. Nous valons mieux. Dans Le coton, nous deґpeґrissons. Dans le corps: — dans une stalle, En soi-me  me: — dans un four. Nous n’accumulons pas de Denreґes peґrissables. Dans le corps: — dans un mareґcage, Dans le corps: — dans un caveau. Dans le corps: — en exil Extre  me. — Deґperdition! Dans le corps: — dans un myste`re, Sur les tempes: — dans l’eґtau Du masque de fer.

Petite torche

La Tour Eiffel — a` porteґe de la main! Va, a` ta main, grimpe. Mais, tous, nous l’avons vue, et Aujourd’hui la voyons, et d’autres choses, Il nous parat ennuyeux Et pas beau, votre Paris… «Russie, ma Russie, pourquoi Bru  ler d’un feu si clair?»

Poeme a son fils

Notre conscience — n’est pas votre conscience. Allez — Assez! — Oubliez tout, enfants, Ecrivez vous-me  mes le reґcit De vos jours et de vos passions. Loth, et sa famille de sel — C’est notre album de famille. Enfants, reґglez vous-me  mes les comptes Avec la ville qu’on veut faire passer pour — Sodome. Tu n’as pas frappeґ ton fre`re — C’est clair, pour toi, mon ange! Votre pays, votre sie`cle, votre jour, votre heure, Et notre peґcheґ, notre croix, notre dispute, notre Cole`re. Serreґs dans une pe`lerine D’orphelin de`s votre naissance — Cessez de prendre le deuil Pour cet Eden que vous n’avez pas Connu! Et pour des fruits — que vous n’avez Jamais vus. Comprenez: il est aveugle — Celui qui vous emme`ne a` l’office des morts Pour le peuple, et qui mange du pain, Et qui vous en donnera — comme C’est rapide, de Meudon au Kouban… Notre querelle — n’est pas votre querelle. Enfants, creґez vous-me  mes vos propres Deґsaccords. Je te remercie, cher fide`le bureau! Tu m’as donneґ ton arbre Pour devenir bureau — et Tu restes — un arbre vivant! Avec ce jeu de jeunes feuillages Au-dessus des sourcils, cette eґcorce vivante, Les larmes d’une reґsine vivante, et Des racines jusqu’au treґfonds de la terre.

Jardin

Pour cet enfer, Pour ce deґlire, Donne-moi un jardin, Pour mes vieux jours. Pour les vieilles anneґes, Pour les vieux malheurs: Le travail — les anneґes, Les sueurs — les anneґes… Pour les vieilles anneґes, Les anneґes de chien — Les bru  lantes anneґes — Le frais jardin… Pour le fugitif Donne-moi ce jardin: Sans — ni — personne, Sans — ni — a  me! Un jardin: ne pas marcher! Un jardin: ne pas voir! Un jardin: ne pas rire! Un jardin: ne pas se moquer! Sans aucune oreille, Donne-moi un jardin: Sans nulle odeur! Sans a  me aucune! Tu diras: assez de douleur — prends ce Jardin — solitaire, comme toi. (Mais tu n’y resteras pas, toi, la`!). Un jardin, solitaire, comme toi. Pour les vieux jours, ce jardin, pour moi… — Ce jardin autre? Et, peut-e  tre, cet autre monde? — Donne-le-moi pour mes vieux jours — Et pour le pardon de l’a  me.

Lecteurs de journaux

Le serpent souterrain glisse, Il glisse, il transporte les gens. Et chacun, — avec son Journal (son eczeґma!). Un tic a` la ma  choire, La carie des journaux. Ma  cheurs de mastic! Lecteurs de journaux. Le lecteur — qui? — Un vieillard, un athle`te? Un soldat? — Ni traits, ni visages, Ni a  ge. Un squelette — sans visage: Une feuille de journal! Celle dont tout Paris — , du front Jusqu’au nombril, est habilleґ. Laisse donc, jeune fille! Tu accoucheras d’un lecteur De journaux! Ils se bal — «Il couche avec sa sur» — ancent — «Il a tueґ son pe`re!» — Ils se balancent — et se remplissent De vaniteґ. Qu’importe a` ces messieurs — L’aube ou le coucher de soleil? Des avaleurs de vide, Les lecteurs de journaux! Lire — les journaux: calomnies, Lire — les journaux: deґtournements, Dans chaque colonne — mensonges, Dans chaque colonne — deґgou  t. — Avec quoi, vous preґsenterez-vous — Au Jugement dernier — dans la clarteґ — Accapareurs d’instants, Lecteurs de journaux! — Au loin! Disparu! Perdu! La peur maternelle est ancienne, Me`re! La presse de Gutenberg est Plus horrible que la poussie `re de Schwartz! Pluto  t e  tre au cimetie`re, — que Dans une infirmerie purulente, Gratteurs de croutes, Lecteurs de journaux! Qui laisse pourrir nos fils A la fleur de l’a  ge? Les incestueux e ґcrivains Pour journaux! C’est cela, amis, — que je pense — Et bien plus fortement encore Que dans ces vers, — lorsque, Mon manuscrit a` la main, Je me trouve en face, ou pluto  t — Il n’y a pas de lieu plus vide! — Devant la non-face Du reґdacteur des saleteґs du journal. Tu ouvres en grand tes yeux vers le ciel bleu — Et tu t’exclames: — un orage! Un audacieux passe, tu le`ves les sourcils — Et tu t’exclames: un amour! Au travers de la mousse grise des indiffeґrences — Moi, je m’exclame: — des poe`mes.